mardi 27 novembre 2012

Le Cabernet et le Merlot ne sont pas une fatalité dans le Bordelais

Buveurs, buveuses, on vous ment, on vous spolie. Depuis des décennies la classe place bordelaise vous fait croire que vous n'avez le choix qu'entre l'austère Cabernet et le grassouillet Merlot. Ou le mélange des deux. Il existe en fait des alternatives pour échapper à cette dictature du goût. Quelques vignerons courageux, tels des Astérix modernes, font de la résistance en persévérant à cultiver des cépages présents dans la région depuis des siècles.


L'un deux est Thierry Bos, photographié devant un pied de Carmenère. Vous voulez parler de ce cépage chilien qui taille des croupières aux vins français ? Oui, je parle bien de ce cépage, mais il n'est pas plus chilien que Christophe Colomb est colombien. Il est Bordelais, nomdidiou, et couramment planté dans la région avant que ne s'abatte le phylloxera. Il donne des vins plutôt riches, épicés, manquant de structure. Il gagne donc à être assemblé.

Thierry Bos cultive aussi un autre cépage planté dix fois plus en Amérique du Sud qu'en France : l'Auxerrois de Cahors, que le Chevalier de Malbec popularisa dans le Bordelais au XVIIIème siècle. Un siècle plus tard, il représentait 90 % de l'encépagement des Côtes de Bourg et était même présent au Château Latour à Pauillac. Là aussi, le phylloxera lui fut fatal. Une fois greffé, sa qualité était beaucoup moins satisfaisante, et il fut quasiment abandonné. Contrairement au Carmenère, il donne des vins structurés, avec des notes fruitées et florales, parfois un peu rudes.

Et comme l'homme a de la suite dans les idées, il a offert l'asile à un troisième réfugié : le Petit Verdot. Lui aussi était une star au XIXème sur les palus de la Gironde, quasiment au prix des plus grands crus classés du Médoc. Lui, c'est les bateaux à vapeur qui ont mis fin à son règne : les vins n'avaient plus besoin de tenir aussi longtemps dans les cales des navires, et on leur alors préféré des boissons de fillettes. Ce cépage donne des vins puissants, sombres, avec une belle trame acide, avec des arômes floraux, fruités et très épicés. 

Le château de Bouillerot fait partie des fournisseurs historiques de Vins étonnants, puisque notre site commercialisa le premier ballon d'essai de Thierry Bos qui était un assemblage 2/3 Merlot 1/3 Carmenère (en 2003). L'année suivante, le pas décisif était franchi : ce fut 1/3 Carmenère 1/3 Malbec 1/3 Petit Verdot. Et depuis, l'assemblage n'a pas changé d'un iota. Il faut dire qu'il permet d'avoir un équilibre harmonieux, exaltant les caractères complémentaires des différents protagonistes.


Il y eu des années où il fallait être patient pour pouvoir savourer cette cuvée à son optimum. Sur ce millésime 2010, il s'avère déjà très séducteur.

La robe est rouge sombre, avec des reflets pourpres. Le nez est expressif dès l'ouverture de la bouteille, fleurant bon la crème fruits noirs (mûre et de myrtille), la violette et les épices chaudes. Bouche ronde, au fruité intense, avec une matière dense, charnue, et des tannins veloutés. Mais surtout une fraîcheur qui apparaît dès l'attaque pour persister jusqu'à la finale, à la mâche gourmande et épicée. 

Un vin parfait accompagner la cuisine du Sud-Ouest (magrets, confits), ou une épaisse côte de boeuf grillée. Sachant qu'à 8.10 €, je ne connais pas beaucoup de vins de ce niveau.



Perso, je l'ai testé sur une cuisse de pintade et des pommes de terres sautées. C'était impec !


Cheeeerrrs !!!

2 commentaires:

  1. Très Intéressant,
    et, rèvons davantage encore,
    votre viticulteur ose-t-il déja les vins
    " sans soufre ajouté après récolte", sinon naturellement présents bien sûr ...

    merci !

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  2. Chaque chose en son temps. Déjà, il est en conversion bio depuis deux ans. Le sans soufre, on verra un peu plus tard. Mais vu la quantité d'antioxydants contenue dans ces cépages,c'est sûrement envisageable.

    Amicalement

    Eric B

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