vendredi 30 mars 2018

Féline : essence de caillou !


Lorsque j'ai dégusté il y a quelques mois le "Picpoul de base" de Félines-Jourdan, je m'étais dit que la gamme supérieure promettait de donner de jolis vins. J'ai eu l'occasion de déguster cette cuvée Féline à Vinisud. Et effectivement, elle m'a bien plu, d'autant que le producteur a eu l'intelligence de ne pas maquiller celle-ci avec du bois. Il a compris qu'il valait mettre le "jus" en valeur. Et c'est réussi : on ressent vraiment ce que peut donner ce terroir de Pinet sans avoir besoin d'en faire des tonnes. 

La robe est jaune paille, brillante. 

Le nez allie sobriété et profondeur, sur la pierre chauffée au soleil, le beurre frais légèrement citronné et les embruns marins. 

La bouche est longiligne, avec une tension qui n'a rien de raide ou de sévère, et une matière aérienne confinant au gazeux aux accents très minéraux, relevés par le zeste d'agrume.

La finale est totalement raccord, ne rompant pas la dynamique : elle gagne juste en densité, avec une légère mâche et la sensation de sucer un caillou, puis de mordre dans l'écorce de citron. Et le minéral/salin qui revient longuement en force.

Il est probable que d'aucuns jugent ce vin un peu ch... car c'est vrai qu'il n'y a aucune volonté de séduction. Mais perso, j'aime vraiment bien. Cette cuvée gagnerait probablement à vieillir quelques années pour se complexifier. Encore faut-il ne pas tout boire avant... 

mardi 27 mars 2018

Darons 2014 : un retour inattendu



En septembre 2015, je vous avais parlé du Darons 2014 à l'occasion de sa sortie. L'erreur d'un magasinier fait que nous en avons reçu quelques cartons lors de notre dernière commande chez Jeff Carrel. Il était tentant de le regoûter pour voir comment il a évolué.

La robe est rubis sombre, sans le moindre violacé.

Le nez est gourmand et complexe, sur la crème de fruits noirs et rouges (myrtille, mûre, framboise), le poivre blanc, les épices douces, avec un soupçon de benjoin et de bonbon à la violette.

La bouche est élancée, déployant une matière ample et soyeuse qui prend progressivement de la densité pour finir plutôt sur le velours. La tension repose sur une belle fraîcheur et un fruit pur, éclatant.

La finale est dans un registre plus ferme, avec une légère astringence et une inattendue amertume. Cette dernière, si elle ne dérange pas le dégustateur, apporte du peps et de l'allonge, sur un fond de coulis de fruits noirs et d'épices.


lundi 26 mars 2018

Les Brunelles : ça envoie !


Cela faisait quelques années que je dégustais sur des salons cette Les Brunelles de Lédogar. Je n'en pensais que du bien. Et puis j'sais pas : le chef ne la commandait jamais. Il s'est finalement décidé il y a un mois, après l'avoir goûté à Montpellier : on ne peut pas dire que nous démarrons avec le millésime (2016) le plus typique de cette cuvée, plutôt glouglou d'ordinaire. La sécheresse a fait de ce pur Cinsault une sorte de monstre. Mais un monstre d'une grande douceur car c'est tout de même du Cinsault !

La robe est pourpre sombre, avec un disque violacé intense. 

Le nez fait très "brut de cuve" – avec ce ça peut avoir de positif –  évoquant le jus de cerise noire et le coulis de mûre, avec une petite touche lactée (yaourt) qui lui donner encore plus de gourmandise. 

La bouche est élancée, laissant échapper au passage une matière dense, veloutée, très vineuse et épicée : on a l'impression de boire un jus de fruit noir qui aurait subi une évaporation de 50 %. C'est d'une rare intensité, mais en même temps très doux, pas du tout agressif. 

La finale est plus puissante, terrienne, avec une mâche crayeuse affirmée. C'est un appel au gras, que ce soit celui du saucisson, de la daube longuement mijotée ou du confit de canard. Le vin devrait alors s'arrondir tout en conservant son fruit irrésistible et sa fraîcheur. Ça doit pouvoir être assez monstrueux...


vendredi 23 mars 2018

Bécassines, c'est ma copine


Cette cuvée Les Bécassines est une cuvée nouvelle à Vins étonnants, mais qui existe depuis longtemps chez le producteur, Christophe Barbier. C'est vrai que jusqu'à maintenant, Eric R avait limité ses achats à ce qui était produit sur les Terres salées. Alors qu'il se fait aussi de très belles choses sur La Clape, réputée à juste titre pour être l'un des plus beaux terroirs du Languedoc (et donc de France). On est ici sur un très classique assemblage 80 % Grenache, 10 % Carignan et 10 % Syrah. Ça pourrait être banal, et pourtant, il se passe quelque chose qui interpelle le dégustateur, qui lui hurle "arrête-toi et profite". Il faut toujours faire confiance en son instinct :-)

La robe est grenat sombre, mais translucide.

Le nez est charmeur, sur la framboise confite, la fraise, le benjoin et les épices douces.

La bouche est ronde, veloutée, très gourmande, avec un fruit pétaradant, de la tension et de la fraîcheur. On pourrait presque trouver qu'il en fait trop. Mais on lui pardonne tout.

La finale a une mâche crayeuse un peu ferme. Mais ce n'est vraiment pas un souci. La framboise poivrée/épicée finit par l'emporter !


jeudi 22 mars 2018

Le jeu du mail : gagné !


On retrouve régulièrement en assemblage le trio Marsanne, Roussanne et Viognier, mais assez peu souvent le duo Marsanne/Viognier. Pourtant, ça semble une bonne idée sur le papier : la discrète Marsanne permet de tempérer un peu l'exubérant Viognier, tout en lui apportant du fond et de la rondeur. L'absence de la Roussanne ne peut qu'être profitable aux deux autres, car elle a tendance à monopoliser l'attention. C'est donc le choix qu'a fait Hildegarde Horath pour ce Jeu du Mail. Et ma foi, la belle alliance théorique se confirme dans le verre, d'autant que la vigneronne a fait le choix de vinifier et d'élever cette cuvée dans un foudre Stockinger : un écrin qui sait rester discret pour valoriser le vin qu'il contient.  

La robe est or pâle, brillante.

Le nez est fin, mûr, précis, sur la poire, l'abricot, la pierre humide et une subtile touche fumée/grillée/beurrée.

La bouche est fraîche, tendue, déversant avec bonheur une matière ronde et mûre à la pureté cristalline (ça peut paraître contradictoire, mais on ressent vraiment les deux). L'ensemble fait très minéral, mais sans la moindre austérité. Le fruit légèrement miellé est omniprésent, tout comme le côté "caillasse".

La finale fait plus sudiste, avec l'abricot mûr qui domine, du gras qui tapisse le palais. Les deux sont contrebalancés par une belle et noble amertume qui se prolonge sur des notes fumées.


mercredi 21 mars 2018

Les deux bijoux de Beynat



Terre à Terre et Cuvée des Lyres sont deux micro-cuvées signées Alain Tourenne, dit le Magicien. Les deux sont 100 % Merlot, les deux sont sans sulfites ajoutés, y compris à la mise. Il y a deux différences notoires, sans parler du millésime : les Lyres proviennent d'un sol argilo-silex, alors que Terre à Terre est issue d'un terroir calcaire. Les Lyres sont élevées en fûts de chêne. Terre à terre est vinifiée et élevée en amphore. 

Normalement, Alain ne les vend qu'à la propriété, car les quantités sont confidentielles. Il a fait une exception pour nous, tout en limitant l'allocation à quelques cartons pour l'année. 





La robe est pourpre sombre, opaque, au disque violacé. 

Le nez a un côté "brun ténébreux", sur la crème de mûre, le graphite, la truffe, et des notes terriennes/telluriques qui apportent de la profondeur. 

La bouche est ronde, très ample, vous emplissant le palais d'une matière dense et veloutée, au fruit mûr et frais, intense. L'ensemble n'a rien de statique : il y a au contraire de l'allant, une énergie intérieure qui pulse bien. 

La finale dévoile une mâche plutôt imposante (le calcaire !) mais aucune astringence désagréable : les tannins sont bien mûrs, et le fruit noir éclatant écrase tout sur son passage !



Cuvée des lyres 2015 (23.00 €)

Le nez est plutôt plus discret, sur une aromatique plus mûre, évoquant l'Amarone (raisins passerillés) tout en dégageant de la fraîcheur. La truffe est là aussi, et puis la terre dans ce qu'elle a de plus profond. On s'enfonce dedans dès qu'on y laisse traîner son nez...


La bouche est plus traçante (le silex ?) et la matière plus soyeuse que veloutée. Par contre, on retrouve le fruit mûr et frais, tout aussi éclatant, et peut-être même plus vibrant. L'ensemble est d'un équilibre superlatif, rarement rencontré à Bordeaux (et ailleurs). 

La finale tonique est totalement raccord. Elle ne fait qu'intensifier les perceptions antérieures, avec une légère surcouche boisée. Mais il y a le fruit et la truffe qui font un superbe come-back, soulignés par du salin/grillé. On frôle l'exaltation !

Nota : je les ai goûtés plutôt frais, température de cave oblige (aux alentours de 14-15 °C). A 18-20 °C, on sent plus que ces bébés pèsent 14.5 % d'alcool. 

mardi 20 mars 2018

Guillemot-Michel : changement de génération


Pierrette Guillemot-Michel est arrivée en 1982 au domaine familial. La transition avec ses parents a duré 3 ans. En 1985, Marc et Pierrette ont les rênes en main et convertissent le vignoble en biodynamie : pour eux, c'était la voie incontournable pour que le terroir de Quintaine puisse s'exprimer entièrement. Même si chaque parcelle a sa propre personnalité, elles forment un tout indissociable. C'est pour cela que durant 30 ans, le couple n'a produit qu'une seule cuvée. Chose rare dans la région : tout est vinifié et élevé en cuve, afin d'éviter tout "parasitage" du bois. 

En 2013, leur fille Sophie les rejoint. Œnologue de formation, elle a soif d'expérimentations. Ne faire qu'une seule cuvée était pour le moins frustrant. Son premier projet fut de distiller les marcs du domaine : deux alambics ont été achetés à cet effet. Le domaine produit désormais un Marc et une Fine de Bourgogne, mais aussi un gin !


Deuxième projet : une bulle. Comme la volonté était de travailler avec un raisin mûr et de ne pas avoir à rajouter du sucre et des levures, la méthode ancestrale s'est imposée. Une première série a été dégorgée il y a peu après 17 mois sur lattes, mais tout a déjà été vendu. D'autres devraient arriver. 

Troisième projet, mené avec son époux  Gautier, arrivé l'année dernière après un passage chez de Montille : produire une cuvée parcellaire issue des plus vieilles vignes du domaine (rien moins que centenaires). Comme le volume total était réduit, il n'était pas possible de le vinifier en cuve. Le moût a donc été entonné dans un demi-muid de 600 litre âgé de 10 ans (le maximum que pouvait concéder Marc). Il n'y a en tout que 700 bouteilles à la vente.



La robe est d'un bel or brillant.

Le nez est élégant et intense, sur des notes d'ananas, de poire mûre, avec de la noisette grillée et une pointe de beurre en arrière-plan.

La bouche est aussi large que longue, aurait dit Hubert de Montille (famille que Gautier connaît bien). On ne saurait dire qui l'emporte entre l'acidité traçante – qui apporte la tension –  et l'ampleur avec laquelle la matière fine et mûre, classieuse, vous envahit le palais. Un très léger perlant intensifie la sensation de fraîcheur.

La finale gourmande dévoile une mâche crayeuse dominée par les fruits exotiques, se poursuivant sur les épices et une sensation saline.



La robe est un peu plus intense.

Le nez est plus affirmé, plus mûr, avec de la pêche jaune qui s'ajoute à l'ananas et à la poire. Mais aussi de fines notes d'élevage (pain grillé, épices douces).

La bouche est beaucoup plus ronde, avec une matière plus dense, plus charnue, toujours aussi mûre, mais avec une bonne fraîcheur sous-jacente. Et puis le fameux minéral si difficile à définir. En tout cas, il y a du monde dans le verre !

La finale dépote bien, avec une mâche plus affirmée, mais si bien enrobée par le fruit et la gourmandise que ça passe tout seul. Et puis surtout, c'est long, très long, avec une belle persistance sur les agrumes confits (l'orangette !).

(rebu 10  jours après ouverture, il avait gagné en densité/minéralité sans présenter la moindre oxydation). 

lundi 19 mars 2018

Sous la montagne, les vins


Certains ont déjà bu – et apprécié, j'espère ! – la cuvée Sous la Montagne 2015. Eh bien, la famille s'agrandit avec trois nouveaux vins, et cela ne devrait pas s'arrêter là. En effet, Sébastien Calduch, le responsable-production de la Maison Carrel – oui, on dit comme ça, maintenant –  vient de se lancer dans l'aventure viticole à Ansignan. Ça ne vous dit rien ? On vous aide :


Voilà à quoi ressemble le vignoble de ce nouveau domaine (qui s'appelle aussi Sous la montagne). Cela vaut le coup d'oeil : les paysages sont superbes. 


En attendant les cuvées du domaine, voici donc ses sœurettes : leur point commun est la volonté de Jeff et de son équipe de continuer à prolonger le plus longtemps possible la vie de vignobles menacés d'arrachage, car jugés pas assez rentables.  Il y a des raisins de Sébastien dans la 1ère cuvée. Pas dans les autres (mais c'est Sébastien qui gère les vinifications et l'élevage).


Carignan blanc 2016 (9.90 €)

Une grande partie des vieilles vignes de rouges sont complantées avec des pieds de Carignan blanc et gris. Cette cuvée provient du tri des parcelles de rouges de la cave coopérative de Caramany et du Domaine Sous la montagne. L'assemblage exact est  85 % Carignan blanc et 15 % Carignan gris (on a le droit de ne mettre que le cépage principal sur l'étiquette s'il fait 85 % ou plus).

La robe est jaune pâle aux reflets argentés.

Le nez est gourmand, sur les fruits blancs, la craie mouillée et le zeste de citron.

La bouche est ronde, ample, très fraîche, avec une matière croquante et désaltérante qui vous dévale dans le gosier tel un ru de montagne. C'est caillouteux à souhait, tout en étant très digeste. La finale  est tonique, finement citronnée , avec une légère astringence qui fait agréablement saliver. Très recommandable !


Vignes perdues 2016 (13.90 €)

Issu de Grenache Gris de plus de 60 ans :  45 % issu du tri de parcelles de Caramany sur granite et 55 % sur les schistes de Villeneuve des Corbières (mélange de deux régions viticoles, d'où l'appellation Vin de France). La vinification et l'élevage sur lie se font en vieux fûts, histoire de ne pas trop marquer le vin

La robe est jaune paille, brillante. 

Le nez est intense, sur la pomme rôtie au beurre fumé, la pierre chaude, le pain grillé. 

La bouche est ronde, très ample, avec une matière mûre et riche, moelleuse qui vous tapisse généreusement le palais. Une fine acidité sous-jacente apporte de la tension et évite de tomber dans la lourdeur. 

La finale dévoile une mâche puissante soulignée par des amers intenses, où se mêlent le coing, le gingembre et l'abricot mûr. Puis le grillé fait son come-back. Décoiffant !


Fitou 2016 (13.90 €)

Carignan de plus de 60ans et  Syrah de plus de 30 ans plantés sur les schistes de Villeneuve des Corbières. Les raisins de Syrah sont égrappés et foulés, longue macération pré-fermentaire à froid / Lorsque la fermentation des Syrah est presque terminée, on ajoute les Carignan les plus mûrs en raisins entiers sur les Syrah pour une macération carbonique. Lorsqu'elle est terminée les presses sont assemblées.

La robe est pourpre très sombre à peine translucide.

Le nez est plutôt discret, sur la crème de fruits noirs, des notes lactées et quelques épices douces.

La bouche est ronde, ample, avec une matière mûre, juteuse et  veloutée qui se répand voluptueusement sur votre langue. L'ensemble est bien tendu, frais et équilibré, dominé par la cerise noire et le cacao.

La finale est finement mâchue, toujours sur la même aromatique – qui pourrait faire penser à un Maury, le sucre et l'alcool en moins – avec des nobles amers et une inattendue acidité qui prolongent le vin avec beaucoup de peps.

vendredi 16 mars 2018

Xavier Amirault : hymne au Cabernet-Franc !


Comme beaucoup, lorsque quelqu'un évoquait Amirault, je pensais à Yannick. Il faut dire qu'il a été beaucoup mis en avant ces dernières années par les guides et la presse spécialisée. C'est Patrice Ponsolle, notre client restaurateur à Cajarc – patrie de Papy Mougeot – qui m'a fait découvrir Xavier Amirault il y a 2-3 ans. De mémoire, c'était un Quarterons 2013. L'année était assez catastrophique dans le secteur. Eh bien là, c'était très bon, fin, élégant, sans le moindre poivron.Quelques mois plus  tard, j'ai pu déguster toute la gamme à un salon de vins en biodynamie : j'ai beaucoup aimé. Puis de nouveau l'année suivante où la qualité fut confirmée. Lorsque le chef s'est rendu cette année à Millésime bio, je lui marqué Xavier Amirault dans la wishlist. Il a goûté. Il a aimé. Il a commandé. 

Sont donc arrivées quatre cuvées 100 % Cabernet-Franc. Trois de 2015 et une de 2014. Leur différence provient surtout des sols dont elles sont issues. C'est pour cela que je les ai indiquées. J'ai aussi précisé les contenants de l'élevage, car leur apport est loin d'être neutre.  La dégustation s'est faire par ordre croissant de prix ... qui correspond bien à un ordre croissant de qualité, d'expression de complexité (mais pas de puissance). 


Les Quarterons 2015 (11.90 €)

Graviers, sables sur sous-sol d'alios et d'argile
Élevage en cuve

La robe est rubis translucide.

Le nez est fin, frais, appétant, sur le cassis (fruit et feuille), le poivre et le menthol.

La bouche est élancée, tonique, avec une matière souple, soyeuse, très fraîche, et un fruit bien expressif.

La finale est nette, finement mâchue, avec un retour du cassis et du menthol, se prolongeant sur des notes poivrées. Y a bon !



Graviers profonds
Élevage partiel de 9 mois en foudre

La robe est grenat sombre translucide.

Le  nez classieux est un hymne au cassis, souligné par des notes de tabac gris et de poivre blanc.

La bouche est toute aussi élancée et tonique, mais avec une matière plus dense, plus ronde, plus sensuelle, et cette fraîcheur revigorante du millésime 2014.

La finale est raccord, très fraîche, tonique, d'une impressionnante longueur, avec toujours le cassis mentholé en fil conducteur. J'adore!



Graviers, argilo-siliceux et quelques calcaires
12 à 18 mois dans des demi-muids (500 l) 
renouvelés par tiers.

La robe est grenat sombre translucide, avec des reflets violacés.

Le nez est encore axé sur le cassis, mais avec plus de complexité et de raffinement : on frôle la grande parfumerie !

La bouche affiche autant de tension que les vins précédents, mais la concentration de la matière fait qu'elle passe plus en arrière-plan. Le vin gagne encore en densité tout en ne perdant pas en fraîcheur  et en précision.  LA classe !

La finale a une mâche crayeuse un peu plus prononcée, mais c'est d'une gourmandise absolument irrésistible, avec une fraîcheur des plus communicatives. Et un cassis, je vous raconte pas ! Superbe.  


Le Fondis 2015 (17.70 €)

Graviers profonds sur fond d’argile
 Vinification intégrale en demi-muids de 500 l
Élevage de 18 à 24 mois dans les mêmes fûts


La robe est grenat sombre translucide, avec des reflets pourpres.

Le nez est proche du précédent, avec encore plus de précision/raffinement, et un surplus de menthol.

La bouche est éclatante de fraîcheur, avec une acidité/laser qui étire et tend le vin. La matière paraît plutôt moins concentrée, mais elle possède une classe folle, touchant au sublime. C'est LE Cabernet Franc dans ce qu'il a de plus noble.

La finale est explosive, sans la moindre dureté, avec un cassis/tabac/menthol qui  atteint des sommets. Grand vin !




jeudi 15 mars 2018

Clisson Vs Monnières Saint-Fiacre : le match retour !


Il y a un peu plus de deux ans, j'avais publié un comparatif entre les crus Clisson et Monnières Saint-Fiacre (sur le millésime 2013). Il n'est pas question de savoir si l'un est meilleur que l'autre – ça n'a d'ailleurs aucun sens – mais plutôt de voir en quoi ils diffèrent. En décembre 2015, j'avais par exemple conseillé de boire plutôt le Monnières Saint Fiacre sur des fines de claires plutôt petites bien marquées par l'iode, alors que le Clisson appelle des huîtres plus grosses, plus charnues, moins iodées (noisettées par exemple). Il est aussi utile de savoir s'ils sont prêts à être bus maintenant ou s'ils nécessitent encore de la garde. 

Maintenant que les enjeux du débat sont posés, ouvrons les bouteilles... 




Gneiss et mica-schistes

La robe est or pâle, brillante.

Le nez est fin et élégant, sur les fruits blancs légèrement beurrés, le miel d'acacia, le mousseron, la pierre humide... Avec l'aération, les embruns marins sont de la partie.

La bouche est élancée, avec une tension qui ne faiblit pas jusqu'en finale, mais également ample : une belle matière mûre, fraîche – caillouteuse à souhait – vous emplit le palais avec l'énergie d'une vague océane.

La finale est superbe, mêlant les notes minérales au beurre et au citron confit, soulignée par un très subtil duo amer/astringent, se prolongeant sur le salin et le pomelo.



Clisson 2015 (14.50 €)

 Sous-sol granitique recouvert de graviers 
ou d’argiles associées à des galets roulés


La robe est or pâle, brillante.

Le nez incisif est dominé par l'agrume confit et le beurre frais, évoquant le lemon curd (comme certains Chablis). Mais il y a aussi de la poire mûre qui pourrait rappeler le Chenin.

La bouche est splendide, évoquant une lame d'acier qui vous traverse le palais. La matière est plus dense que Monnières, avec une minéralité encore plus affirmée. Ce n'est plus du jus de caillou : c'est du caillou ! Mais pas que : l'agrume confit est toujours là, vibrant, empêchant de tomber totalement dans le cistercien.

La finale est plus intense, plus mâchue, très crayeuse. Puis arrive un fantastique amer – évoquant les grands Chenins de Loire – qui vous emmène loin, très loin. Que c'est beau !

Conclusion : comme lors de la dernière confrontation, le Monnières est plus fin et élancé que le Clisson. Il est sûrement plus proche de ce que l'on attend d'un Muscadet même s'il en est une version particulièrement élégante. Il sera évidemment parfait avec un plateau de fruit de mer, mais aussi des sushis, un tartare de poisson cru légèrement citronné, une sole grillée... 

Le Clisson, lui affiche toujours un caractère des plus affirmés, avec une matière impressionnante. Je n'irais pas jusqu'à dire "on adore ou on déteste", car je ne peux imaginer que l'on puisse détester ce très beau vin.  Mais disons que l'on peut être dérangé par sa puissance et sa fougue, particulièrement son amertume finale. Il sera parfait avec les chairs fermes d'un homard, d'une lotte ou d'un turbot. 

Les deux sont déjà très agréables aujourd'hui, mais gagneront à être oublier au moins 5 ans pour commencer à exprimer tout leur potentiel. 15-20 ans de garde ne devraient pas leur faire peur !


mercredi 14 mars 2018

Trois nouveaux bordeaux !


La rencontre avec ces deux domaines s'est faite le même jour et au même endroit que celle de Beynat : en avril 2017 au Salon des vignerons bio d'Aquitaine. J'avais vraiment beaucoup aimé les deux, mais il est difficile de tout référencer en même temps. Les voilà donc parmi nous, avec un timing des plus impressionnant : ils sont arrivés à l'entrepôt le jour de la diffusion des Racines et des ailes où il est question de Coutet durant une bonne vingtaine de minutes. Vous pouvez le revoir ICI


Même si les deux domaines s'entendent très bien – ils font commercialisation et expédition communes – ils présentent des profils très différents. Coutet a plus de 400 ans d'existence et est situé sur l'un des plus beaux terroirs de Saint-Emilion, avec des vignes cultivées dans la (bonne) tradition. Émile Grelier est un domaine très récent, créé de toute pièce dans un secteur où les vignes sont rares (au nord est de la Gironde, à la limite de la Charente-Maritime), avec une démarche assez unique : l'agroforesterie. Une image vaut mieux que des grands discours :


Delphine et Benoit Vinet ne font que remettre au goût du jour une pratique ancienne : planter des arbres fruitiers au milieu des vignes. Cela permet d'établir un véritable biotope, où plantes et animaux vivent en harmonie. Le domaine est d'ailleurs devenu un refuge LPO (Ligue de la Protection des Oiseaux) en 2014.

Les vins présentent également des styles très différent : Coutet est un vin raffiné, élégant, finement boisé et apte à une longue garde. Émile Grelier est destiné à être bu jeune, pour profiter de son fruit préservé par l'élevage en cuve. Son style gourmand/canaille fait que l'on n'a pas l'impression de boire du Bordeaux (en tout cas, le Bordeaux tel qu'on l'imagine). 



100 % Merlot

La robe est rubis sombre translucide.

Le nez est gourmand, charmeur, sur les fruits rouges et noirs frais/bien mûrs, avec du cassis frais et une pointe de menthol qui apportent de la fraîcheur.

La bouche est ronde, charnue, pulpeuse, avec une matière veloutée, au fruit expressif. Des tanins commencent à apparaître en fin de bouche, mais ils jouent dans un registre canaille.

La finale dévoile une mâche délicieusement rustique – celle qui vous fait claquer la langue de plaisir – avec toujours ce mix de fruits frais/bien mûrs, et une belle pincée d'épices (et de réglisse). Certes, ça accroche un peu, mais on redemande !


Émile Grelier 2015 (9.90 €)

100 % Merlot

La robe est grenat sombre translucide.

Le nez est des plus avenants, mariant le cassis frais – qui donne de la profondeur – à la crème de fruits noirs.

La bouche est ronde, ample, soyeuse, avec une matière plus dense qu'elle n'y parait au premier abord. Le fruit est superbe, éclatant de fraîcheur, avec une sensualité rare dans un Bordeaux.

La finale est finement mâchue, dans un style gourmand, avec le cassis frais qui domine,une palanquée d'autres fruits en arrière-plan, mais aussi du poivre et du menthol.



60% Merlot, 30% Cabernet Franc, 3% Cabernet Sauvignon, 7% Malbec

La robe est grenat bien translucide.

Le nez est fin, classieux, sur la truffe, les fruits rouges (framboise, bigarreau), et quelques notes d'élevage noble (pain grillé, tabac blond). La bouche est ronde, ample, aérienne, avec une matière soyeuse qui se déploie avec élégance. L'ensemble est frais, équilibré, avec une belle mise en avant du fruit – tout en ayant en arrière-plan une palette aromatique complexe).

La finale crayeuse signe bien le terroir calcaire de Saint-Émilion. Elle est soulignée par un boisé encore présent qui se fondra dans les années qui viennent. On retrouve la truffe, les fruits rouges, mais aussi le pain grillé, le tout se prolongeant sur les épices douces et quelques notes salines.

mardi 13 mars 2018

Rose d'Emile : retour aux sources


2017 fut une année difficile chez Émile et Rose. La sécheresse a frappé dans la région, diminuant drastiquement les rendements car les baies sont beaucoup plus petites que d'ordinaire. Sur les rouges, cela va donner des vins concentrés. Pour leurs blancs, Caroline et Marcel ont décidé de vendanger plus tôt que d'ordinaire. Cela a permis d'avoir une fraîcheur plus importante que dans les millésimes précédents – je les trouvais un peu "mou" – ce qui n'est pas pour me déplaire, mais aussi plus de fond "minéral". J'ai retrouvé le Carignan blanc qui m'avait impressionné il y a une bonne dizaine d'années lorsque j'avais découvert le domaine.

La Rose d'Émile est la "petite" cuvée, vinifiée et élevée en cuve. J'attends avec impatience l'arrivée de la "grande" vinifiée qui ne voit que l'amphore... 

La robe est jaune paille, brillante.

Le nez n'est pas très causant : on sent vaguement du miel, de la pierre humide, quelques embruns marins.

La bouche est ronde, bien ample, déployant une matière pulpeuse, douce au toucher, avec ce que ça peut avoir de réconfortant. De la fraîcheur, il y en a, mais elle est diffuse, sans la moindre acidité apparente. Nous sommes plus sur un vin d'ambiance que de sensation ou de démonstration.

La finale est intense, mais là encore tout en douceur. Un espèce de Tsunami au ralenti qui se dirige tout doucement vers votre gorge avec des notes salines qui montent crescendo. Rarement l'ébouriffant s'est fait aussi calme. S'en dégage donc une jubilation sereine,  apaisée. Vous êtes bien et faites corps avec le vin. Le nirvana n'est pas loin... (8.40 € !)


lundi 12 mars 2018

Ikebana 2012 : 4 ans plus tard...


Il y a un peu plus de 4 ans, je vous avais parlé de la nouvelle cuvée de Zélige-Caravent : Ikebana. Depuis, de nombreuses sœurettes sont apparues, et Ikebana est devenue un classique du site. Les hasards de la vie font qu'un célèbre importateur américain – dont vous découvrirez le nom sur la contre-étiquette – n'a pas pris toutes les bouteilles de 2012 qu'il avait réservé. Luc Michel nous en a donc proposé quelques cartons. Ce que nous n'avons pas refusé. 

Voici ce j'écrivais à l'époque sur ce vin : "Le nom de la cuvée, ikebana, est fort bien trouvé, car le bouquet de ce vin frôle la perfection. Je préfère dire "frôle", car la perfection est ennuyeuse, alors que ce n'est pas du tout ici le cas. Oui, ce nez est tout simplement magique, entre liqueur de framboise, violette, tubéreuse, encens et poivre blanc. Difficile de ne pas évoquer un grand parfum. Le toucher de bouche est raccord, ample et doux, avec ce qu'il faut de de fraîcheur et de tension. Une  vraie caresse... La finale est savoureuse et épicée, avec une fine mâche qui devrait lui permettre de se confronter à une belle viande."

Il y a bien sûr le devoir d'information qui m'a poussé à ouvrir une nouvelle bouteille. Mais aussi, j'avoue, de la curiosité d'amateur. Qu'était devenue cette bouteille qui m'avait tant séduit ? 

La robe est pourpre sombre, sans signe de vieillissement. 

Le nez a bien sûr évolué, mais pas tant que ça : on retrouve la liqueur de framboise, l'encens, le poivre blanc, la violette sous une forme plus confite. S'ajoutent juste une pincée de cacao et deux d'épices. Un peu de prune, aussi ?

La bouche est sphérique, avec une matière toujours aussi douce, d'un velours plus épais qu'il n'y paraît, et une allonge d'une totale évidence : tout se déploie avec naturel et  fraîcheur. 

La finale a une mâche un peu plus prononcée, légèrement asséchante – un des effets possibles du vieillissement – et des  notes d'évolution : cuir, prune, cacao, avec toujours en arrière-fond la liqueur de framboise. La belle a pris de l'âge, c'est évident. Cela plaira à certains, moins à d'autres. Les goûts et les couleurs... 



vendredi 9 mars 2018

Une rose est éclose


Cette cuvée n'aurait jamais dû exister. Son origine remonte à la terrible gelée d'avril 2017 qui a détruit 4 hectares du vignoble. La vie a repris le dessus grâce aux bourgeons secondaires, mais avec un bon mois de retard. En septembre, les Cabernets-Sauvignons n'étaient pas assez mûrs pour produire un vin rouge. Par contre, l'acidité de leurs jus pouvaient donner un Pét' Nat' intéressant. Allons-y pour Bulle rose en les assemblant avec 30 % de Sémillon (histoire d'avoir un peu de rondeur). La mise en bouteille s'est faite lorsqu'il restait 24 g/l de sucres résiduels. Les levures ont transformé environ 10 g en alcool, créant suffisamment de gaz carbonique pour avoir une bonne effervescence. Aucun sulfite n'a été ajouté durant tout le process, ce qui ne veut pas dire qu'il n'y en pas du tout : les levures en libèrent durant la fermentation. Mais à moins d'être allergique, ce n'est vraiment pas un souci. 

La robe est entre le saumon clair et l'œil de perdrix avec un fin cordon de bulles. 

Le nez évoque les petits fruits rouges, les épices et le sucre d'orge. En  arrière-plan, on  sent légèrement le cassis qui apporte de la fraîcheur aromatique. 

La bouche est à la fois ample et élancée, avec fine acidité qui tend et étire le vin et une matière ronde, gourmande, fruitée (pomme, poire), légèrement douce. Les bulles fines et caressantes, pas du tout agressives, apportent le juste équilibre. 

La finale mêle avec subtilité amertume et astringence qui amène le peps nécessaire pour équilibrer les 15 g de sucres. Néanmoins, par la douceur qu'il dégage, cette bulle me parait plus indiquée pour la fin de repas que l'apéritif. Ceci dit, l'été prochain avec un melon et du jambon cru, ça peut être sympa :-)

11.90 € pour une bulle de qualité en biodynamie et sans sulfites ajoutés me paraît un bon rapport qualité/prix. 


jeudi 8 mars 2018

#womendowine, un an plus tard



Il y a pile un an, je vous avais parlé du projet #womendowine. Depuis, le bébé a grandi : l'association compte 219 membres : des vigneronnes, bien sûr, mais aussi des oenologues, des sommelières, des communicantes, des journalistes, des blogueuses, des juristes, des commerciales, des cavistes.... 

Rarement autant de compétences ont été regroupées dans une association. Autant dire que l'on peut compter sur toutes ces dames pour faire parler d'elles dans les mois et années à venir. 

Déjà, on sent une évolution des mentalités : dans le TOP 20 2017 de Vitisphère, on compte 7 femmes contre 3 l'année d'avant. Par contre, à la RVF, il y a encore du boulot, avec juste deux femmes sur 12 lauréats : Elorri Reca, avec qui nous travaillons depuis son premier millésime et  Lydia Bourguignon, l'alter ego de son époux Claude.

A l'occasion de cette journée de la femme, nous participons avec plaisir à la promotion de toutes celles qui contribuent au plaisir de nos papilles. Voici celles qui travaillent avec nous à Vins étonnants:


Brigitte Chevallier


(Clos de Gravillas)


(Domaine S et B Tissot)


(Domaine Lassolle)


 (Domaine Naudin-Ferrand)


(Roc des Anges)

(Campi di Fonterenza)


(Grange de 4 sous)


(Domaine la Cabotte)


(Domaine Occhipinti)


(l'Enclos des roses)


(Champ des Treilles)


(domaine Bordaxuria)


Château Haut-Lavigne


(Domaine du Joncier)

(Alezon et Clovallon)


(Foradori)


(Champagne Bedel)


(Cru Barréjats-Daret)


(Cascina Tavijn)


(Causse Marines)


(Champagne Boulard)


(Domaine des Rouges Queues)


(Champagne Tarlant)



Caroline Gisclard
(Emile et Rose)


Fabienne Mann
(Mas des Caprices)


Mireille Meyer
(Domaine Julien Meyer)


Ève Cartier
(Mas de Gourgonnier)


Sophie Guillemot-Michel
(Domaine Guillemot-Michel)


Palma Dardé
(Mas des Chimères)


(Cave Verdier-Logel)


Et toutes celles que j'ai oubliées...