mercredi 11 juillet 2018

Quand j'pense à Fernand, je b...


... je biche, bien entendu !

Ce n'est pas si souvent qu'un vigneron dédie deux cuvées  à un confrère disparu. Le premier est Marc Parcé, le second Fernand Vaquer. Fernand II, devrais-je préciser, fils de Fernand 1er , créateur du Domaine Vaquer et grand joueur de rugby. Fernand Vaquer, donc, fut parmi les premiers vignerons du Roussillon à mettre son vin rouge en bouteilles. Car jusqu'alors, seul les vins mutés étaient jugés assez bons pour être commercialisés à la propriété. L'appellation Côtes du Roussillon n'a été reconnue par l'Inao qu'en 1977. Ses étiquettes portaient la mention VDQS "Roussillon dels Aspres" (créée en 1951). Mais surtout, il a soutenu les deux cépages traditionnels, le Carignan et le Maccabeu à une époque où l'on jugeait nécessaire de les "améliorer" avec la Syrah, la Roussanne ou la Marsanne. 

Comme l'écrit Marc Parcé,   "il y a rarement de « mauvais » cépages mais simplement une inadéquation entre le cépage, le terroir et le vigneron" (c'est bien trouvé, ça !). 

Le hasard fait bien les choses : nous venons de faire rentrer des cuvées vinifiées par Fernand Vaquer dans les années 80 (disponibles ICI). Pur Maccabeu pour les blancs, Carignan très majoritaire pour les rouges. Plus de 30 ans après leur mise en bouteille, on se rend compte qu'ils ont encore de très belles choses à dire – certainement plus que dans leur jeunesse, même. 

Après avoir dégusté ces deux cuvées "modestes" dédiées à Fernand, je me demande si à leur tour elles ne pourront pas tenir 30-40 ans. Car même si elles sont d'un abord facile et  ne sont pas des plus démonstratives, on sent qu'elles ne sont pas dénuées de fond et que le temps pourrait leur apporter une dimension supplémentaire. En tout cas, cela ne coûte pas trop cher de faire le test... 




100 % Maccabeu

La robe est or pâle, brillante.

Le nez est fin et complexe, mêlant le zeste d'agrume (oranger), le floral, le pierreux (ardoise chaude) et même le marin (embruns).

La bouche est ronde et ample, vous envahissant le palais d'une matière aérienne et intense – généreuse et "caillouteuse". L'équilibre est remarquable, très loin de l'archétype "vin blanc du sud".

La finale a une mâche bien crayeuse, finement citronnée y compris dans les amers de l'écorce, se prolongeant sur le salin. 'tain, que c'est bon  !




100 % Carignan

La robe est grenat sombre translucide, avec une pointe violacée.

Le nez est fin, gourmand, sur la  confiture de fruits noirs en train de mijoter, avec une touche d'épices douces et une pincée de benjoin.

La bouche est toute aussi fine, élancée, gagnant vite en ampleur : elle déploie alors une matière soyeuse dans un premier temps, un peu plus rustique dans un second, tout en restant souple et fruitée/épicée. L'ensemble dégage un charme des plus irrésistibles, non par sa beauté formelle, mais plutôt par la nostalgie qu'il génère :  on a cette sensation de boire un vin intemporel, en dehors des modes qui passent et trépassent.

La finale est finement mâchue  – avec cette accroche canaille – mêlant les fruits compotés, les notes ferreuses/sanguines et le cuir, et se prolonge sur les épices et la violette. Persiste cette impression de boire un p'tit vin qui délivre un grand message. C'est indicible, mais sacrément buvable 


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