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Une longue visite au Domaine d'Ansignan
Cela faisait des années que Sébastien Calduch, bras droit de Jeff Carrel, rêvait de gérer un domaine viticole. Descendant de vignerons, il a ça dans le sang – et cela se ressent très fort lorsqu'on passe une journée à échanger avec lui. L'occasion lui est donnée en 2016 de racheter avec Jeff un ensemble de parcelles situées à Ansignan, petit village de 160 habitants. À l'heure actuelle, il totalise18 hectares de vignoble, mais cela devrait évoluer assez rapidement, car d'autres projets sont en cours.
L'idée n'est pas d'avoir la plus grande surface possible, mais plutôt de sauver un patrimoine viticole menacé de disparition. Les nouvelles générations ne sont pas intéressées par la reprise de ces parcelles familiales. Donc soit elles sont à l'abandon – la nature reprend alors rapidement le dessus – soit elles sont vendues en terrain constructible (quand c'est possible). La tentation est grande, car le prix à l'hectare est nettement plus élevé.
Le domaine d'Ansignan reste la seule propriété viticole de la commune. Il contribue à la vie de celle-ci en employant quatre travailleurs locaux, dont Anne-Sophie Pouyadou (à gauche sur la première photo) dont le beau-père était l'un des vignerons qui ont vendus des parcelles. Elle gère le caveau de vente situé dans le village, approvisionne les cafés et restaurants du secteur, et – très important – est en relation permanente avec les habitants, les associations et les administrations locales. Les trois autres – dont un apprenti – travaillent essentiellement à la vigne.
Lorsque je suis passé fin octobre, il étaient en train de rénover des murets dans le secteur "Garrigues".
Les familles de ces employés comprennent des enfants qui sont scolarisés dans le village, contribuant à sa non-fermeture. D'autres habitants sont embauchés au moment des vendanges, aidés par les camarades de classe de l'apprenti – qui tournent dans les différents domaines qui les emploient – et une bande fidèle de vendangeurs espagnols devenus des amis.
Cliquer pour agrandir |
Pour vous repérer, je vous ai mis une carte de la région. Ansignan est dans la vallée de l'Agly, juste à côté de Saint-Arnac (connu depuis 20 ans grâce à la préceptorie de Centernach ... qui est maintenant à Saint-Paul de Fenouillet). Un peu plus au nord, il y a Lesquerde, où les domaines Laguerre et Semper possèdent des vignes. En contrebas, il y a le lac de Caramany, né de la construction d'un barrage ayant pour but d'écrêter les crues de printemps et d'automne. Un peu plus à l'est, il y a Fort de France où est établi Roc des Anges.
Contrairement au secteur de Maury où les schistes noirs prédominent, nous sommes ici en secteur granitique. Mais le tour des parcelles va montrer que cette roche peut présenter de nombreuses nuances.
Toutes les vignes sont pour l'instant sur la commune d'Ansignan. Il y a 3 tènements (groupe de parcelles) en production et un quatrième qui vient d'être planté. En rouge, sur un coteau surplombant l'Agly, il y a la garrigue. En vert, tout en haut, c'est Camp de l'argent, sur un promontoire granitique. Et à l'ouest, en bleu, ce sont les vieilles vignes de Dolmen. En orange, ce sont des toutes jeunes vignes à côté du Pont-Aqueduc.
Si l'installation première date des romains (200-300 ans ap. JC), il a été pas mal retouché au fil des siècles, particulièrement au moyen-âge.
Si la partie supérieure de l'édifice joue encore le rôle d'aqueduc, transportant l'eau de l'Agly captée en amont vers une zone de culture accueillant une vingtaine de jardins et vergers.
L'intérieur est doté d'un tunnel permettant de traverser la rivière sans se mouiller les pieds ni la tête.
Une association syndicale gère l'entretien et l'utilisation de l'aqueduc et du canal qui le prolonge. Sébastien en est le président (et l'on sent que ça lui tient à coeur).
A quelques centaines de mètres, nous sommes à La garrigue d'où l'on voit le village.
Vous avez sûrement lu souvent le terme arènes granitiques (classique en Beaujolais). Eh bien voilà à quoi ça ressemble. C'est du granite tellement décomposé qu'il ressemble à du sable. Cela donne des vins d'une grande finesse.
Issues de sélections massales, les vignes de ce secteur donne de petites grappes. D'où l'idée de leur dédier une cuvée pleine de fraîcheur : Les petites grappes. On y trouve aussi du LLedoner pelut, une variété de grenache noir dont la surface inferieure de la feuille est recouverte de tous petits poils qui réussissent à retenir les gouttelettes d'eau. Un réflexe de survie dans les zones les plus sèches.
Nous montons ensuite une route très sinueuse pour atteindre le Camp de l'Argent. Pour y rentrer, il faut ouvrir une barrière, car ce tènement est entièrement clôturé afin de protéger les vignes des sangliers. À leur arrivée, Seb et Jeff acceptaient la présence des sangliers, car ils considéraient qu'ils étaient chez eux. Mais les dégâts qu'ils génèrent sont trop importants pour être ignorés. D'où l'installation de clôtures et de portails permettant aux promeneurs et aux voisins de circuler. Le coût est très élevé, mais s'avère "rentable" sur le long terme. Pour l'instant, il y a 5 hectares de clôturé. D'ici quatre ans, tout le domaine devrait l'être.
Le problème des sangliers se résout aussi par la chasse. C'est pour cela que Sébastien participe aux réunions des chasseurs locaux.
Nous sommes ici sur un granite très ancien (500 millions d'années)
On y trouve aussi une roche sombre, dure et lourde; qui peut faire songer à celle des météorites .
C'est peu de dire que la Syrah règne ici en maître, puisqu'il n'y a QUE de la Syrah. Un choix qui peut paraître étonnant aujourd'hui. Mais dans les années 70-80, ce cépage dit "améliorateur" était nettement mieux vu que le Carignan, et le Grenache était surtout synonyme de vins mutés qui se vendaient de moins en moins.
Le pic de Vergès depuis les vignes.
Nous finissons notre tour par le plus beau tènement du domaine : Dolmen. Il s'appelle ainsi, car un peu plus haut, il y a le dolmen de la Rouyre.
Photo de Fabrice Ferrer - Wikipedia |
Nous sommes toujours sur du granit, mais vous pouvez voir par sa couleur rouge qu'il est plus ferrugineux.
Les vignes en gobelet sont plantées en "carré", ce qui permet de travailler le sol dans les deux directions.
jeudi 12 janvier 2023
Jouez la Finot !
La robe est entre l'or liquide et le cuivre.
Le nez est intense, complexe, et tout simplement superbe, sur la tarte aux mirabelles, l'orange confite, les épices orientales, la rose fanée, et plein, plein d'autres choses.
La bouche est élancée, tendue par une acidité arachnéenne, et déploie une matière ronde, mûre, à la texture moelleuse, sensuelle, avec en arrière-plan une légère trame tannique et un filet de gaz carbonique qui titille les papilles.
La finale est énergique, racée et traçante, sur l'abricot rôti au beurre noisette, l'écorce d'orange confite et une légère touche de quinquina, amenant de nobles amers qui persistent longuement. Que c'est bon !
La robe est jaune paille brillante.
Le nez est fin, mûr, sur les fruits jaunes confits et les épices.
La bouche éclate de fraîcheur en attaque avant d'offrir une matière mûre, concentrée, séveuse, tendue par une acidité laser décoiffante.
La finale gagne encore en concentration tout en ne perdant pas en fraîcheur et en dynamisme, sur un délicieux abricot complété par des notes grillées / épicées (et c'est l'abricot qui persiste).
La robe est rubis sombre translucide.
Le nez est exquis, sur la cerise confite, le pot-pourri floral, les épices et le pain grillé.
La bouche est ronde, ample, très fraîche, avec une matière souple au fruité aussi élégant que canaille, et une fine accroche des plus addictives.
La finale monte encore dans la gourmandise canaille, avec une fraîcheur très 2021 et un fruit envoûtant. J'adore !
La robe est pourpre sombre translucide.
Le nez est fin, sur les fruits rouges et noirs légèrement confits, soulignés par des notes grillées / épicées.
La bouche est ronde, très ample, soyeuse, déployant une matière très fine au fruit frais et gourmand, le tout étiré par un fil invisible. On retrouve également les notes grillées / épicées dues à l'élevage en barrique.
Ces dernières sont un peu plus présentes dans une finale concentrée qui sait rester souple, avec un fruit encore plus frais et gourmand qui donne envie d'y revenir de suite.
La robe est grenat sombre translucide.
Le nez est fin, intense, mêlant les fruits noirs confits et les notes résino-balsamiques.
La bouche impressionne par sa fraîcheur qui vous saisit dès l'attaque pour ne plus vous lâcher, créant une tension de dingue, le tout enrobé d'une matière soyeuse et aérienne au fruit très pur. En même temps, il y a une puissance et une énergie qui rappellent les plus grands pinots noirs.
La finale poursuit la tension de la bouche en conservant la finesse de texture, avec une fraîcheur encore accrue. Quel vin !
lundi 9 janvier 2023
Visite de la Maison Carrel
La Maison Carrel, ce n'est pas juste le nom d'une cuvée de l'eclectic winemaker. Elle existe pour de vrai. Elle se situe dans le village de Saint-Laurent de la Cabrerisse qui offre l'avantage de n'être pas trop loin des différents vignerons avec qui il travaille. L'avenue de Narbonne où elle se situe est un beau vestige du passé de la commune : c'est une succession de maisons bourgeoises avec un chai (ou entrepôt) attenant.
Lorsque Jeff Carrel a racheté la propriété en 2017, elle n'avait pas été occupée depuis les années 60. Les locaux étaient en bon état, mais il a fallu tout de même changer les portes et les fenêtres, rénover l'électricité et isoler les charpentes.
Dans le bâtiment de gauche, on trouve des contenants en bois de diverses tailles et origines.
Au premier étage, plus exposé à la chaleur, il y a les barriques et les demi-muids destinés à produire le futur chat gris, mais aussi d'autres cuvées comme Spectaculaire.
Bernard Ballester, le responsable du chai