mercredi 27 décembre 2017

Hepta : un champagne P-U-R


Hepta, c'est le chiffre 7 en grec. Il est très riche en symboles (7 merveilles du monde, 7 jours de la semaine, les 7 jours qu'a mis dieu pour créer le monde, 7 couleurs de l'arc en ciel, 7 nains, 7 chakras...). C'était aussi le nombre de partenaires sur un projet de créer un champagne le plus naturel possible. D'où Hepta. Et puis, tous les partenaires ne sont pas restés. Mais la maison P-U-R, elle, est toujours là. C'est une façon de compléter leur gamme, plutôt pauvre en bulles. 

C'est un vin d’assemblage, issu des trois cépages Chardonnay , Pinot Noir et Pinot Meunier, récoltés uniquement dans le vignoble de Rilly-la-Montagne, classé Premier Cru (c'est à 15 km au sud de Reims). Il est millésimé, valorisant ainsi l’expression d’une seule et même vendange, et la typicité du cru.

La vinification se fait de façon naturelle, sans aucun ajout de levures. Ce processus va se dérouler en cuve : La première fermentation alcoolique naturelle va débuter après que les cépages aient été pressés. Il va fermenter naturellement, à un rythme variant entre 8 et 9 mois.

Après la mise en bouteille, les flacons sont descendus en cave où ils vont reposer plus de six ans, dans l’obscurité, à une température idéale de 9° été comme hiver, dans la plus pure tradition champenoise. Le sol argilo-calcaire de la Montagne de Reims permet de conserver le champagne dans des conditions optimales.  Le temps de repos de la bouteille en cave est garant de l’excellence des cuvées. C’est à ce moment que le vin de champagne connaît sa seconde fermentation alcoolique en bouteille, provoquant la prise de mousse. Un dépôt va se former dans le flacon. Grâce à cet échange entre le dépôt et le vin, le champagne va obtenir finesse et caractère, et développer des arômes naturels subtils et complexes. Le dépôt sera ensuite expulsé (dégorgement) et la liqueur ajoutée (dosage). Chaque flacon sera ensuite habillé aux couleurs HEPTA. C'est seulement à  ce moment là que des sulfites seront ajouté (35 mg/l de SO2 total), histoire de préserver au mieux le résultat d'un long travail. 

La robe est d'un or intense, avec des fines bulles éparses.

Le nez est foisonnant, sur la viennoiserie sortant du four, les fruits secs grillés (noisette, amande), l'ananas rôti, le citron confit et une pointe de craie humide et de mousseron.

La bouche est élancée, tendue par une fine acidité traçante renforcée par des bulles crépitantes. C'est heureusement enrobé par une matière mûre, dense, plutôt vineuse, à l'aromatique expressive  (croissant chaud, noisette). 

La finale est énergique, marquée par un toucher crayeux et toujours ces notes de fruits secs complétées par la tarte Tatin, se prolongeant sur du salin et des épices grillés. Le dosage reste des plus discrets, équilibré par une acidité persistante . 

À une époque où les prix flambent en Champagne, trouver un champagne de cette qualité à 25.90 €, c'est cadeau ! 

En terme d'accord, il devrait bien se marier avec du foie gras mi-cuit parsemé de noisettes grillées (20 mn à 160 °C). 



mardi 26 décembre 2017

Versante Nord : l'Etna dans un verre


Eduardo Torres Acosta, est un jeune vinificateur originaire des Canaries qui a fait ses premières armes à Tenerife où son père, un facteur, possède une parcelle de vignes. En  2012 Eduardo déménage en Sicile où il intégre le domaine d'Arianna Occhipinti. Peu après, il est embauché comme oenologue au domaine Passopisciaro,  l'un des pionniers en Etna. Ce nouveau venu réussit à récupérer deux parcelles sur la face nord du volcan. La vendange est amenée par camion jusqu'au chai d'Arianna Occhipinti à  Vittoria où il est vinifié. Comme ses vins ne sont pas produits sur place, il n'a pas le droit de le mentionner sur l'étiquette et doit se contenter de l'appellation IGT Terre Siciliane.

Ses deux parcelles, Pietramarina  et Verzella, sont situées entre 550 et 700 mètres d'altitude sur des sols de lave. Les vignes, d'une cinquantaine d'années, sont une complantation de 80% Nerello Mascalese  et 20% d'autres cépages locaux dont le Carricante.  La vinification se fait sans intrants, avec environ 10 % de raisins non égrappées. La fermentation se fait en cuve béton durant une quinzaine de jours sans contrôle des températures. Puis le vin est élevé 16 mois dans des fûts de chêne de Slovénie. 

Nous avons reçu il y a peu son Versante Nord 2015

La robe est grenat sombre translucide.

Le nez est fin et profond, sur les fruits noirs et rouges bien mûrs (framboise, myrtille), le poivre cubèbe, la garrigue (thym, ciste), avec une touche fraîche (eucalyptus ?)

La bouche est élancée, avec une matière soyeuse – qui prend progressivement de l'ampleur et de la densité – et une tension des plus traçantes. L'ensemble est tonique et frais, sans que l'acidité n'ait jamais besoin de se montrer.

La finale dévoile une mâche de caractère qui contraste avec la bouche, mais on est sur des tannins mûrs et gourmands. La persistance se fait sur la garrigue et des notes résineuses/balsamiques.

Un très joli vin qui devrait encore se complexifier dans les 5 années qui viennent (si vous arrivez à ne pas le boire avant...)



vendredi 22 décembre 2017

Part Davan : contraste ultime !


Il y a quelques jours, nous avons dégusté avec le "club Vins étonnants" la dernière bouteille qu'il nous restait de Au Capcèu (ça va revenir !...). Tout le monde – ou presque – est tombé sous le charme. Ça m'a donné envie de déguster le 2016 de son vin sec Part Davan. Contrairement au liquoreux, celui-ci ne contient que 35 % de petit manseng. C'est le gros manseng qui a la part belle (50 %), complété par 15 % de petit courbu.  

Dès que je verse le vin dans le verre, je suis surpris par sa robe d'un or intense, évoquant un liquoreux.

Le nez est au diapason, sur des notes d'ananas, de mangue et d'écorce d'orange confite (dans 2-3 ans, la truffe devrait arriver, le complexifiant encore plus).

Si vous ne prévenez pas les personnes à qui vous le servez, la bouche risque de les surprendre, car il n'y a pas un gramme de sucre ressenti: on est sur de l'ultra-traçant, avec une acidité/rayon laser qui se prolonge bien au delà de la finale. C'est heureusement enrobé d'une matière mûre, presque moelleuse, à l'aromatique très confite/exotique. Le contraste maturité affirmée/fraîcheur vivifiante est des plus réjouissants – mais aussi certainement choquer le profane.  

La finale est marquée par une délicieuse astringence, salivante à souhait, avec un ananas omniprésent, et cette acidité qui trace toujours et persiste longuement après la dernière goutte avalée.

Ce vin peut être une réponse intéressante à ceux qui ne veulent pas de vin sucré avec leur foie gras. Il devrait également s'accorder avec des crustacés cuisinés à l'asiatique – avec lait de coco, gingembre, citronnelle... Le prix (15.90 €) est loin d'être déconnant au vu de sa grande qualité. 

Joyeux Noël à tous !





jeudi 21 décembre 2017

Barou 2016 : c'est (très) bon !


Nous avons reçu jeudi dernier les cuvées rouges du domaine Barou. Juste après les avoir photographiées pour le site, je me suis permis de les ouvrir afin de voir la différence avec les 2015. Je n'avais pas trop d'inquiétude pour le Saint-Joseph. Par contre, j'espérais en mon for intérieur que la Cuvée des Vernes soit moins "costaude" que l'année dernière. Si c'était le cas, ça nous aurait fait une chouette Syrah bio pour moins de 10 €...  Un dieu bienveillant doit m'écouter, car mon souhait est plus qu'exaucé :-)



La robe est pourpre violacé translucide. 

Le nez est intense, sur la crème de mûre, la violette, le poivre blanc, et une légère touche fumée. 

La bouche est ronde, ample, veloutée, avec une matière dense, charnue, au fruit croquant et épicé. C'est généreux, tout en restant frais et digeste. Si on se laissait aller, on en boirait des seaux (mais faut pas, hein : raisonnable tu seras). 

La finale a une mâche gourmande et énergique, très mûre/cerise noire, se poursuivant sur des notes poivrées/salines. Y a bon !!!



La robe est un chouïa plus sombre. 

Le nez est plus sur la retenue, par contre, avec une aromatique proche (fruits noirs, poivre, violette).

La bouche est longiligne, avec une tension qui vous happe de suite et ne vous lâche plus, avec une matière plus fine, soyeuse, gagnant progressivement en densité. Là encore, digestibilité et fraîcheur sont les maîtres mots. Mais on pourrait aussi ajouter "classe". 

On sent en finale que le vin est élevé en fûts (alors qu'avant, c'est insoupçonnable). Les tanins du bois ne sont pas encore totalement fondus. Il faut dire que la mise en bouteille est toute récente. À la sortie de l'hiver, tout cela devrait s'être harmonisé. Ceci dit, il n'y a rien de rédhibitoire : on sent une légère dureté en dégustation pure, mais en l'accompagnant (par ex.) d'un magret de canard, ça doit passer tour seul... 

mercredi 20 décembre 2017

Chardo tourangeau...


À force de monter les prix toujours plus vers le haut, les vignerons bourguignons vont finir par décourager leur fidèle clientèle. Faut qu'ils fassent tout de même attention, car des vignerons ligériens se mettent à faire du Chardonnay. Comme  Xavier Weisskopf du Rocher des Violettes. Son Chardonnay 2016 respecte totalement l'identité du cépage tout en se démarquant du style bourguignon. Au prix raisonnable où il est vendu (10.95 €), cela vaut le coup de se laisser tenter : vous en aurez assurément pour votre argent.

La robe est jaune paille, brillante. 

Le nez fait très Chardo, avec ses notes de beurre noisette, les fruits blancs bien mûrs, une pointe de grillé. Le tout rafraîchi par une touche de pierre humide. 

La bouche est ronde, fraîche gourmande, avec l'impression de croquer dans la baie de raisin. L'ensemble est frais, digeste, facile d'approche, tout en ayant du fond. 

On le sent d'ailleurs dans la finale crayeuse/saline, avec un retour du beurre et des fruits blancs. Des épices aussi.  Un vin très agréable, qui sera parfait dans une dégustation d'initiation "vins de cépage". 


vendredi 15 décembre 2017

Vendanges d'Automne ... by Beynat


Non, Beynat ne produit pas de vins liquoreux. Mais Alain et Nathalie ont jugé qu'il serait bien d'en avoir un à vendre au domaine afin de compléter leur gamme de vins. Ils sont allés chercher un domaine en bio à Saussignac (plus proche de Castillon que Sauternes), la seule appellation du secteur à refuser la chaptalisation. 

Cette cuvée Vendanges d'Automne remplacera nombre de mauvais Sauternes et Monbazillac qui doivent une partie de leurs sucres à la betterave ou à la canne à sucre (y compris des domaines réputés). Et vous ne vous ruinerez pas : il ne coût que 11.50 €. Merci, Beynat !

La robe est d'un or brillant, avec pas mal de larmes sur le verre après agitation.

Le nez est riche et frais, sur l'ananas, la manque, l'abricot et l'orange confite, avec en arrière-plan une petite touche safranée.

La bouche est élancée – tendue sans que l'acidité ne saille –  avec une matière mûre, moelleuse, aux notes confites, restant bien équilibrée et fraîche malgré sa richesse. L'aromatique évoque le raisin rôti et la mangue, avec toujours le safran comme guideline

La finale est nette, légèrement mâchue, avec un retour sur les fruits exotique et l'écorce d'orange (et le safran). Pas une once de sucrosité pâteuse comme nombre de liquoreux trafiqués. On sent que c'est vraiment fait avec des raisins botrytisés !


lundi 4 décembre 2017

Coume des loups : à hurler de plaisir !


Ne cherchez pas "Mudigliza" sur une carte du Roussillon : ce n'est pas un lieu-dit, mais un savant assemblage des noms et prénoms de ses créateurs : DImitri GLIpa et MUriel SAmson. Le domaine a été créé de toutes pièces, en achetant ici des vieilles parcelles en altitude dans le secteur de Saint-Paul de Fenouillet. Pas très loin du Mas Karolina de Caroline Bonville, originaire comme Dimitri de Bordeaux. Dix ans d'expérience de cru bordelais vous forgent un homme : ils vous apprennent la rigueur et la précision. On les retrouve dans tous ses vins, y compris son "petit vin", la Coume des Loups dont je vais vous parler aujourd'hui...

On retrouve à peu près à part égale les trois cépages les plus courants du secteur (Grenache, Carignan, Syrah) qui proviennent d'une parcelle de schistes noirs (et marnes schisteuses) à 300 m d'altitude. Le vin ne voit que de la cuve inox pour ne surtout pas perdre sa pureté d'origine. Le résultat est des plus convaincants.

La robe est pourpre sombre, limite opaque.

Le nez est très expressif, sur la crème de fruits noirs (mûre, cerise noire, myrtille), le laurier et le poivre, avec une petite pincée de benjoin.

La bouche est ronde, très ample, emplissant le palais d'une matière soyeuse. Celle-ci gagne rapidement en densité, devenant veloutée, tout en gardant la même sensualité, mettant en avant un fruit bien mûr, mais résolument frais, croquant. L'ensemble est des plus harmonieux, avec une "finition" rarement rencontrée dans un vin à moins de 10 €.

La finale dévoile une mâche gourmande, très "Mon chéri" dans l'esprit, avec cette alliance entre la cerise et le chocolat noir. C'est vraiment p... bon, tout en étant d'une évidente simplicité. Le talent des grands vinificateurs ! 






vendredi 1 décembre 2017

Le Cinsault à l'état pur


Il y a une quinzaine d'années, on redécouvrait que l'on pouvait faire de très bons rouges avec le Cinsault (cf Capitelles de Centeilles ou Pradel des Terrasses d'Élise) alors qu'il était avant tout destiné au rosé. Et si aujourd'hui, grâce à ce Blanc de noir de Zélige-Caravent, on se rendait compte qu'il donne de très beaux vins blancs ? *

La robe est jaune pâle, très légèrement trouble (oui, la photo est trompeuse...)

Le nez est fin, sur la poire Williams tout juste épluchée, et une petite pointe d'agrume.

La bouche est ronde, fraîche, limpide, d'une pureté évidente, quasi désarmante. En s'attardant un peu, on se rend compte que la chair est plus dense qu'on ne se l'imagine, avec ce toucher légèrement granuleux de la poire. Le fruit blanc continue à dominer, avec juste une pincée d'épices.

La finale gagne en intensité, avec une fine astringence qui rend ce moment plus réel, avec toujours la poire comme fil conducteur. Éternellement fraîche.

Un vin très troublant, un peu comme le carré blanc sur fond blanc de Malevitch. Ça raconte beaucoup de choses. Ou très peu. Selon le regard de l'observateur. Est-ce une coïncidence ?  Toujours est-il qu'aucune étiquette de cette cuvée n'est exactement identique. Comme si chaque dégustateur écrivait une nouvelle histoire à propos de la bouteille qu'il est en train de boire... Vertigineux, non ? 

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* Bon, vous me direz, les rosés en pressée directe provençaux sont quasiment "blancs". Et il en existe des 100 % Cinsault. Mais ils ne sont pas commercialisés en "blanc de noir". Ils perdraient leur précieuse appellation...