mercredi 31 juillet 2019

Passage de relais à Malavieille


Non, non, Mireille Bertrand ne prend pas une retraite bien méritée. C'est juste une façon de dire que le même jour; nous changeons de millésime sur  Roc & Lune et Rouge Permien. Comme ce sont deux références incontournables de Vins étonnants,  il était de mon devoir de les déguster afin de voir si l'on restait sur le style antérieur ou s'il y avait quelques changements notables. En fait, non : les deux cuvées sont fidèles à elles-mêmes. Vous pouvez les acheter les yeux fermés !.



 Roc et Lune 2017 (6.50 €)

La robe est grenat sombre translucide.

Le nez est plutôt discret, sur la quetsche, la framboise confite, le poivre et une touche balsamique (eucalyptus/santal).

La bouche est ronde, ample, charnue, avec une matière finement veloutée, exprimant un fruit bien mûr et épicé, et toujours le balsamique en arrière-plan. L'ensemble est  généreux, tout en restant bien équilibré (attention à la température de service, tout de même : 15 °C, c'est bien).

La finale est tonique, avec une mâche mûre soulignée d'une fine amertume et de notes réglissées, avec une persistance sur le poivre long.





Rouge Permien 2017 (7.50 €)

La robe est grenat sombre translucide.

Le nez allie expressivité et élégance, avec des notes de violette, d'encens, de coulis de mûre et une touche de poivre blanc.

La bouche est de belle ampleur, déployant une matière d'abord soyeuse, puis gagnant en densité tout en restant élégante. La fraîcheur aromatique est omniprésente, avec une dominante des notes florales et fumées.

La finale est une grande réussite, car elle réussit à retranscrire  le Triple A dans un vin rouge, ce qui est assez rare : un  beau trait Acidulé évoquant la griotte – complété d'une touche végétale du plus bel effet – une subtile Astringence qui vous dessoiffe sans vous déranger le moins du monde, et enfin des Amers cacaotés pour la touche gourmande Le tout nimbé de violette et d'encens. J'a-dore !


Il est à parier que ces deux vins seront encore meilleurs d'ici un mois ou deux, une fois l'été passé. Mais si vous êtes pressés, ils sont déjà très abordables. 


PS : c'est mon dernier billet avant un long silence. Je serai de retour à partir du 20 août. Bonnes vacances à tous !

mardi 30 juillet 2019

Guilhouret 2017 : exception ou norme à venir ?


C'est en prenant la photo du millésime 2017 de Guilhouret que je me suis aperçu que le degré alcoolique était plus élevé qu'en 2016. Cela a suffi à attiser ma curiosité et à mettre au frigo la bouteille que je venais d'immortaliser ... jusqu'à l'arrivée du 2018. La couleur de la bouteille ne permet pas de se faire la moindre idée de la robe du vin. Mais dès que l'on verse le vin dans un verre,  on se rend compte qu'il n'y pas que le degré alcoolique qui diffère : on est dans un autre monde…

La robe est d'un or intense, brillant, pouvant faire songer à un liquoreux.

Le nez est très expressif, sur la mangue et l'ananas rôtis, la confiture de fraises, la truffe et une pointe de fumée. Là encore, on partirait sur une douceur liquide.

La bouche est longiligne, tendue par un fil invisible : l'acidité est en effet imperceptible, car totalement enrobée d'une matière dense et (bien) mûre, au toucher moelleux, mais exempte de sucres. Un très léger filet de gaz carbonique amène un surplus de vivacité et fraîcheur.  Les fruits exotiques sont toujours là, mais passent en arrière-plan, recouverts d'une fine trame grillée/fumée/truffée.

La finale poursuit dans le même registre aromatique – avec une truffe un peu plus marquée ? – tout en gagnant en acidité, mais aussi en (noble) amertume. Cette dernière étant renforcée par des notes grillées qui persistent assez longuement.

Ceux qui recherchent l'acidité vivifiante  typique du Jurançon risquent de ne pas y trouver leur compte – même si le vin n'a rien de lourd. Idem pour ceux qui apprécient les fruits exotiques frais : là, ils sont confits/rôtis, et déjà accompagnés de notes truffées qui mettent en général plus de temps à arriver. Par contre, ce Guilhouret  est idéal pour les impatients qui auront dès maintenant un vin arrivé à maturité – il faut voir le bon côté des choses, non ? 

La question qui se pose, c'est de savoir si 2017 est l'exception ou la norme à venir ? 2018 a été plutôt plus chaud que 2017. L'été 2019 a démarré très fort en terme de températures. Au fil des dégustations des récents millésimes, on prend conscience que la viticulture vit une mutation dont on n'a pas encore mesuré toutes les conséquences. 

On peut aussi se rassurer en goûtant par exemple les jurancons sec de Camin Larredya, qui présentent plus de fraîcheur et d'acidité. Certes, la météo est subie, mais les décisions successives du  vigneron restent déterminantes dans le résultat final. 



lundi 29 juillet 2019

Pino Rojo : un pinot hors du commun


Cette étiquette malicieuse peut s'interpréter deux deux façons : soit on y voit simplement un pin rouge telle que veut nous le faire croire l'illustration, soit on se dit qu'il y a anguille sous roche, et que la bouteille pourrait contenir un pinot rouge (enfin noir). Effectivement, nous sommes face à un pinot noir espagnol. Probablement le plus méridional de toute l'Europe  car on doit pouvoir apercevoir la côte africaine en taillant ses vignes. Mais aussi le plus élevé en altitude puisqu'on atteint les 1300 m. On obtient un mélange détonnant de maturité et de fraîcheur, avec un équilibre sur le fil du rasoir du moment où l'on fait attention à la température de service (14°C). Car le "bébé" pèse tout de même 15 % d'alcool qui se font sentir si le vin est servir plus chaud. 

La robe est  grenat sombre translucide.

Le nez est expressif sur la cerise confite, le noyau, et une grande palette d'épices qui vous emmène dans un souk oriental.

La bouche est ronde, très ample, vous enrobant le palais  d'une matière veloutée, profonde, et fraîche. La cerise est tellement omniprésente que vous n'avez plus l'impression de la boire, mais de devenir le fruit vous-même.

Cela s'intensifie encore dans la finale finement mâchue, avec une cerise "marasquin" explosive soutenue par une grande fraîcheur aromatique (merci l'altitude !), et  une longue persistance sur le noyau et les épices.

Ce n'est pas souvent que l'on peur servir un pinot noir avec une pièce de viande bien épaisse grillée  sur les braises. Là, vous pouvez y aller : l'accord devrait être des plus réussis.


vendredi 26 juillet 2019

Retour au Primitif


S'il y a une chose que l'on apprend avec le temps, c'est qu'il faut boire la palette de vins la plus large possible, histoire que chaque bouteille ouverte soit une découverte et un plaisir renouvelé. J'avoue que j'ai toujours un peu de mal à comprendre les personnes qui achètent 12, 24 ou 36 bouteilles identiques. En général, pour ma part, j'en commande rarement plus de 3  de la même cuvée afin de ne pas me lasser. 

Si je raconte ça  aujourd'hui, c'est que cette cuvée Primitif des frères Giachino ne ressemble probablement à aucun des vins que vous avez l'habitude de boire. Déjà son degré d'alcool (10.5 %) détonne à l'heure où les compteurs s'affolent. Et puis il a cette naturalitétrès à la mode dans les palaces parisiens, un côté franc du collier qui peut désarçonner. En même temps, rien d'agressif : il ne vous veut aucun mal, bien au contraire. Rarement un vin vous aura autant désaltéré ! Je ne suis pas trop bon dans mon timing, car c'est certainement LE vin de canicule par excellence. Mais bon, l'été n'est pas fini...


La robe brillante est or pâle tirant vers l'argenté.

Le nez aérien évoque la pomme fraîche, le coing et la craie humide, ainsi qu'une touche d'embruns marins.

La bouche est ronde, friande, avec une matière pulpeuse qui présente rapidement une astringence plaisante (celle que l'on ressent en buvant une citronnade). Un léger perlant apporte un supplément de fraîcheur.

Celle-ci se renforce encore en finale, appuyée par une belle mâche, avec un retour sur la pomme, le coing et le citron,  et une une persistance sur des notes salines et crayeuses.

Un vin à boire pour lui même. Mais il sera parfait avec un plateau de fruits de mer, un poisson grillé à la plancha (ou pas),  des chèvres légèrement affinés, crayeux comme le vin...
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* ce qui ne veut pas dire "nature" qui est un autre concept..



jeudi 25 juillet 2019

Orphée : papillon ou champ ?



Nous avons reçu il y a une quinzaine de jours les nouveaux millésimes des vins de Stéphane Lucas : Papillon d'Orphée 2018 et Champ d'Orphée 2016. Il était tentant d'ouvrir les deux, histoire de voir en quoi ils diffèrent (les deux sont 100 % Braucol). Alors oui, ce n'est pas le même millésime, mais 2018 me semble plutôt avantager Papillon : le 2016 de cette cuvée était plus "maigrelet", on va dire.C'est justement cette "maigritude" du millésime qui fait que le Champ d'Orphée acquiert une finesse qu'il n'a probablement jamais eu jusqu'à maintenant. On va dire que l'on est dans le même esprit que les Bordeaux 2016 (sans le bois) : les tanins sont très fins, mais il y a derrière une sacrée matière qui devrait défier le temps.Le problème ici, c'est que c'est déjà tellement bon maintenant qu'il va être difficile d'en mettre de côté !



Papillon d'Orphée (7.90 €)

La robe est robe est pourpre sombre translucide.

Le nez d'abord réduit s'ouvre sur la myrtille, la prunelle, le poivre, et des notes ferreuses typiques du cépage.

La bouche est ronde, ample, déployant une matière veloutée à la chair gourmande, au fruit frais intense. Le tout avec un très bel équilibre. Vraiment d'la bombe !

La finale offre une mâche encore plus gourmande et fruitée. C'en est presque indécent. Les tanins sont bien là, mais ne présentent aucune dureté. Rien que du plaisir, qui persiste assez longuement sur les fruits noirs, le poivre et des notes sanguines.



La robe est grenat sombre translucide avec quelques reflets violacés.

Le nez est superbe, sur la crème de fruits noirs agrémentée d'épices et de notes florales.

La bouche est de grande ampleur, avec une matière fine, étonnamment sensuelle et profonde,  qui vous nappe le palais, et une fraîcheur aromatique en arrière-plan qui apporte de la tension. L'ensemble est juste waouh, pour faire court.

La finale toute en finesse – un hymne aux fruits noirs et aux épices –  réussit à ne pas rompre le charme. La fraîcheur aromatique  monte encore d'un cran pour vous amener au paradis des buveurs de vins. J'suis tombé amoureux, je crois  💓


Conclusion : alors oui, bien sûr, le Champ d'Orphée remporte la battle haut la main. Mais le Papîllon n'a jamais été aussi bon que sur ce millésime 2018. Son rapport qualité/prix me semble juste hallucinant à l'aune du plaisir qu'il engendre. Quant au Champ d'Orphée, il est certes plus cher, mais le prix me semble excellemment placé : on trouve peu de vins qui ont cette classe pour 14.90 €. 

mercredi 24 juillet 2019

En Cheignot 2017 : le charmeur change de stratégie


Il y a six  mois, j'avais publié un billet sur le  Hautes Côtes de  Beaune "En Cheignot" 2016 de Bonnardot qui a fait un tabac. Pendant trois mois, nous n'en avions jamais assez. Tous les clients voulaient le goûter – j'espère qu'il vous a plu, au moins ? Lors de notre dernière commande, il a été remplacé par le 2017. J'ai attendu qu'il se repose un peu pour en causer. Dix jours après la fêt'nat', le jour de boire est arrivé. À quoi ressemble-t-il ? 

La robe – ou peut-être moi ? – hésite entre paille et or.

Le nez expressif fait très chardo : beurre noisette, notes grillées (sésame ?), fruits blancs rôtis...

La bouche est élancée, avec une tension toute en suggestion – on sent qu'elle est bien là, mais on ne perçoit pas sa "colonne vertébrale" – et une matière aérienne, diffuse, caressant le palais sans donner l'impression de l'humidifier. Un vin plus minéral/gazeux que liquide, marqué par le salin, le pierreux et le grillé. On est dans l'épure, plus intello que glouglou, pour tout dire, et c'est très bien ainsi :  le glouglou, ça va cinq minutes, mais on finit par se lasser.

La finale prolonge toutes ces sensations sans le moindre à-coup, si ce n'est une intensification du minéral qui part sur le crayeux – sans que ce soit astringent/asséchant –  mais aussi du salin renforcé par une fine touche citronnée. Et en arrière-plan, un retour du beurre noisette et de notes grillées. 

Au final, un vin moins immédiat et charmeur que le 2016, mais c'est ce qui le rend plus séduisant à mes yeux : il ne cherche pas à plaire, assuré que sa beauté naturelle fera le job – et il a raison le bougre ! Cela le rendra facile à accorder car il n'écrasera pas les plats qu'il aura la charge d'accompagner : risotto, volailles, poissons à chair ferme, pâtes fleuries... 




mardi 23 juillet 2019

Garance : laisser le temps au temps


Ces deux bouteilles sont des rescapées : elles ont failli être mises à l'évier sans être commentées sur ce blog. Je vous explique : en début de semaine dernière, je cherchais une ou deux bouteilles à  mettre en avant. Je vois la palette "Garance" et je me dis que ce serait une bonne idée. C'est en fait Eric R  qui a  dégusté les vins du domaine  l'hiver dernier et décidé de les référencer. Personnellement, cela fait plusieurs années que je ne les ai pas croisés. Je goûte donc les deux rouges. Et alors … pas du tout convaincu. C'est pas que ce soit vraiment mauvais, mais c'est fermé de chez fermé, inexpressif. Je ne vois donc pas trop ce que je pourrais raconter sur le blog. Et je suis donc passé à l'Enclos des Roses, nettement plus bavard.

Le lendemain, je regoûte : pas mieux.  Le surlendemain, je ne réessaie même pas, de peur d'être déçu…

Et puis vendredi, c'est jour de grand ménage : j'ai l'intention de virer toutes les bouteilles que j'ai ouvertes depuis le début du mois. Par acquit de conscience, je regoûte les deux bouteilles de Garance. Et là, miracle :  les deux nez sont très jolis. Et les bouches confirment la bonne impression. Ouf.  Il s'en est vraiment fallu de peu. 

Comment expliquer cela  ? J'imagine une forme de réduction, histoire de protéger les vins de l'oxygène, faute d'une protection importante en SO2. Sauf que ça ne sentait pas le réduit. Juste le pas grand chose. Enfin, maintenant vous saurez : si vous ouvrez une de ces deux bouteilles : un bon carafage sera nécessaire si vous voulez les déguster dans la journée. Ou alors, ouvrir 4 jours à l'avance en épaulant ;-)






(60 % Grenache, 30 % Syrah, 10 % Cinsault)

La robe est grenat sombre translucide.

Le nez est plutôt discret, sur la prune mûre, la garrigue (résineuse) et la réglisse.

La bouche est ronde, ample, déployant une belle matière entre soie et velours, avec une impression de digestibilité tout en étant bien typé sud (fruits bien mûrs, voire compotés, épices).

La finale a une mâche gourmande et savoureuse sur la cerise confite et le cacao, avec finale très réglissée.





Rouge Garance 2017 (12.50 €)

(70 % Syrah, 30 % Grenache)

La robe est encore plus sombre, mais toujours translucide.

Le nez est plutôt classieux mêlant les notes florales (violette) à l'encens et au graphite, et même une touche d'écorce d'agrume.

La bouche est à fois ample et élancée, avec une matière plus dense – mais qui réussit à garder un toucher soyeux – et une belle tension qui apporte de l'allonge sans la moindre raideur. L'équilibre général est vraiment harmonieux, et là encore on peut évoquer le mot classieux.

La finale est intense, concentrée, dotée d'une très grande fraîcheur aromatique, avec un mélange de fruits rouges confits, d'agrumes, de poivre de cubèbe, avec une longue persistance sur l'acidulé/épicé (vraiment l'impression d'avoir croqué dans une baie de cubèbe).

Je n'avais pas fait attention aux prix avant de les déguster. Je trouve que dans les deux cas, on en a largement pour son argent, particulièrement Rouge Garance. Reste à trouver le bon process pour les rendre "optimaux" plus rapidement que moi :-)

lundi 22 juillet 2019

Ulma : parfaite pour l'été... et le reste de l'année !


Cela faisait un bon bout de temps que je ne vous avais pas parlé d'un vin de Tirecul la Gravière, un domaine qui est cher à mon cœur. Ce qui ne veut pas dire que les vins sont forcément onéreux. Par exemple,  Ulma 2018 est à 10.50 €, un prix d'ami au vu de sa qualité. Je l'avais goûté peu après sa mise en bouteille, et je l'avais trouvé un peu "serré", comme on dit. Six mois plus tard, il est vraiment gourmand, facile d'accès, tout en ne manquant pas de fond, loin de là. Très recommandable, quoi !

La robe est jaune pâle aux reflets argentés.

Le nez est fin, aérien, sur la poire, la fleur d'acacia, un petit morceau de zeste de citron et des notes muscatées qui enrobent tout ça. 

La bouche est ronde, ample et fraîche, avec une matière finement charnue, croquante, donnant l'impression de mordre dans la baie de raisin, tout en ayant en arrière-plan une salinité bien marquée. Au point où l'on pressent qu'elle va finir par prendre le dessus. 

Eh bien, ça ne rate pas : elle le fait en finale ! On se prend une jolie vague minéralo-saline agrémentée d'un peu de poire et d'agrume, avec une persistance sur la craie et le citron. Tout en restant très zen, pas tout agressif. "Un gros calin" , dirait Philippe Conticini.

Ulma pourra se boire aussi bien pour elle-même à l'apéritif qu'accompagner des fruits de mers, des sushis, ou du poisson grillé, mais aussi un pique-nique estival, des fromages de chèvre... 


vendredi 19 juillet 2019

Un Équilibre ... sur le fil du rasoir


Comme je l'ai expliqué hier à un client qui est passé nous voir pour récupérer sa commande, l'Équilibre de Pero Longo est l'un des mes chouchou : un vin corse tout en finesse, élégant, biodynamique, peu sulfité ... et pas cher  (12.90 €) au vu des tarifs souvent délirants dans la région. Ce qui explique pourquoi je le goûte lors de l'arrivée du nouveau millésime, histoire de voir s'il a gardé le même profil (ceux qui suivent la saga se rappelleront que le 2015 se démarquait pas une matière plus imposante que d'ordinaire). 

En versant le vin dans les deux verres, on se rend compte qu'on est pas sur un profil 2015 (ouf !). Il devrait y avoir de la finesse. Le nez est titillé par une légère volatile, mais comme je le dis à Stéphane, elle reste pour moi du bon côté de la force, comme lorsqu'un vin de Barral est réussi. Sans elle, il y aurait moins de peps et de fraîcheur, au nez comme en bouche. À l'ouverture, je trouve que le vin manquait de complexité aromatique. Une heure plus tard, c'est déjà nettement mieux (cf ci-dessous) et le lendemain matin, la palette s'est encore élargie sur des notes de fleurs séchées (rose, hibiscus). En bouche, je retrouve la finesse que j'apprécie tant dans ce vin et où l'on voit qu'une acidité volatile bien gérée est très positive dans un vin. Je suis plus réservé sur la finale que je trouve un peu trop ferme. Mais pareil : le lendemain, c'est beaucoup harmonieux, avec des tanins plus fondus.  Donc, mon conseil qui vaut pour les 3/4 des  vins : ouvrez-le quelques heures à l'avance pour le laisser respirer !

Impressions jeudi 18/07 à 17h

La robe est grenat bien translucide, brillante.

Le nez est fin et frais, sur la griotte, le noyau, la garrigue, une petite touche d'encens, et une donc, une pointe de volatile (agréable, j'insiste !). 

La bouche est tonique, élancée, avec cette acidité volatile traçante servant de colonne vertébrale et une matière fine, aérienne, qui gagne progressivement en grain et densité.

La finale est encore un peu trop "serrée" à mon goût, donnant une mâche  crayeuse, sur des notes de "soupe de cerise" et de prune épicée.

Impressions vendredi 19/07 à 10h30 (eh oui, on démarre tôt dans ce métier)

La robe est idem (peut-être un peu d'orangé dans les reflets ?)

Le nez est aérien, évanescent, sur la liqueur de framboise, la rose et l'hibiscus, avec une touche de tabac blond, d'orange sanguine,  et une volatile à peine perceptible. 

La bouche est plus ronde, plus ample, avec une matière délicate enveloppante. La volatile est là encore nettement plus discrète, même si on sent qu'elle contribue à la tonicité et à la fraîcheur du vin. 

La finale est encore mâchue/crayeuse, mais je la trouve moins abrupte, plus cohérente avec le reste de la bouche. Cela dit, avec quelques tranches de VRAIE charcuterie corse, ça doit passer tout seul ;-)




mercredi 17 juillet 2019

L'Enclos des Roses : changement radical de style ?


En avril 2016, je vous avais parlé de l'Enclos des Roses 2009 dont j'avais écris qu'il  pouvait certainement prétendre à faire partie du TOP 5 des grands rouges du Sud-Ouest.

En mai 2016, je récidivais avec L'Enclos des Roses 2010. que je trouvais encore supérieur au 2009. Là c'était carrément le TOP 3 ;-)

Et puis en décembre 2016, on faisait un saut de 5 ans avec L'enclos des Roses 2015. Entre temps, l'assemblage a changé. Au lieu d'un 1/2 braucol - 1/2 duras, on est passé à 1/3 braucol - 1/3 duras - 1/3 prunelard. On sent un vin à gros potentiel, mais clairement trop jeune. Attendre 5 ans, par exemple ? 

Deux ans et demi plus tard, je me lance dans la dégustation de  L'Enclos des Roses 2016, m'attendant à retrouver un vin proche du 2015. Eh bien pas du tout : le boisé est totalement absent à l'ouverture, que ce soit au nez en bouche, et même en finale. Du fruit, rien que du fruit, et une grande fraîcheur. Pour tout, dire j'ai même cru avoir ouvert une bouteille de Petit Enclos. Mais non, c'est bien le bon. 

Surpris par ce changement de style que je trouve radical – mais qui me plaît beaucoup – j'ai pris le temps d'appeler Aurélie Balaran pour avoir quelques explications. Eh bien en fait, elle n'a RIEN changé. Il y a toujours un élevage en barriques d'un an (des  Berthomieu Ermitage ai-je appris). C'est probablement un effet millésime qui fait que la matière a digéré miraculeusement le bois. Mais peut-être bien que le 2017 ressemblera plus au 2015 qu'au 2016. Suspense…

La robe est grenat sombre bien translucide, sans le moindre pourpre/violacé.

Le nez est fin, frais, sur la cerise rouge et son noyau, la framboise, le poivre, et un étonnant grillé de réduction à la Coche.

La bouche est ronde, ample, aérienne, déployant une matière finement veloutée au fruit croquant. L'ensemble est tendu par une acidité qui paraît au départ invisible mais qui commence à surgir à partir du milieu de bouche et monte crescendo.

La finale est tonique, avec une accroche salivante délicieusement rustique,  et cette acidité pimpante, pas du tout agressive. L'aromatique bascule plus sur les fruits noirs, la prune, des notes terriennes, mais c'est la griotte acidulée (le Duras ?) qui a le dernier mot.

PS : le lendemain, j'ai regoûté le vin, plus aéré et à température de bureau (23 °C) : pour le coup, le bois est plus présent à tous les niveaux, sans tout écraser toutefois. Donc si vos goûts sont proches des miens, buvez-le dès l'ouverture  à 16 ° C. Si le vous sied, carafez-le et servez-le à 18 ° C. 


mardi 16 juillet 2019

Crystalline : une autre vision du Chardonnay


Il est toujours intéressant de découvrir comment d'autres pays ont réinterprété des cépages que nous connaissons bien. Beaucoup ont une vision caricaturale de ce qui se fait dans le "nouveau monde", comme si cette entité formait un tout indivisible. En fait, il n'est pas si nouveau que cela, puisque la vigne a toujours accompagné l'Homme dans ses conquêtes. En Amérique du Sud, on produit donc du vin depuis le XVIème siècle (les vignes de 300- 400 ans ne sont pas rares). En Afrique du Sud, sujet du jour le premier cépage planté fut le chenin, au XVIIème siècle. Le chardonnay s'est surtout développé ces dernières années ... car ce cépage est l'un des plus populaires du monde. Ce serait bête de passer à côté...

False Bay, c'est le ballon d'essai de Paul Boutinot avant de se lancer dans l'aventure Waterkloof. En 1994, faire du vin sans ajouter de levures ni acidifier était rare. Aujourd'hui, c'est beaucoup plus tendance. Paul Boutinot a créé cette cuvée Crystalline  pour ceux qui disent "je déteste le chardonnay". Pas de boisage, pas de surmaturité, pas de gras superfétatoire. Du raisin mûr, et rien d'autre.  

La robe est jaune paille intense. 

Le nez est très expressif, sur le beurre noisette, la poire mûre, le pralin. 

La bouche allie ampleur et tension, avec une matière mûre au toucher moelleux qui vous tapisse le palais et une fine acidité qui étire le vin. L'ensemble est frais, gourmand et remarquablement  équilibré (mais pas cristallin, faut être honnête). 

La finale possède une mâche savoureuse sur les fruits blancs bien mûrs et le beurre frais, avec une persistance sur le lemon curd et les épices. 

À la lecture de ce commentaire, vous aurez compris que si l'on devait comparer cette cuvée à des vins de l'hémisphère nord, on est plus proche du Mâconnais ou de Limoux que de Chablis. C'est plus un vin destiné à la volaille, aux Saint-Jacques ou au ris de veau qu'aux huîtres ou aux sushis. Le rapport qualité/prix (9.90 €) me parait intéressant, sans être exceptionnel. 


lundi 15 juillet 2019

Vin rouge géorgien : ça vieillit bien !


Des fouilles archéologiques on prouvé que l'on vinifie le raisin en Géorgie depuis 8000 ans. Il n'empêche que les consommateurs européens que nous sommes avons peu de recul sur le vieillissement de ces vins. Il ne sont en effet apparus sur le marché français il y a seulement 5-6 ans. Et il est probable que 99 % des bouteilles achetées à l'époque ont été rapidement bues.   

Aussi, la décision de Pheasant's tears de remettre sur le marché des bouteilles âgées d'une dizaine d'années est excellente. D'autant qu'il ne les fait pas payer la longue garde au consommateur. Cela permet de se rendre compte qu'un vin rouge géorgien s'affine et se complexifie avec le temps – bon, on s'en doutait un peu, mais c'est bien de le vérifier. Je ne suis pas spécialement fan du Saperavi dans sa jeunesse, mais là, je trouve ce 2008 des plus réussis ! On se croirait en Toscane par l'aromatique et la fraîcheur. Et ce n'est pas un petit compliment de ma part. 

La robe est grenat sombre, opaque et à peine marquée par l'évolution.

Le nez est intense, tout en étant fin et aérien, sur les fruits noirs confits, le bois précieux (cèdre, santal), le cigare, avec  une touche de sous-bois et une pointe résino-balsamique. On peut passer plusieurs minutes à sentir le vin sans avant d'y tremper les lèvres, avec cette petite peur inavouée d'être déçu.

La bouche est à la fois ample et élancée, avec une matière démarrant plutôt soyeuse avant de gagner en densité et en tanins, et une tension plus due à la grande fraîcheur aromatique qu'à l'acidité, non perceptible.

La finale est puissante, savoureuse, avec une mâche gourmande, avec un retour du tabac et du sous-bois, vivifiées par le cassis et le menthol, et une persistance sur des notes balsamiques et de cendrées.

Ce vin  devrait  particulièrement mis en valeur par une belle pièce de boeuf  cuite sur les braises. Un accord superbe en perspective !


vendredi 12 juillet 2019

Alpilles blanc : le juste équilibre


Je vous ai parlé du rosé du Mas de Gourgonnier il y a peu. J'étais curieux de regoûter l'Alpilles blanc que je n'avais pas goûté depuis deux ans – l'année dernière, on l'avait à peine vu passé : le peu que nous avions reçu était parti à vitesse grand V. C'est un assemblage de sauvignon, grenache blanc et rolle (connu aussi sous le nom de vermentino·u). Le sauvignon, franchement, il faut le savoir, car il n'en a aucun des marqueurs habituels. Grenache, oui, il y a la rondeur, mais pas la richesse. Quant au rolle, on ne retrouve pas l'acidité et les agrumes des cuvées corses, mais il est probable qu'il participe au bel équilibre de ce vin.

La robe est or pâle, brillante. 

Le nez est expressif, sur les fruits blancs bien mûrs, l'amande fraîche, avec une touche de miel et de chèvrefeuille. 

La bouche est ronde, de belle ampleur, avec une chair veloutée réussissant à  exprimer la générosité du soleil de Provence – on entend les cigales – tout en gardant un équilibre plus septentrional. Peut-être est-ce dû à l'inhabituelle densité de la matière, au grain presque tannique, qui apporte une vraie présence – une assise minérale, oserai-je dire. 

La finale crayeuse l'amplifie encore – tout en restant harmonieuse –  sur des notes de pomme beurrée, d'amande et d'anis, avec une persistance saline et épicée.

Un vin pas compliqué qui pourra s'accommoder de tout de l'apéro jusqu'au plateau de fromages, en passant par les noix de Saint-Jacques et les viandes blanches, avec la certitude qu'il n'écrasera pas les plats.

mercredi 10 juillet 2019

Cabernet Sauvignon 2013 : et la chenille devint papillon !


Lorsque ce Cabernet Sauvignon 2013 était sorti il y a 3-4 ans, je m'étais empressé de le goûter, tant j'avais été emballé par ses versions antérieures (2010, 2011 et 2012). Déception : le boisé écrase le vin, autant dans l'aromatique que dans la texture. Un vrai "vin de castor", diraient certains. D'où mon silence total à son sujet  : en achètent qui veulent, mais sans mon soutien... 

Depuis quelques mois, lorsque je passais devant les quelques cartons qui nous restent de cette cuvée, je me disais que ce serait bien de la regoûter :  avec un peu de chance, le boisé se sera fondu, et le Cabernet Sauvignon commencera à délivrer ses belles notes tertiaires. Je me suis finalement décidé hier et bingo, Bacchus a exaucé mes souhaits : le vin a évolué exactement comme il le fallait ! Je n'ose pas dire qu'il est parfait, car il y a un côté  lisse et ch.. dans la perfection. Mais il est tout comme j'aime, et comme devraient aimer les fans de ce grand cépage. . 

La robe est grenat sombre translucide, avec quelques reflets d'évolution.

Le nez est fin et profond, sur le cassis confit, le cigare, le cèdre, avec une pointe de moka et de pain grillé.

La bouche est élancée, alliant une tension très Cab' à une matière fine, élégante, entre soie et velours, qui vous tapisse le palais. L'aromatique est early matured* avec ce mélange de fruits noirs  et de notes tertiaires plus décadentes. Et plus encore ce menthol et ce cèdre qui apporte tonicité et fraîcheur.

La finale prolonge la tension sans interruption, renforcée par des tanins bien mûrs, un retour du cigare, une confirmation du cassis et du menthol, et pour conclure, l'âtre de cheminée légèrement poivré qui persiste longuement.

Pour l'instant, il nous en reste une petite vingtaine, mais a priori, Jean-Louis Denois en a encore en stock. À noter qu'il y a une remise quantitative lorsque vous en achetez six : il passe de 13.50 € à 12.90 €.  

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* = début de maturité (expression de Robert Parker)




mardi 9 juillet 2019

Borie de Maurel : évasion garantie


Je ne savais pas trop par quel angle aborder ces deux nouveautés de Borie de Maurel – nouveau pour nous, je précise. Et puis finalement, en repensant à ce que j'avais ressenti en les dégustant hier, m'est venu ce mot : évasion. Non pas que l'on tombe dans le bizarre ou l'étonnant, mais ces deux vous offre de l'inattendu. Le Gypse vous fait découvrir une nouvelle facette du Chardonnay, ce cépage multiplié à l'envi sur les 5 continents et qui finit par vous sortir par les yeux tellement vous en avez bu. Le Rosé, lui, réussit à vous faire lâcher un "Vindiou" dans les secondes qui suivent la première gorgée, ce qui est rare dans sa catégorie. Il faut dire qu'il est composé de 61 cépages (dont 60 plantés il y a plus de 130 ans). Tout sauf banal. 

Hier, donc, l'évasion fut totale,  tout en ne bougeant pas de mon Limousin d'adoption. Un tire-bouchon, deux verres. Et hopla, comme on dit en Alsace*.


Gypse 2017 (15.00 €)

100 % Chardonnay - Sols de gypse - 300 m Alt. 

La robe est jaune paille intense, brillante.

Le nez est expressif et gourmand, sur le beurre noisette, le pain grillé, la crème au citron, et une touche de craie humide qui apporte de la fraîcheur.

La bouche est élancée, alliant  une tension toute en souplesse – même si sur le papier ce vin a une acidité de Chablis, elle n'est pas du tout perceptible – à une matière mûre, riche, enveloppante. L'ensemble réussit à être parfaitement équilibré, sans la moindre lourdeur, probablement grâce une teneur importante en sels minéraux.

La finale tonique allie l'amertume du citron confit à l'astringence du pomelo, avec comme un léger voile beurré/toasté/noiseté déposé dessus, rendant cet instant plus hédoniste. Ce sont finalement les (beaux !) amers qui finissent par prendre le dessus, soutenus par une acidité qui finit par poindre.



Le Rosé 2018 (9.50 €)

50 % Syrah, 50 % de 60 vieux cépages plantés il y  130 ans
Sols marno-calcaires

La robe est entre le rose saumon et l'orange.

Le nez, foisonnant, mêle les notes amyliques aux fruits rouges confits, aux agrumes et aux épices.

La bouche est longiligne, étirée par une acidité traçante arachnéenne, et déploie une matière ronde, soyeuse, opulente, vineuse, très épicée... faisant de ce rosé l'un des plus beaux qu'il m'ait été donné de boire.

La finale ne fait que prolonger la bouche sans le moindre à-coup, tout en intensifiant les épices, mais aussi les nobles amers (écorce d'orange, subtile touche de quinquina, gingembre), avec une persistance sur le piment d'Espelette et le zeste d'agrume.

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en buvant avec modération, ou en recrachant comme je l'ai fait hier. 





lundi 8 juillet 2019

Riesling Stoeffler : le tradition a du bon !


Qui dit Stoeffler dit Choucroute. Et qui dit Choucroute dit Riesling. Donc qui dit Stoeffler dit Riesling. Du Tradition, tant qu'à faire. Car comme nous l'enseigne la sagesse populaire, le Tradition a du bon. Ce qui frappe dès qu'on met le nez au-dessus du verre, c'est la parenté avec les cuvées "nature" du même producteur. Cette signature olfactive – et tout le reste – n'est donc pas due à l'absence de sulfites, mais plutôt à la patte du vigneron (ou à ses levures indigènes, allez savoir). 

La robe est jaune d'or, brillante. 

Le nez est expressif, sur l'écorce d'agrume – pomelo, orange –  l'ananas, et une touche pétrolée/tourbée qui vous hurle que vous avez un riesling dans le verre –  c'est pratique lorsqu'on déguste à l'aveugle.

La bouche est tendue et traçante, avec une matière dense et mûre qui se propulse énergiquement à travers le palais sans avoir recours à l'acidité, quasi imperceptible. Ce sont plutôt les amers (quinquina, pomelo, bigarade...) qui tiennent lieu de colonne vertébrale – mais aussi de moteur.

Ceux-ci s'intensifient encore dans une finale explosive, associant les écorces d'agrumes aux fruits exotiques et à l'indian tonic, sur une assise astringente (ziste de pomelo) qui  tirera une larme d'extase ou de souffrance. Pas trop sûr que ce soit un riesling à choucroute, mais plutôt un riesling d'initiés bu pour lui-même par des amateurs de vins vivants. 


vendredi 5 juillet 2019

Verdier-Logel : les 2018 !


Avant de vous parler des 2018 de la Cave Verdier-Logel, j'attendais que toutes les cuvées soient disponibles ET remises de leur embouteillage – l'année dernière, je m'étais un peu trop empressé… Ce que je ne savais pas, c'est que la Cuvée des Gourmets ne serait déjà plus disponible au domaine (il nous en reste une quinzaine de bouteilles si ça vous intéresse). Je l'ai donc exclue de cette présentation, car je ne vois pas l'intérêt de parler d'un vin que vous ne pourrez pas vous procurer – et chaque bouteille qui reste est précieuse !

Je vous ai déjà parlé des 2018 de Pinon et de la Pépière qui étaient plus mûrs que d'ordinaire – si l'on considère que l'ordinaire, c'était avant. Les Côtes du Forez ne sont pas situées dans un monde parallèle : les raisins étaient très sucrés, ce qui donne de vins de 13 à 15.5 % d'alcool. La cuvée la plus light est Feux de Forez car ses raisins ont été cueillis avant les autres pour que leur fraîcheur contrebalance la rondeur apportée par l'élevage en bois. Bien vu !

Cela dit, si l'on ne regardait pas la contre-étiquette, jamais l'on n'imaginerait de tels degrés tant il y a de beaux équilibres. Donc allez-y sans crainte : vous dégusterez des gamays d'un niveau rarement atteint (en qualité, pas en degré) dont vous vous souviendrez longtemps. 

Est-ce que ça vaut le coup de les garder ? Pas si sûr. J'avais adoré les Beaujolais 2009 lorsqu'ils étaient sortis en 2010, avec un profil proche de ces 2018. Neuf ans plus tard, le fruit de jeunesse étant parti, je les trouve un peu pénibles... 


La volcanique 2018 (9.50 €)

Sols volcaniques - Vignes issus de sélection clonale - Elevage cuve

La robe est pourpre sombre translucide, avec des larmes  bien visibles sur les parois du verre.

Le nez est fin, sur la crème de fruits noirs, la pivoine et la pierre chaude. Puis des notes sanguines/ferreuses.

La bouche est ronde, ample, veloutée, avec une chair dense  et fruitée qui vous tapisse généreusement le palais. Cette Volcanique est d'une puissance et d'une richesse qu'a plutôt Poycelan dans les millésimes précédents (14.5 % d'alcool) tout en restant bien équilibrée.

La finale dévoile une mâche puissante, pleine de fruit , avec des tanins croquants, bien mûrs, sur la cerise noire cacaotée et un retour des notes sanguines/ferreuses.



Rézinet 2018 (8.95 €)

Arènes granitiques - Vignes issus de sélection clonale - Elevage cuve

La robe est pourpre sombre translucide, avec des larmes  bien visibles sur les parois du verre.

Le nez est frais, sur les fruits noirs sauvages (prunelle, sureau), le cassis, le poivre, avec une petite touche lactée.

La bouche est élancée, étirée par un fil invisible et déployant une matière fine, entre soie et velours, au fruit très gourmand et à la grande fraîcheur aromatique. Impossible d'imaginer que le vin pèse 15 % d'alcool.

La finale prolonge la bouche sans la moindre interruption si ce  n'est une plus grande concentration et vraie sensation de minéralité : en plus de savourer des fruits bien mûrs, on lèche du caillou (et de la pierre de sel).



Feux de Forez 2018 (10.50 €)

Sols granitiques - Vignes en lyre - Elevage en barriques

La robe est grenat translucide.

Le nez est aérien, sur les petits fruits noirs, la violette et les épices.

La bouche est longiligne, élégante, avec une matière d'abord très fine, limite impalpable qui gagne progressivement en chair. L'ensemble est frais et digeste, avec un fruit moins présent mais plus aristocratique.

Ce n'est pas souvent que l'on a une finale 3A dans un rouge : il y a une fine Acidité qui évoque la griotte, une Astringence sur la craie et l'écorce d'agrume, et une noble Amertume (bigarade et café). Ce trio amène une niaque gourmande et salivante, avec une persistance sur la cerise noire, la framboise et de belles notes d'élevage (pain grillé, noisette, caramel au beurre salé)


Poycelan 2018 (11.90 €)

Sols volcaniques - Vignes issus de sélection massale - Elevage cuve

La robe est pourpre sombre translucide, avec des larmes  bien visibles sur les parois du verre.

Le nez évoque la confiture de fruits noirs, juste rafraîchie par un trait de menthol.

La bouche est sphérique, très ample, avec une matière riche et veloutée qui vous emplit généreusement le moindre mm² du palais. C'est un peu le châteauneuf du Forez (15.5 %). Ceci dit, l'ensemble reste harmonieux, sans lourdeur ni sensation alcooleuse. Si le fruit est bien mûr, il n'est pas cuit (et encore moins surcuit).

La finale est mâchue, gourmande, toute aussi généreuse, avec du fruit noir à volonté et des notes sanguines et poivrées qui persistent longuement.

jeudi 4 juillet 2019

Charmille rouge : une re-découverte !


Cela faisait des années que je n'avais pas regoûté Charmille rouge. Il est vrai que cette cuvée n'a pas besoin de moi pour (très bien) se vendre : le fait de trouver un vin biodynamique de qualité à 6.50 € est un argument souvent suffisant pour nos clients. Au départ, ils en achètent une, pour voir boire. Quinze jours plus tard, ils en reprennent 6 ou 12. 

Si je l'ai regoûté, donc, c'était pour voir si je pouvais l'intégrer dans nos Box(es). Car certains clients sont abonnés depuis longtemps, et il devient dur de leur trouver toujours de la nouveauté. Réponse : clairement oui. Ce vin m'a déçu en bien, comme disent nos amis suisses. J'en avais un bon souvenir. Mais là, on est bien au-dessus de celui-ci. Je me suis régalé ! 

La robe est grenat  translucide.

Le nez est gourmand, sur le guignolet (griotte confite + noyau), la framboise et quelques épices.

La bouche est ronde, ample, enveloppante, déployant une matière d'abord soyeuse, puis gagnant en densité et en chair, toujours sur cette aromatique de cerise et de noyau, avec l'impression de croquer dans le fruit mûr.

La finale dévoile une mâche savoureuse, avec le noyau (amer) qui prend (agréablement) le dessus sur la cerise, souligné par des notes cacaotées, donnant l'impression d'avoir mangé un Mon chéri ®, le sucre écœurant en moins.


mercredi 3 juillet 2019

La SyRose en bouteille !


Il n'y avait que Patrice Lescarret qui pouvait oser appeler l'une de ses cuvées Sy Rose. Une fois que l'on sait ce qu'elle contient, c'est plutôt logique : nous sommes sur un assemblage de SYrah en pressurage direct – et donc vinifié comme un blanc/rosé –  et de Mauzac ROSE vinifié avec ses peaux durant trois semaines. SY + ROSE = SY ROSE. Sur le papier; ça peut paraître bizarre. Je ne vais pas vous mentir : ça l'est ! Mais on reste dans le bon bizarre, je trouve. Et fera une belle introduction vers ces fameux vins oranges dont on cause beaucoup … mais qu'on boit finalement peu. 

La robe est entre l'orangé et le cuivré avec des reflets roses.

Le nez est fin et aérien, sur la rose séchée, l'écorce d'orange, le gingembre et les épices douces, avec une petite pointe de volatile qui amène de la fraîcheur et de la profondeur.

La bouche allie ampleur et tension, avec une matière dense et douce qui vous emplit tout le palais, et une fine acidité qui trace droit et étire longuement le vin. Le tout forme un ensemble harmonieux qui réjouira le dégustateur, à condition qu'il soit un minimum aware *.

La finale est vive et intense, avec une acidité qui prend de la vigueur, une amertume (quinquina) qui joue des coudes pour prendre le dessus, l'écorce d'agrume et les épices qui font leur come-back… Ça tire dans tous les sens tout en gardant une sacrée cohérence. Finalement, les épices remportent la manche, soulignés par la rose séchée. Si rose jusqu'au bout :-)

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* ouvert d'esprit



mardi 2 juillet 2019

Le Chili, l'autre pays du pinot noir ?


Comme souvent, le titre est un peu provoc, histoire de donner envie de voir ce que je raconte dans mon article. Je sais bien qu'il existe de (très) jolis pinots noirs en Allemagne, en Autriche, en Nouvelle-Zélande... 

Mais bon, je voulais vous parler ce jour d'un pinot noir chilien provenant d'un domaine chilien créé par Agustin Huneeus, l'homme qui fit de Concha y Toro le plus grand domaine du pays avant de développer Caliterra et Errazuriz. En 1989, il décide de créer son propre domaine, Veramonte, dans la vallée de Casablanca, à une époque où il était encore totalement inconnue. Sur les 400 hectares qui le constituent, seule la moitié est consacrée à la vigne. Les 200 autres sont restés à l'état naturel afin d'avoir une grande diversité de plantes et d'animaux. Le domaine est en effet certifié en bio. Dans cette vallée proche de l'Océan Pacifique qui apporte beaucoup de fraîcheur,  les cépages blancs sont privilégiés (chardonnay et sauvignon en majorité). Pas étonnant d'y retrouver le pinot noir qui est plus blanc des cépages rouges ;-)

Cette cuvée  Reserva 2017 présente une richesse un peu plus importante qu'en Bourgogne (14 % d'alcool) mais respecte la finesse du cépage grâce à une extraction et un élevage intelligents. Les amateurs de pinot noir devraient y retrouver leurs repères et leurs billes : à 11.90 €, le plaisir est au rendez-vous. 

La robe est rubis translucide avec des reflets tuilés.

Le nez est réduit (bouchage capsule ?) mais derrière la réduction on sent de la cerise mûre, un boisé élégant et les notes de terre fraîchement retournée so pinotantes. Un carafage est conseillé, donc.

La bouche est ronde, très ample, avec une matière soyeuse d'une finesse arachnéenne qui vous enveloppe le palais, et une tension qui monte crescendo, sans recourir à l'acidité. En milieu de bouche, le vin gagne en chair et en intensité aromatique – cerise à l'eau de vie, pain grillé.

La finale contracte toute cette matière en un point minuscule avant de tout éparpiller façon puzzle : la cerise d'un côté, le noyau de l'autre, le café par ici, les épices par là, et la terre, toujours recommencée.