jeudi 27 février 2020

Charmille blanc, une valeur sûre


Charmille blanc fait partie des incontournables de Vins étonnants depuis plus d'une décennie. Avec  le mérite de ne pas avoir connu la spirale inflationniste, presque aussi contagieuse qu'un virus asiatique – 1.50 € en dix ans ! Pour 7 €, vous avez un vin polyvalent, pouvant être bu pour lui-même à l'apéro, ou accompagner tout un repas, même si je pense que c'est sur les plats asiatiques qu'il se révélera le plus. Cette polyvalence est due à un assemblage hors-norme :  25 % chardonnay,  25% sauvignon, 25 % viognier, 15% grenache blanc et 10% carignan blanc. Avec tous ces cépages, ça pourrait être une sacrée pagaille, et en fait, pas du tout : ils s'entendent très bien ! Un effet de la biodynamie que le domaine pratique depuis 20 ans tout rond ? Va savoir...  

La robe est jaune pâle, brillante.

Le nez est  expressif, sur la pêche, l'abricot et la violette, avec une  touche de pierre humide et de zeste d'agrume.

La bouche est ronde, fraîche, tonique, avec l'impression de croquer dans la baie de raisin. L'aromatique évoque l'abricot bien mûr agrémenté de notes florales et épicées, mais l'ensemble est bien équilibré, très (trop?) facile à boire.

La finale est nette, mêlant une fine mâche citronnée à l'amertume du noyau d'abricot, avec une persistance sur des notes salines et épicées.



mercredi 26 février 2020

Soirée magique autour du Jura


Pour le 3ème opus de ma collaboration avec le chef Philippe Redon, j'ai choisi l'une des régions préférées des joyeux  membres du Vins étonnants' Club : le Jura ! À chaque fois que nous avons traité ce thème, ce fut un grand moment de gastronomie où mets et vins s'exaltaient mutuellement. Ce fut encore le cas hier soir, mais en version ++ : à certains moments, les larmes te venaient aux yeux tellement c'était bon !

 

Nous avons démarré avec un maki de jambon cru et pomme mi-cuite. servi avec un Crémant du Jura Nany du Domaine des Ronces. Composé à 70 % de pinot noir et 30 % de chardonnay, il a vieilli 4 ans sur lattes. Ce qui donne un vin à la robe "or rose", à la bouche intense et vineuse, finement oxydative, aux bulles délicates et discrètes, tout en ne manquant pas de fraîcheur. Un vrai vin de repas que l'on imagine avec un gibier à plume avec une farce au foie gras. Mais le maki à la fois "viandé" et fruité allait très bien aussi, et constituait une bonne introduction à ce repas. 



Avec le chou farci à la Morteau (et un jus à se damner), nous rentrons vraiment les deux pieds dans le Jura. Pour accompagner ce plat, deux vins rouges locaux : un Poulsard 2018 du Domaine des Ronces et un Arbois  DD  2018 de Stéphane Tissot (40% trousseau, 30% poulsard, 30% pinot noir).  En terme d'accord, c'est le Poulsard qui sort vainqueur : il est juste magnifique avec le plat, prenant alors des dimensions de grand pinot noir.  Par contre DD a la palme de la gourmandise, avec un fruit insolent, une fraîcheur explosive. Ce qui fait que les avis sont partagés autour de la table, avec des pro-poulsards et des pro-DD. Pour ma part, mon passé normand fait que j'aime tout autant les deux ;-)



Nous arrivons à l'un des sommets du repas avec la volaille de la ferme de Beauregard aux morilles, jus brun et crème de ferme. Elle est servie avec deux vins totalement différents : un Côtes du Jura Chamois du Paradis 2011 de JF Ganevat et un Arbois Traminer 2016 de Stéphane Tissot. Au départ, lorsque vous commencez à picorer les différents éléments dans l'assiette, c'est "seulement" très bon. Et puis, quand tout finit pas se mélanger, le plat prend tout son sens et c'est à se taper le c.. par terre ! Comme aurait pu le dire Cioran, c'est une preuve tangible de l'existence de Dieu. Et quand vous rajoutez là-dessus les Chamois, eh bien c'est le Paradis ! Ce vin a été fait manifestement créé pour ce plat tellement l'accord est superbe, déclenchant une rare émotion – t'avais envie de chialer comme un môme.  Le Traminer joue dans un tout autre registre, avec une aromatique plus en retrait, mais déployant une fine acidité magistrale, d'une pureté cristalline, évoquant les plus grands petits mansengs (dont il est le "père").  C'était d'une beauté irréelle !


Dans une soirée Jura, il y a forcément une rencontre Vin jaune & Comté.  Et c'est maintenant que ça se passe. Le comté 30 mois est recouvert d'une fine tuile aux noix grillées, et saupoudré d'une pincée de curry. Le vin jaune 2011 est celui de Pignier. Comme tout ce que fait ce producteur, on est dans la subtilité, la finesse; ce qui fait que même les gens peu familiers de l'oxydatif réussissent à l'apprécier. Encore plus avec ce comté très bien accommodé. Une fois de plus, au risque de me répéter;  accord magnifique !


Lorsque Philippe Redon était venu à Ambazac pour que l'on discute du repas, je lui avais fait goûter le vieux Macvin  de JF Ganevat, histoire de l'inspirer pour le dessert. À peine avait-il le nez sur le verre  qu'il me dit "ça sent le thé matcha". C'est bien, un regard extérieur, car jamais je n'avais pensé à cette odeur en sentant un Macvin. Mais une fois qu'on te l'a dit, c'est d'une évidence totale ! Philippe décide donc de faire un millefeuille au chocolat, sorbet au thé matcha. C'est une version très allégée puisqu'il n'y a pas de pâte feuilletée, mais juste des fines dentelles de chocolats. La mousse est bien chocolatée, mais peu sucrée. Idem pour le sorbet. Le Macvin devient ainsi l'élément sucrant du plat, évitant tout excès, vite saturant. Là, ce n'est pas magnifique, mais magique !


C'est sur cette magie que se conclue la soirée. 

Vivement la prochaine !





mardi 25 février 2020

Arnaud Combier : un vigneron à suivre !


La présentation faite sur le site de Jeff Carrel qui distribue ce vigneron  me paraissant impeccable, je ne vais pas la paraphraser mais la recopier : "Arnaud Combier, après des études à la « Viti » de Beaune, fait ses premières armes au Domaine Valette dans le mâconnais avec Philippe dont il reste très proche. Ensuite il vinifie à la cave de Prissé puis trois ans chez Colbois à Chablis. Sa volonté de faire des vins les plus naturels possibles lui fait reprendre les vignes de ses grands-pères en 1998.

Il y crée de grands blancs texturés et précieux pendant plus de dix ans. Au décès de ses aînés, la famille choisira de reprendre les vignes. Il fait alors un court passage dans le Sud à Pézenas où il rencontre Jeff Carrel, puis s’occupe du passage en agriculture biologique des vignes beaujolaises d’un grand négoce bourguignon. Il rejoint le Domaine des Moriers en 2018 pour accompagner une nouvelle aventure et faire des vins aux touchers et aux arômes délicats, ces vins sensuels que nous aimons tant."

Le Domaine des Moriers est connu par certains de nos clients, car François de Nicolaÿ l'a créé il y a une quinzaine d'années avec deux amis : nous avons déjà vendu plusieurs millésimes de son Moulin à vent

Le vignoble est en conversion bio. L'usage des sulfites est limité autant que possible (13 mg/l de SO2 total pour le blanc, 30-40 mg/l pour les rouges). 

2018 n'est pas forcément l'année idéale pour découvrir la patte d'un vigneron tant le millésime marque les vins de son empreinte. En même temps, cela permet de voir  qu'Arnaud Combier réussit avec talent à se jouer de la richesse des raisins. J'ai hâte de découvrir ce qu'il a pu faire sur 2019. 


Blanc-Sain 2018 (12.00 €)

La robe est jaune paille, très très légèrement trouble (histoire de chipoter)

Le nez de belle intensité évoque les fruits blancs rôtis au beurre, les notes pâtissières;  avec une touche fumée/grillée. 

La bouche est longiligne, tendue par une fine acidité traçante, enrobée par une matière mûre, dense,  séveuse, bien équilibrée malgré sa richesse.

La finale prolonge la tension de la bouche tout en gagnant encore en intensité, et plus encore en salinité, soulignée par les épices et la pomme chaude.


Chiroubles 2018 (17.00 €)

La robe est grenat sombre, translucide.

Le nez est expressif, sur la fraise confite, le cacao, la réglisse et une pointe de cacahuète grillée, assez atypique pour un gamay.

La bouche est ronde, ample, veloutée, déployant une matière fine et digeste, à la trame fraîche et fruitée, gagnant progressivement en densité

La finale est tonique, agréablement mordante, avec des tanins encore un peu serrés qui apporte une mâche canaille, sur des notes de cerises, de cacao et d'épices grillés.


Fleurie 2018 (17.00 €)

La robe est grenat translucide.

Le nez est discret, laissant s'échapper quelques fruits rouges épicés.

La bouche est plus ample, plus ronde, plus riche, avec une matière à la chair voluptueuse et caressante, généreuse, évoquant des fruits bien mûrs, le cuir et les épices.

La finale est intense, savoureuse, finement mâchue, sur des notes de prune chaude et de caramel au beurre salé.

vendredi 21 février 2020

Bourboulenc, le retour !


Ce n'est pas faute de faire des réserves,  mais cela faisait plusieurs mois que nous n'avions plus de Bourboulenc. Que voulez-vous ? Christophe Barbier  – le vrai, pas le paltoquet à l'écharpe rouge – ne peut pas produire plus que ce que les vignes veulent bien lui donner. Comme l'année dernière, on sent que la cuvée a connu le fût (probablement les "vieilles" barriques de Terres salées) sans toutefois être écrasée par le bois. Mais la grosse différence – à l'instar du Brut de cuve dont je vous causais hier – c'est la fraîcheur nettement plus marquée sur le millésime 2019. Et ça, ça me plaît bien ! Ajoutons un prix (8.90 €) qui reste raisonnable par les temps qui courent. Je peux déjà vous l'annoncer : il sera en rupture de stock avant janvier 2021 !

La robe est or pâle, brillante. 

Le nez  est fin, mais foisonnant, évoquant l'agrume confit, le beurre noisette, le pain grillé, la craie humide, avec une (minuscule) touche vanillée. 

La bouche est ronde, pleine de fraîcheur, déboulant dans le palais comme un rû au printemps, avec une matière pure, limpide, éclaboussante, mariant les fruits blancs à des notes caillouteuses et fumées. 


La finale gagne en concentration et intensité, avec une fine mâche citronnée/crayeuse, et une belle persistance sur les notes fumées/grillées/salines. 



jeudi 20 février 2020

Toujours aussi Brut de cuve !


Il y a un peu moins d'un an, je vous avais parlé du Brut de cuve 2018 du domaine de l'Arjolle. Comme tout est précoce en cet hiver 2020, voici déjà le Brut de cuve 2019. Mon impression rejoint celle que j'ai déjà eu sur d'autres 2019 dégustés à Millésime Bio fin janvier : il y aura plus de finesse et de fraîcheur qu'en 2018, et c'est très bien ainsi. J'ai tendance à penser que cela vient de nuits plus froides entre mi-août et mi-septembre, limitant la perte de l'acidité et de certains arômes. 

Ce Brut de cuve 2019, donc, me plaît nettement plus que son aîné d'un an. Il a certes un p...de fruit, mais dans un style moins exubérant/envahissant, et sans les notes amyliques façon Bojonouvo. Voilà un vin de copain et/ou de cochonnaille à prix sage (8.90 €). 

La robe est grenat sombre aux reflets violacés. 

Le nez est expressif et gourmand, sur la crème de fruits noirs (mûre, cerise), les épices douces et une petite touche lactée (yaourt). 

La bouche est ronde, ample, souple, déployant une matière qui démarre soyeuse et aérienne pour finir plus dense et finement accrocheuse. L'ensemble est équilibré, dans un style croquant/canaille, mais demande tout de même à être servi à 15-16 °C – ne pas oublier que c'est du merlot et du grenache, tout de même. 

La finale est tonique, avec une accroche un peu plus marquée –  renforcée par une légère amertume rappelant le noyau de cerise –  sur un fond de fruit noirs,  de notes sanguines/ferreuses et de poivre. 



mercredi 19 février 2020

On ne peut pas dire qu'on manque de pots...


La famille des Pots de vin s'agrandit, avec une version blanc et une autre rosé. Et tant qu'à faire, plutôt qu'en remettre une couche sur le Pot de vin rouge, je vais vous parler de la nouveauté du domaine Guilhem : Nationale 116, sans sulfites ajoutés. Les trois vins sont par ailleurs bio, et ont le label Vegan. Pour l'instant, ce n'est pas encore très courant dans le monde du vin, mais cela risque de se développer, car il y a clairement un créneau, et ne demande pas un gros effort à un producteur bio : quand ils font une cuvée qui n'est pas collée à l'oeuf, à l'albumine ou à la colle de poisson .... elle est Vegan. Et pour ceux qui veulent tout de même coller leurs vins, il existe des produits à base de légumineuses qui ont fait leur preuve. 



Chardonnay majoritaire

La robe est or pâle, brillante. 

Le nez est gourmand, sur les fruits blancs et jaunes, et même exotiques, rafraîchi par une pointe d'agrume et de craie humide.  

La bouche est ronde, friande, éclatante de fraîcheur, avec une matière à la fois mûre et croquante, d'une belle digestibilité pour un Languedoc. 

La finale est tonique, mêlant une mâche crayeuse à une noble amertume (pomelo), sur des notes de pomme et de fruit de la passion, et une persistance sur la noisette fraîche et les épices. 

Un vin multifonction qui ira aussi bien pour l'apéro que sur un poisson grillé, un plateau de fruits de mer ou du fromage de chèvre. Hum,  pas trop vegan, tout ça. Avec du tofu ou du faux-saumon fumé, ce sera très bien aussi ;-)



Syrah majoritaire

La robe est d'un rose trèèèsss pâle. 

Le nez est fin, frais, suggérant les fruits rouges et les épices dans un registre éthéré. 

La bouche est longiligne, étirée par une fine acidité quasi invisible, et dotée d'une matière pure et cristalline évoquant une lame d'acier vous tranchant délicieusement le palais. C'est carrément classe et égale des rosés provençaux 2-3 fois plus chers. 

La finale prolonge les sensations de la bouche sans à-coup : c'est toujours aussi tranchant  et cristallin, d'une élégance et d'une pureté qui va réussir (enfin !) à vous faire aimer le rosé. Une ultime touche épicée vous rappelle que ce (quasi) blanc est un enfant de la Syrah. 

Ce vin  s'utilise plus comme un blanc qu'un rosé : son côté cristallin ira bien avec des chairs délicates : langoustines crues où à peines saisies, ceviche de poisson, huîtres. Ou pourquoi pas tartare de veau ? Il ira aussi avec les salades de légumes et le tofu (tout va avec le tofu sauf les rouges surmûrs et horriblement boisés, et encore...)


Nationale 116 (10.50 €) 

100 % Merlot

La robe est grenat intense. 

Le nez est très expressif, sur la mûre et la framboise, avec une pointe de poivre blanc et une touche lactée. 

La bouche est ronde, ample, veloutée, avec une matière dense et pulpeuse aux tanins pas totalement dégrossis – c'est encore très jeune. Le fruit, pur et intense, est omniprésent. 

La finale est paradoxalement plutôt moins tannique que la bouche : elle est souple et séveuse, avec un fruit encore plus explosif, et une persistance sur le poivre, le menthol et des notes crayeuses. D'une canaillerie absolue !

Le domaine le conseille sur des plats végétaux. Je le verrais plus sur un confit de canard ou des ribs (des plats "un peu" gras qui demande des tanins et du fruit). 

mardi 18 février 2020

Et le Météore nous tomba dessus ...



... il y a 10.000 ans, je vous rassure. Juste à côté de Faugères. Ils ont bon goût, les météores ! Il en reste un cratère dans lequel de la vigne a été plantée.


La chose étant plutôt rare, la propriété qui l'exploite s'appelle en toute logique le Domaine du Météore.  Jusqu'il y a quelques semaines, nous n'en avions pas entendu parler. Nous avons reçu un échantillon via la société de Christophe Barbier (Terres salées) qui le distribue. Il nous a bien plu et  nous a incité à en savoir plus. Le hasard fait bien les choses : le Domaine du Météore était présent à Wine Paris. Eric R, alias Lechef, a pu déguster toute la gamme, et le niveau général est élevé, y compris pour une bulle "blanc de noirs" assez atypique. Vous n'avez donc pas fini d'entendre parler de ce domaine...

Quelques éléments sur celui-ci : il est la propriété de deux médecins londoniens fans de vins languedociens. Ils en ont confié la direction à Vincent Balansa qui a fait ses armes au Clos Marie et au Domaine du Soula. Dans la lignée de ceux-ci, il a converti le domaine en bio et démarre la biodynamie. Comme vous pourrez le voir ci-dessous, il est le seul à posséder des vignes en Faugères ET à Saint-Chinian. C'est très pédagogique, car même si les deux vignobles sont établis sur des schistes, ce ne sont pas les mêmes (bruns à Saint-Chinian, bleus à Faugères). Cela permet de voir les différences entre les deux, avec le même vinificateur à la barre.




Cinsault, Grenache et Syrah

La robe est pourpre sombre translucide.

Le nez est fin, profond, sur le cassis, l'encre,  le thym et l'ardoise chauffée au soleil.

La bouche est élancée, étirée par un fil invisible, tout en présentant une belle ampleur et une matière douce au toucher velouté. Le cassis perçu au nez gagne en intensité, apportant une grande fraîcheur aromatique, sans parler de la gourmandise. Il est complété par de la framboise et du poivre, sur un fond de garrigue (on entend presque les cigales).

La finale prolonge la bouche sans la moindre rupture ni de durcissement des tanins, se contentant d'une intensification des notes salines, crayeuses et épicées – et toujours ce cassis qui persiste longuement.


Syrah, Grenache et Carignan

La robe est grenat sombre translucide.

Le nez est plus discret, avec un cassis plus austère, le poivre et une touche de fumée. Avec l'aération, tout cela évolue favorablement.

La bouche est plus fine, plus aérienne,avec une matière quasi impalpable, caressante, mais aussi une tension plus marquée, plus d'allonge. Aromatiquement, c'est également plus austère, les fruits noirs se mêlant au graphite, à la réglisse et au poivre cubèbe.

C'est finalement ... la finale qui est la plus gourmande, avec un cassis plus expansif renforcé par une mâche fraîche et savoureuse, et une persistance ligérienne sur le cassis et le menthol, loin des canon sudistes.

jeudi 13 février 2020

Vin blanc ou Vin rouge ?


Ces deux vins signés  Puzelat ayant fait un carton l'année dernière, je me devais de goûter leur version 2019 dès leur arrivée, histoire de vous dire si leur style se rapprochait de leurs prédécesseur, ou pas. En quelques mots, les deux me semblent un peu plus fins que l'année dernière, avec un côté moins pulpeux, sans être "maigres", loin de là – 2019, ce n'est pas 2013. Et comme l'année dernière, il faut savoir qu'on a affaire à des vins "nature", car cela ne se ressent pas du tout à la dégustation. Ils sont accessibles à tous et me semblent parfaits pour découvrir ces vins dont on parle de plus en plus. 


Vin blanc 2019 (11.90 €)

100 % Sauvignon

La robe est or pâle, brillante.

Le nez est  fin, aérien,  sur la pomme fraîche, le pomelo, la fleur de tilleul, et un (subtil) bourgeon de cassis.

La bouche est ronde, éclatante de fraîcheur, déroulant une matière friande et digeste,  sur une aromatique  fruits blancs, d'herbe froissée et juste ce qu'il faut de caillouteux.

La finale est tonique, mêlant une fine astringence (écorce de citron) à de nobles amers végétaux (sauge, gentiane), et se prolonge agréablement sur le menthol et le pomelo.


Vin rouge 2019 (11.90 €)

100 % Gamay

La robe est grenat translucide aux reflets violacés.

Le nez est plutôt discret, laissant s'échapper des notes florales, fumées et poivrées.

La bouche est ronde, ample, déployant une matière finement veloutée, caressante, qui vous tapisse agréablement le palais. Le fruit, cette fois, est présent, sans en faire des caisses, complété par la violette et le poivre. L'ensemble est équilibré, et (trop ?) facile à boire, les tanins et l'alcool étant quasiment imperceptibles.

La finale est savoureuse, finement mâchue, avec le fruit (cerise) et le poivre qui gagnent en intensité, avec une persistance sur le noyau et des notes salines.

mercredi 12 février 2020

Louise blanc : un vin nature exemplaire !


Au domaine de Malavieille, on pratique le sulfitage raisonné qui mériterait d'être suivi par nombre de vigneron(ne)s : durant les vinification, aucun vin n'est sulfité. Au début de l'élevage non plus. Les différents lots (essentiellement en barriques) sont dégustés et analysés régulièrement. Si l'un  commence à partir en vrille, il est sulfité, sinon, il ne l'est pas. Et ainsi jusqu'à l'assemblage final et à la mise en bouteilles. Les cuvées Louise, en rouge comme en blanc, sont issues des lots qui ont réussi à aller jusqu'au bout de l'élevage sans avoir besoin de sulfites. Il n'y a donc pas de raison qu'ils partent en vrille en bouteille, le vin étant mieux protégé de l'air qu'en barrique. 

Louise blanc, cette année, est donc un assemblage de Chardonnay, Viognier et Vermentino. Et même s'il est "nature" dans les faits, il ne possède aucune des caractéristiques qui permettraient de le deviner à l'aveugle. Pour résumer, il a toutes les qualités d'un vin "traditionnel", les sulfites en moins ;-)

Et comme pour tous ses autres vins, le domaine vend cette cuvée à un prix ultra-raisonnable : 9 euros. Difficile de faire mieux !

La robe est or clair, brillante.

Le nez est très expressif, sur les fruits jaunes bien mûrs (pêche, abricot), la violette, le chèvrefeuille et des notes fumées/grillées.

La bouche est ronde, ample, éclatante de fraîcheur, avec une matière à la fois mûre et croquante, mêlant toujours les notes fumées, fruitées et florales.

La finale est franche, intense, associant une fine mâche à une noble amertume, avec un retour de l'abricot et de la fumée, et une persistance sur les notes épicées et salines.

Ce vin sera parfait pour l'apéritif, mais il accompagnera parfaitement des plats épicés (cuisine thaïe ou maghrébine) et des fromages affinés. 

PS : au bout de 5 jours d'ouverture à température ambiante, le vin n'a pas le moindre début d'oxydation, que ce soit dans la robe ou l'aromatique. Il est encore meilleur qu'au premier jour !


lundi 10 février 2020

Poulsard des Ronces : en trois lettres, TOP !


Je n'avais pas vraiment prévu d'ouvrir cette bouteille de Poulsard 2018 du domaine des Ronces. Mais comme j'envisageais de la servir à notre prochain repas Jura, j'en ai ouverte une pour le chef Philippe Redon, présent dans nos bureaux cet après-midi. C'est une belle pioche, car contrairement à des millésimes précédents, elle ne nécessite aucune préparation préalable : c'est délicieux dès l'ouverture !

La robe est grenat translucide aux reflets légèrement tuilés. 

Le nez est fin, aérien, sur la framboise, la griotte, la pivoine, avec une pincée de cacao, un tour de moulin à poivre et une pointe de fumée. 

La bouche est élancée, étirée par une acidité tellement fine qu'elle en devient imperceptible, et dotée d'une matière fraîche et délicate, soyeuse, relevée par les épices. Le fruit est très expressif, complété par des notes florales. 

La finale est tonique, avec une fine mâche acidulée sur la griotte et la groseille, et une persistance sur le poivre et la rose fanée. 

Il est prévu de le servir avec l'entrée qui devrait être une sorte de pot au feu présenté sous forme de chou farci. Je m'en régale d'avance ! Il aura en face un autre rouge jurassien. Suspense... 


vendredi 7 février 2020

Pinot gris Bonnet-Huteau : une pure friandise !


Le Pinot gris n'a souvent pas trop la cote chez les amateurs de vins : faut dire qu'il est souvent lourdaud et manque de gourmandise. Il faut un grand vinificateur et/ou un grand terroir pour en faire quelque chose d'intéressant. Avec ce Pinot gris 2018 de Bonnet-Huteau, nous sommes évidemment  loin de la race d'un Clos Saint-Urbain – mon plus grand PG bu à ce jour –  mais il présente une rare gourmandise à laquelle il est difficile de résister. C'est peut-être le seul reproche qu'on puisse le faire : c'est TROP bon, ce qui rend le format 75 cl peu adapté. La bouteille se vide beaucoup trop rapidement, laissant les invités frustrés. Pensez donc à en mettre deux au frigo ;-)

La robe est or rose, évoquant certains blancs de noirs champenois non décoloré.

Le nez est gourmand, sur les petits fruits rouges, la pêche blanche, la mangue et le bonbon acidulé aux agrumes.

La bouche est ronde, fraîche, friande, avec l'impression de croquer dans un grain de raisin. La matière est finement charnue, juste fruitée comme il faut, avec un léger frizzante apportant  un supplément de peps et de gourmandise.

La finale, à la fois acidulée et légèrement sucrée, contrebalancée par des nobles amers, donne encore plus cette sensation de friandise. Le tout persiste sur une fine acidité et des notes de pêche, de framboise et d'amande grillée.



jeudi 6 février 2020

Visite au domaine du Cros (Marcilllac)


Comme je l'expliquais la semaine dernière, j'ai profité de mon voyage aller vers Montpellier pour m'arrêter au Domaine du Cros à Marcillac avec qui nous travaillons depuis plusieurs années. Je n'avais pas regardé précisément sur une carte où ça se trouvait  – in Google Maps I trust. J'aurais peut-être dû. Contrairement à certains de ses confrères, il n'est pas à proximité de la D840, mais à Goutrens, lieu de tournage du fameux Farrebique. Mon GPS m'indique qu'il reste 4 km ... mais 12 mn de trajet. "Il bugue", me dis-je. En fait, pas du tout : j'ai même mis plutôt 20 mn, car je me suis arrêté plusieurs fois pour prendre des photos, bluffé que j'étais par le paysage. Pour ne rien arranger, je suis passé devant le domaine sans le savoir car il n'y avait aucun panneau dans le sens de la montée. Au bout de 500 m, j'ai fait demi-tour, conscient d'avoir loupé quelque chose. Et là,  en redescendant, il y avait bien un (modeste) panneau. 


Philippe Teulier m'accueille et commence à me faire visiter les alentours du domaine. Difficile de ne pas évoquer les rougiers, ces sols friables riches en oxyde de fer (mais aussi en quartz de diverses couleurs). Comme pouvez le voir ci-dessus, le thym pousse naturellement. C'est déjà le Sud... 


Le domaine compte aujourd'hui une trentaine d'hectares de vignes, certaines étant plantées sur les rougiers, les autres sur le sol calcaire. Une grande progression par rapport au début des années 80 où il ne subsistait alors qu'un hectare de Mansois. A l'époque, le père de Philippe vivait grâce à la polyculture. Mais son grand-père un pur vigneron. 


Au printemps et en début d'été,  pas moins de neuf personnes travaillent dans les vignes. En hiver, le personnel permanent (essentiellement la famille Teulier) est suffisant pour assurer la taille. 


Là, nous sommes sur le secteur calcaire (dont est fait le hameau que l'on aperçoit)




Les terrasses en "banquettes" qui font penser à Irouléguy ou Jurançon. Elles permettent le passage d'un tracteur qui peut tondre l'herbe et travailler sous le rang. C'est grâce à cette mécanisation que ces appellations ont pu se développer. 


Le chai construit par Philippe et son père il y a une trentaine d'année se sert de la dénivellation pour être gravitaire au maximum. La réception de la vendange se fait ici : les raisins, une fois éraflés sont entonnés descendent dans les deux niveaux de cuve sans avoir besoin de pompe à marc.


Là, nous sommes au niveau inférieur, avec des cuves thermorégulées. Alors que Lo Sang del Païs nécessite des macérations de 15-20 jours, les deux autres cuvées de rouges demandent  jusqu'à 35 jours, voire plus.  


Les foudres traditionnels servent à l'élevage de la cuvée Vieilles vignes



Les barriques sont destinées au Rougiers

J'ai pu goûter les 2019 en cours d'élevage. Ils ressemblent à 2018 ... en encore meilleur. La cuvée n°25 que vous aviez adoré l'année dernière est une pure tuerie ! Avec les Vieilles vignes et les Rougiers, on gagne encore en intensité, mais aussi en finesse. Que ce soit en 2018 ou en 2019, ce sont des petites merveilles qui ressemblent plus à du pinot bourguignon qu'à du braucol gaillacois. Il faudra encore patienter avant qu'elles arrivent sur le marché. 

mercredi 5 février 2020

Lorsque le monstre se fait ange


Pour une fois, je ne vous parlerai du vin qu'après vous l'avoir décrit, car ça me paraît être le bon sens de fonctionnement. Dans le même ordre d'idée, je vous conseille de le servir en aveugle si vous craquez pour une ou plusieurs bouteilles. Vos amis vous en seront reconnaissants. 

La robe est rubis translucide, très bourguignonne dans l'esprit. 

Le nez, lui aussi, fait penser à la Bourgogne : griotte, noyau, tabac blond, épices, complété par une pointe de garrigue et une subtile touche résineuse, plus italienne. On trouve aussi cette odeur de terre fraîche. 

La bouche est ronde, ample, aérienne, déployant une matière impalpable au toucher soyeux, et tendue par un fil invisible qui vous emmène loin, très loin. La cerise fraîche est omniprésente, accompagnée d'herbes aromatiques ( thym, sarriette) toujours de façon très subtile. 

La finale n'est pas vraiment une finale, car en fait, rien ne change : même texture aérienne, même tension, même aromatique. Bon, allez, ça finit tout de même par aller descrescendo, par se resserrer un peu, avec une apparition de notes salineS et du petrichor cher à mon coeur burgondophile. Et la cerise, pour un dernier adieu. 

Alors évidemment, ce n'est pas un Bourgogne (trop évident), pas plus qu'un Pinot noir. Ni un Cinsault, qu'il soit français ou Sud-Africain. Ou un Gamay transcendé par un vigneron de génie. C'est un vin californien issu de trois cépages :  50 % de  Carignan de 80 ans – eh oui, ça existe aux States – 48 % de Grenache du même âge et 2 % de Mourvèdre centenaire. Son nom : Scylla, monstre marin mythologique qui s'attaquait aux bateaux. En fait, ce vin est plus proche de l'ange que de la bête, même si on peut considérer que ce vin est une monstruosité oenologique au pays d'Opus One. Il a été créé par Alex Krause and John Locke, deux winemakers qui ont roulé leur bosse durant 40 ans dans le monde entier avant de se lancer en Californie, avec l'objectif de valoriser les plus vieilles vignes de la région. La plupart ne sont pas irriguées, car cela n'existait pas autrefois : elles se sont donc habituées à faire sans. Cela explique des degrés moindres : on est plutôt entre 13 et 14 % d'alcool, ce qui est surréaliste dans le secteur.


lundi 3 février 2020

Orée de la Berterie 2018 : superbe !


Dans les millésimes un peu frais, les blancs des Coteaux du Loir pouvaient avoir une acidité "crissante"  dérangeante pour les palais (et estomacs) sensibles. Au vu de cette Orée de la Berterie 2018 du Domaine de la Roche Bleue, je serais par contre prêt à parier que cette appellation aura beaucoup de succès dans les années qui viennent, car on y retrouve un profil de chenin qui a tendance à se perdre en Touraine pour cause de réchauffement climatique : une acidité percutante (mais pas agressive) associée à une belle maturité. 

La robe est jaune paille, brillante.

Le nez est intense, sur les fruits blancs confits (pomme, poire), le beurre noisette et le miel, avec une toute petite touche de coing et de fumé/grillé. 

La bouche est tendue par une fine acidité laser qui poursuit sa route au-delà même de la finale tout en déployant une matière ronde, mûre, savoureuse, sur une aromatique de pommes rôties au beurre relevée de gingembre et d'épices. Les deux s'équilibrent parfaitement et rendent le tout digeste et (trop ?) facile à boire. 

La finale poursuit la dynamique sans la moindre interruption, se contentant d'ajouter de beaux amers sans qui le Chenin ne serait pas le Chenin, sur la pomme tapée, l'écorce d'agrume confit, l'ananas séché, et une sacrée persistance sur des notes salines et épicées. 

Certes, ce n'est pas donné (18.90 €), mais je pense que l'on en a largement pour son investissement, d'autant que ça devrait se bonifier sans soucis dans les 15 prochaines années, voire plus. Même si c'est déjà irrésistible.