jeudi 30 avril 2020

Rocher des Violettes : chenin blanc ou orange ?


Nous avons reçu ce matin deux cuvées de chenin du millésime 2019 provenant du Rocher des Violettes. Une plutôt classique, mais dont les péripéties INAOesques* obligent à en faire un vin de France. L'autre est plus atypique, dans un style très différent du 2018 – on doit être plus proche d'un pH3 que d'un pH4. 

Dans les deux cas, il se confirme ce que j'avais déjà pressenti sur d'autres vins récents : le millésime 2019 s'avère vif, voire très vif. Et c'est plutôt une bonne nouvelle pour les amateurs de chenin qui avaient été un peu désorientés en 2017-2018.  Du coup, j'ai hâte de goûter les vins de la famille Pinon qui arrivent la semaine prochaine. 

Chenin Blanc 2019 (13.20 €)


La robe est or pâle, brillante.

Le nez expressif évoque les fruits blancs mûrs (pomme, poire, coing), la fleur de tilleul, avec une  touche de  miel et de craie humide.

La bouche est longiligne, tendue par une fine acidité qui trace au-delà même de la finale, et possédant une matière dense, pulpeuse, plus caillouteuse que liquide, dominée aromatiquement par le coing et le silex frappé, avec une pointe de cire d'abeille.

La finale, donc, est transpercée par cette acidité citrique, tout en déployant une amertume "pomelesque" et une mâche crayeuse imposante, avec une belle persistance sur le pamplemousse rose.

Chenin Orange 2019 (29.90 €)

Macération des peaux de 3 semaines 

La robe "or rose" aux reflets cuivrés fait plus penser à certains rosés provençaux qu'à un vin orange.

Le nez, par contre, nous remet dans le contexte : écorce d'orange séchée, foin, encaustique, coing confit...

La bouche est encore plus tendue que le chenin blanc, tout en ayant une acidité moins saillante. On est plutôt sur le "fil invisible" qui fait remarquablement le boulot. La matière est plus ronde, enveloppante, avec une chair veloutée et une densité encore plus imposante. L'aromatique rappelle le coing frais, et toute l'amertume qui va avec.

La finale est Triple A+++ (+) avec une Acidité haut perchée qui pointe enfin son nez, une Amertume et une Astringence limite violentes qui donnent l'impression de mordre dans l'écorce d'un citron. Le tout persiste sur des notes crayeuses et le Schweppes ®, le sucre en moins. Pas un vin de fillette, mais c'est p... bon !

_____________________

* les raisins viennent de Vouvray, mais sont vinifiés à Montlouis, ce qui leur fait perdre l'appellation. 




mardi 28 avril 2020

Sortez les tire-bouchons !


Le temps du déconfinement approche : histoire de fêter ça dignement, il est conseiller de se munir d'un tire-bouchon. Et pourquoi pas de deux, tant qu'à faire ? C'est ce je vous propose aujourd'hui avec Tire-bouchon blanc et Tire-bouchon rouge du domaine d'Ourea. Même si ce sont les "petits vins" de la propriété, il y a un sacré bon niveau comme vous pourrez le constater : vous pourrez les servir à un amateur pointu de vins. Il est probable qu'en rentrant chez lui à pas d'heure, il prendra le temps d'en commander 12 de chaque, histoire de voir venir l'été avec sérénité – on n'en a jamais trop en ce moment. 




Clairette rose & Clairette blanche 

La robe est jaune paille claire, brillante.

Le nez allie finesse et opulence, sur les agrumes confits (citron, mandarine), le fenouil et l'amande grillée, avec aussi de la poire séchée, de la fleur de tilleul...

La bouche est élancée, étirée par une fine acidité traçante, tout en déployant une matière ronde et fraîche, au fruit croquant. L'ensemble est d'une grande évidence, vous dévalant le gosier comme un rû de montagne, sur des notes de pommes fraîche et de pomelo rose.

La finale est concentrée et énergique, avec un frétillant Triple A : la fine Acidité qui poursuit Allègrement sa course, une subtile Astringence, entre craie et  ziste de pamplemousse et pour conclure, une Amertume qui envoie bien sans être agressive, sur le noyau d'amande, la bigarade et une touche de quinquina.



25% Grenache, 25% de Carignan, 20% Cinsault, 
10% Aramon, 10% Counoise, 10% Œillade

La robe est grenat sombre, mais tout de même bien translucide.

Le nez est fin et élégant, profond, sur les fruits rouges confits, l'écorce d'orange, l'olive verte et le tabac.

La bouche est ronde, de grande ampleur, vous tapissant le moindre mm² de votre palais d'une matière finement veloutée, souple, évoquant la compote de quetsche, les épices et l'Amsterdamer (souvenir de jeunesse...). Plus que l'acidité, c'est une (belle) amertume qui tient lieu de colonne vertébrale (noyaux de cerise et d'abricot)

On retrouve cette amertume en finale,  montant élégamment en crescendo, avec un retour des fruits rouges confits, du tabac et de l'écorce d'orange, avec une persistance sur les épices et la tapenade.

lundi 27 avril 2020

Et si vous passiez à la Beebine ?


Ce n'est pas si souvent que l'on sort du cadre du jus fermenté de raisin. Nous vous avions déjà parlé bière et alcool fort, mais jamais d'hydromel. Il se trouve que l'un de nos producteurs de vins, Henri Duporge du Château le Geai, s'est lancé dans l'aventure. Il hébergeait jusqu'à l'année dernière des ruches sur ses terres, et il a fait ce premier essai avec sa part du miel récolté. 

Le process est assez simple : il mélange dans un cuvon en inox du miel  et de l'eau (230 g/l) et il fait fermenter le tout jusqu'à ce que ça se stabilise. Puis il rajoute du miel de ronces, pour apporter plus d'arômes et de douceur ...et ça donne Beebine, une cuvée sans autre prétention que d'être gourmande, facile à boire. La complexité viendra lorsque Henri aura acquis de l'expérience. 

À partir de cette année, le miel proviendra des propres ruches du domaine : Henri est devenu apiculteur. Cette nouvelle activité le passionne et lui donne un autre regard sur toutes les fleurs qui peuvent pousser sur son domaine. 

La robe est jaune pâle, trouble.

Le nez est très expressif, sur le miel, la cire d'abeille et la fleur d'acacia.

La bouche est ronde, fraîche, croquante, avec un léger perlant qui apporte du peps et un peu de tension. Le miel est évidemment présent, mais c'est fin, subtil, tout en douceur : une vraie caresse en bouche.  On peut aussi trouver des notes fruités comme le melon ou la pêche blanche.

La finale est savoureuse, mêlant l'acidité carbonique à une fine astringence, sur fond de miel et fleurs blanches, avec une légère persistance sur la cire d'abeille.

Beebine peut être bue pour elle-même, un après-midi d'été au bord de la piscine, mais aussi accompagner un melon & jambon cru, ou pourquoi une faisselle de fromage  frais arrosée de miel d'acacia ? 




vendredi 24 avril 2020

Abracadabra : doublement magique !


Alain, le vigneron-magicien, a de nouveau sévi : en un tour de baguette, il réussit ...

- à faire un Bordeaux que même les Bordo-Bashers adoreront

- à faire un Vin nature que les plus anti-nature boiront avec plaisir ... et se resserviront !

Pas pour rien que la cuvée s'appelle Abracadabra. Ajoutons à cela que le domaine est en biodynamie (Demeter) en appellation Castillon-Côtes de Bordeaux (à quelques kilomètres de Saint-Émilion). 

Il reste un tout petit peu de gaz carbonique créé lors de la vinification. Un carafage en viendra rapidement à bout. Cela dit, la quantité est tellement minime qu'elle ne dérangera pas tout le monde.  

La robe est grenat sombre aux reflets violacés.

Le nez est gourmand, évoquant la confiture de mûre qui mijote dans le chaudron, parsemée de quelques épices douces.

La bouche est ronde, enveloppante, avec une matière veloutée, pulpeuse, qui vous nappe agréablement le palais. Le fruit mûr – juste comme il faut –  est bien présent, sans jamais être envahissant. Si vous n'avez pas pris le soin de dégazer, vous sentirez un très léger perlant qui vous titillera les papilles et apportera un supplément de fraîcheur.

La finale est primesautière, avec un triple A assez rare sur les vins rouges : l'Amertume du noyau de cerise, la fine Astringence crayeuse du calcaire de Castillon, et l'Acidité tonique de la griotte, sur fond de cerise noire, de coulis de mûre et de cacao. On se régale !


jeudi 23 avril 2020

Tessier : sensations fortes assurées !


En décembre dernier – une autre époque – nous avions eu un premier aperçu des 2018 du domaine Tessier. J'avais employé alors le terme de missiles solaires  :  on sentait une grande maturité assez typique du millésime, mais en même temps,  il y avait de la tension, de la fougue, qui permettaient d'éviter le piège de la lourdeur.

Il y a quelques jours, nous avons reçu le Cheverny 2019 qui signe un retour vers plus de finesse et de fraîcheur. Mais aussi les deux cuvées parcellaires en Cour-Cheverny : Les sables et  La porte dorée.  On retrouve un peu les sensation de décembre, mais un peu d'intensité, de profondeur, de niaque, tout en gardant un profil solaire. Ce ne ne sont plus des missiles, mais des bombes à fragmentation qui vous explosent les papilles (autorisées par la convention de Lamotte-Beuvron).

Je signale également que la Charbonnerie 2018 que j'avais beaucoup appréciée et qui était partie à toute vitesse est de retour !



Cheverny 2019 (11.50 €)

Sauvignon majoritaire complété par du Chardonnay et du Menu Pineau

Vignes de 5 à 20 ans sur sol silico-argileux

La robe est jaune pâle, brillante.

Le nez est appétant, sur la pomme fraîche, la fleur d'acacia et le citron confit, avec une petite pointe de miel.

La bouche allie ampleur et tension, avec un profil élancé et une matière ronde, enrobante,  très marquée par les fruits blancs, avec des notes salines et d'agrumes en arrière-plan.

La tension se prolonge en finale, complétée  par un mix amertume/astringence rappelant la citronnade, avec une persistance sur la craie et la pomme verte.



Vignes de 30 à 50 ans sur un sol silico-argileux

La robe est jaune paille  intense, brillante.

Le nez est riche, sur la pomme rôtie au beurre, la crème brûlée et une touche d'ananas.

La bouche est longiligne, étirée par un fil invisible, tout en présentant une matière dense et opulente, réussissant à rester aérienne – la magie du vin.... L'aromatique évoque la pêche blanche et l'écorce de pomelo confite. Et puis un côté pierreux/fumé, d'une austérité toute cistercienne.

La finale est intense, explosive, dans un style Triple A++ déjà entrevu chez Tessier : des Amers évoquant le cédrat et le quinquina, une Acidité "citrique" qui amène du peps, et une astringence crayeuse vous faisant frémir les papilles. C'est finalement l'amertume – d'une subjugante beauté – qui remporte la bataille et qui persiste longuement et vous immerge totalement.


Cour-Cheverny  La porte dorée 2018 (17.50 €)

Vignes de 40 à 90 ans sur sol silico-argileux et sous-sol calcaire

La robe est jaune paille  intense, brillante.

Le nez est sur le même registre que Les sables, mais en plus confit et intense, auquel s'ajoute une touche terpénique (écorce d'orange).

La bouche est tendue, traçante, tout en affichant une grande ampleur, déployant une matière confite/concentrée réussissant là aussi l'exploit d'être encore plus aérienne. Le contraste est juste magnifique .. et exaltant, disons-le. L'aromatique est dominée par l'agrume confit, complétée par des épices et le miel de châtaignier.

La finale monte encore d'un cran, avec l'orange amère en vedette, suivie par le quinquina, une tension de ouf, et l'impression de se faire un pot de marmelade d'agrume de Sicile, le sucre en moins et l'alcool en plus (15 %) étonnamment peu perceptible. Magique ou terrifiant, selon les dégustateurs.

mardi 21 avril 2020

Les grenadines : interdit aux enfants !


Je vous ai déjà parlé du Domaine d'Ansignan à deux reprises : c'est le rêve de gosse de Sébastien Calduch et de Jeff Carrel, associés à parts égales sur ce projet qui regarde au-delà de la simple production de vins irrésistibles dont ils ont le secret.

Infatigables arpenteurs du Roussillon pour les vins de la Maison Carrel, ils ont découvert Ansignan, là bas, à l'autre bout de l’Occitanie.
Les vignes qu’ils cherchaient tous les deux étaient là : des gobelets dans un Pech, des petites parcelles, en plus de cela, une folie des années 80, une colline tout entière de Syrah dans un endroit improbable au milieu de nulle part. Tout allait s’arracher après 150 années de passions humaines!

Sur les granites d’Ansignan, entre 280 et 400 m d’altitude, dans un terroir qui a vu l’homme travailler depuis plus de 4000 ans : des dolmens, des bas fourneau de l’âge de pierre, un pont romain reconstruit pendant le Moyen-Âge et des vignes bien sûr.

Les vignes en images



Trois personnes, dont une du village, travaillent dans ces vignes, en plein coeur des Fenouillèdes.
Ce sont des familles qui revitalisent un village des Pyrénées Orientales. De l'humain pour les vignes, les murets, les chemins, les casots, les fleurs, les oiseaux, l’école, le café, et peut-être demain un troupeau, des plantes aromatiques, des arbres fruitiers, des ruches…. Enfin bref,  des terres désormais entretenues et un patrimoine préservé.

Ces 18 ha de vignes sont en conversion biologique.
Un étudiant ingénieur en agronomie y écrit son mémoire de fin d’étude sur l’opportunité de passer de la culture conventionnelle de la vigne à la culture biologique, mémoire qui sera rendu public pour aider les viticulteurs intéressés par la certification bio à se poser les bonnes questions.

Vous ne dégusterez pas donc simplement un canon à la gourmandise et au mythique rapport prix/plaisir  "Carrel-iens" mais le fruit d'un véritable projet de vie.

Le choix a été ici de faire un "vin à l'ancienne" au goût du jour en mélangeant divers cépages rouges et blancs : Grenache, Maccabeu, Carignan, Syrah et Lledoner Pelut. Hormis le Carignan  (20 % du total) qui a fait une "carbo", les autres cépages ont juste été macérés à froid durant quelques jours avant d'être pressés. Le jus légèrement coloré a ensuite été vinifié comme un blanc (ou un rosé). Cela explique la couleur très claire, la quasi-absence de tanins, et des notes de "carbo" pas trop marquées. Au final, ce Grenadines (qui porte bien son nom) a des allures plus bourguignonnes que catalanes. Servez-le à l'aveugle. Il y aura des surprises ! 

La robe est rubis très clair et translucide, proche de certains Pinots bourguignons.

Le nez est gourmand, sur les fruits rouges (fraise, griotte), le bonbon régressif, avec une petite touche yaourtée et une pincée d'épices.

La bouche est ronde, ample, aérienne, déployant une matière fine, caressante, entre soie et velours, sur une aromatique dominée par la griotte dans un style pur et frais. En arrière-plan, un peu de pivoine, de fumée et d'épices. Un très léger gaz apporte un supplément de fraîcheur (là, il ne me dérange pas). Le tout est d'une grande cohérence et méchamment glouglou pour un Roussillon (13 % Alc).

La finale est savoureusement astringente, sur la groseille et la griotte – au noyau finement amer – à des notes terreuses rappelant le Pinot  Noir, avec une persistance sur le poivre blanc.

Ce vin peut se boire pour lui-même à l'apéro avec des rondelles de saucisson ou des copeaux de jambon cru. Mais il pourra aussi accompagner des grillades, une pizza, des salades d'été... Servi un peu frais, il fera la nique à des rosés!




lundi 20 avril 2020

Vieille mule : vous allez enfin aimer le rosé !


Comme vous le savez sûrement, il est interdit – sauf en Champagne – de mélanger un vin blanc et un vin rouge pour produire du rosé. Il est par contre autorisé d'utiliser des cépages blancs dans l'assemblage. Il est par exemple assez classique d'avoir un peu de rolle dans les rosés provençaux. Dans sa nouvelle version de Vieille mule rosé, Jeff Carrel n'y est pas allé de main morte : il a complété le grenache noir avec 40 % de muscat (blanc, donc). La couleur est donc  à peine rosée – elle peut passer pour un blanc – et ça "muscate" pas mal, tout en évitant le too much. Ce qui est certain, c'est que vous n'avez pas du tout l'impression de boire un rosé. Ce qui pour certains sera un argument pour enfin s'y mettre ;-)

La robe brillante hésite entre l'or gris et l'or rose.

Le nez expressif est dominé par les notes muscatées - fleur d'oranger, rose,  pêche, abricot – complétées par le melon et quelques épices.

La bouche est éclatante de fraîcheur – encore renforcée par un léger perlant –  et possède une matière ronde, finement pulpeuse, d'une grande buvabilité '12.5 % d'alcool). L'aromatique est évidemment très marquée par le muscat, avec l'impression de croquer dans un grain de raisin (le sucre en moins).

La finale est tonique, avec de beaux amers évoquant l'orange et le quinquina, puis arrive une subtile astringence qui fait place nette dans le palais et donne envie illico de se resservir, sur un fond d'épices et de pétale de rose.

Ce vin sera parfait pour l'apéro, mais il devrait être intéressant sur des plats typés asiatiques, ou des fromages à pâte lavée. 


vendredi 17 avril 2020

Erotasuna : un Marselan à Irouleguy


Je ne sais pas ce qui a donné l'idée à Bixintxo Aphaule (domaine Bordatto) de planter du marselan sur les coteaux d'Irouléguy. Lorsque l'on boit cette cuvée Erotasuna, on peut dire qu'elle était bonne. Le marselan étant un croisement grenache noir X cabernet-sauvignon, c'est peut-être un début d'explication, la famille des cabernets étant bien présente dans le secteur (dont elle est originaire). On retrouve d'ailleurs bien la tension et l'aromatique de ces cépages. Le grenache apporte plutôt de la rondeur et  de la couleur, sans les degrés (13 % seulement). Au final, on a l'impression de boire un assemblage tannat/cabernet, mais en plus rond et accessible, même si les tanins ne manquent pas. Et ce vin sera parfaitement à son aise avec la gastronomie du Sud-Ouest (confit de canard ou porc,boudin, cassoulet...), mais aussi une belle côte de boeuf. 

La robe est pourpre très sombre, carrément opaque, et colorant bien les parois du verre.

Le nez mêle les fruits noirs bien mûrs à des notes plus fraîches et balsamiques : menthe, cèdre, réglisse.

La bouche est élancée, tendue par une grande fraîcheur aromatique qui étire le vin (très Cabernet Sauvignon), tout en déployant une matière d'une densité assez impressionnante, au toucher velouté. Au fruit bien présent, s'ajoute une subtile touche végétale (feuille froissée, rafle).

La finale possède une mâche crayeuse très salivante, égayée par le coulis de myrtille, avec une persistance sur la cerise noire et le poivre blanc, et toujours ce côté crayeux.

Ce vin sera encore sûrement meilleur en octobre-novembre prochain, lorsque le temps viendra à fraîchir. 



mercredi 15 avril 2020

Veramonte : un chardo bien né !


Le Pinot noir de Veramonte (Chili) nous ayant bien plu, nous nous sommes  laissés tenter par son Chardonnay. Bonne pioche ! Le producteur a eu la bonne idée de faire la fermentation malolactique à seulement 30 % du vin – juste ce qu'il faut pour apporter du gras sans avoir la lourdeur. Il est ensuite élevé à 85 % en cuve – et donc seulement 15 % en barrique. Le résultat est donc loin de la caricature nouveau monde. En terme de maturité, on va dire qu'on est entre Beaune et Mâcon : on a une touche exotique, sans qu'elle soit prédominante. C'est sûr que les amateurs exclusifs de Chablis n'y trouveront pas leur compte, mais les autres devraient apprécier.  Et en terme de prix, c'est très bien placé pour un vin certifié bio (10.90 €). Le seul "hic", c'est qu'il y en a pour l'instant peu en stock – mais il reviendra vite. Merci de ne pas en prendre 12 d'un coup !

La robe est jaune pâle, brillante. 

Le nez est très expressif, sur la poire mûre, l'ananas, le pralin et une touche de pain grillé. 

La bouche est ronde, ample, enveloppante, nappant généreusement le palais d'une matière dense, pulpeuse et fraîche, tout en affichant une belle tension. L'aromatique est partagée entre les fruits blancs (pomme, poire) et les fruits exotiques (ananas, mangue), avec les agrumes (mandarine, citron) qui tentent de jouer les arbitres. Un léger perlant apporte une fraîcheur et une niaque bienvenues. 

La finale est tonique, traçante, avec un triple A que  nous aimons bien à Vins étonnants : une fine Acidité citrique qui évoque le fruit de la passion, un mix Amertume/Astringence sur l'écorce de pomelo. On retrouve l'ananas dans une version rôtie au beurre, et une belle persistance sur des notes crayeuses et citronnées. 

Ce vin sera aussi à l'aise pour l'apérif que pour accompagner des Saint-Jacques, des poissons à la sauce beurre-blanc, ou des filets de volaille. Et puis bien sûr, nombre de fromages (Comté, Chaource, Abondance...). 



mardi 14 avril 2020

Taupe secret ? On ne vous cache rien !


Taupe secret est un assemblage inédit en France de Pinot noir  et de Gamaret. Ce dernier est très peu courant dans notre pays (46 ha en 2018) car il a le tort d'avoir été créé en Suisse. Ce croisement du Gamay et du Reichensteiner présente pourtant plusieurs avantages : de par sa richesse en resvératrol et en ptérostilbène, il est particulièrement résistant à la pourriture grise – ce qui permet de ne pas bombarder les vignes d'antibotrytis (c'est hélas très courant : on en retrouve couramment des résidus dans les vins). Il arrive par ailleurs à pleine maturité sans produire trop de sucres, donnant des vins peu alcoolisés (12 %) tout en étant très colorés. Je ne sais pas si ça a été étudié pour, mais il peut être vendangé en même temps que le Pinot noir. C'est probablement pour cela que Cyril Alonso avait planté les deux côte à côte, histoire qu'ils fassent copain-copain. Et ma foi, c'est vrai qu'ils sont complémentaires, le Pinot apportant une souplesse bienvenue au Gamaret. 

Ceux qui ont l'occasion de boire le précédent millésime ne seront pas dépaysés. J'ai relu ce que j'ai écrit à son sujet : cela ressemble bigrement au 2019 ouvert ce jour (peut-être juste un peu plus de gourmandise et de rondeur ? Mais même pas sûr...)

La robe est pourpre sombre, limite opaque, colorant les parois du verre à l'agitation.

Le nez est très expressif, gourmand, sur la confiture de mûre en train de mijoter, la cerise noire – noyau inclus – le cacao, et une légère touche lactée (yaourt aux fruits).

La bouche est ronde, ample, veloutée, délivrant une matière dense et charnue, juteuse, soulignée par des tanins solides, mais déjà bien fondus. Les fruits perçus au nez sont bien présents, sans trop en faire, dans une version fraîche et gourmande.

La finale poursuit dans le même esprit, avec une intensification des tanins, mais aussi du fruit et de la fraîcheur : on est à fond sur la cerise cacaotée – le risque d'addiction est élevé – prolongée par des notes crayeuses et épicées.

Le vin est peut-être un peu trop tannique pour être bu seul à l'apéro. Il devrait être parfait avec des ribs, du  confit de canard ou une côte de boeuf bien persillée - voire un dessert au chocolat.



vendredi 10 avril 2020

Bastien : un rouge pour l'été


Étant donné que nous arrêtons progressivement Dupéré-Barrera, le couple ayant quitté le navire, il nous fallait partir à la recherche de remplaçants en Provence. Le Domaine Turenne fait partie d'une plateforme de producteurs BIO avec qui nous travaillons très régulièrement. Nous avons donc testé cette première cuvée, Bastien, qui sera sûrement suivie par d'autres.

L'assemblage ( 50 % Mourvèdre,  30 % vieux Carignan et 20% Syrah) pourrait laisser penser à un vin puissant. Si ce n'est que la vinification (macération semi-carbonique et fermentation à 25 °C) tempère sérieusement l'ardeur de ces cépages. Au final, un vin souple ne manquant pas de caractère, qui pourra se boire un peu frais par temps chaud, et accompagner tout un repas. 

La robe est grenat bien translucide (quasi bourguignonne !)

Le nez évoque les fruits rouges confits (fraise, framboise), le poivre blanc et la garrigue.

La bouche est ronde, ample, enrobante, avec une matière fine, soyeuse au premier abord, puis gagnant progressivement densité – tout en restant souple. Elle possède également une belle tension, plus due à la fraîcheur aromatique qu'à l'acidité, imperceptible. L'ensemble est léger, aérien, et aura du mal à satisfaire les amateurs de vins "virils".

La finale se révèle délicieusement mordante, avec l'apparition d'un inattendu  Triple A : l'Acidité de la griotte, l'Amertume du noyau et une Astringence finement crayeuse. Le tout rafraîchi par des notes de menthol et de poivre cubèbe (l'effet Mourvèdre) qui persistent assez longuement.

Le prix (10.50 €) est tout aussi raisonnable que le degré alcoolique (12.5 %). N'empêche qu'il faudra le consommer avec modération. Je compte sur vous !


mercredi 8 avril 2020

Tout feu tout flamme : il porte bien son nom !


Oui, je vous parle encore d'un vin "orange" aujourd'hui. Mais il est très différent de celui de Thomas Finot. Ce Tout feu tout flamme de Vincent Stoeffler est issu du Gewurztraminer, cépage non seulement très aromatique, mais possédant en plus une peau d'un rose soutenu. 


Pas étonnant donc que le vin soit bien coloré sans avoir besoin d'une extraction trop forte. Je présume que la méthode a été proche de celle du voisin Jean-Pierre Rietsch, à savoir une macération carbonique (ou semi-) en grappes entières. Cela expliquerait pourquoi ce Tout feu tout flamme ne présente pas l'astringence et l'amertume de nombreux vins oranges. Je n'irais pas jusqu'à dire qu'il est grand public, mais il devait plaire au plus grand nombre –  à condition d'avoir l'esprit un minimum ouvert. 

La robe est entre l'orange et l'ambré, un peu trouble.

Le nez évoque une bière ambrée dans laquelle on aurait fait infuser des écorces d'orange, quelques pétales de rose,  et une belle pincée d'épices exotiques.

La bouche est longiligne, traçante, dotée d'une matière souple et fraîche, très expressive aromatiquement : rose séchée, écorce d'agrumes, malt grillé, pain d'épices. Un très léger perlant apporte une profondeur et une tonicité supplémentaires.

La finale gagne encore en fraîcheur et en expressivité, sans l'astringence que peuvent avoir de nombreux vins orange. Il y a juste une pointe d'amertume (bigarade/quinquina) qui évoque certaines bières ambrées et autres bitter. Le tout persiste assez longuement sur les épices et la réglisse.


lundi 6 avril 2020

Verdier-Logel : 2019, retour à la fraîcheur !


Honnêtement, j'avoue avoir craint que les  vins de 2018 –  d'une façon générale –   nous donne un avant-goût de ce qui nous attend avec le réchauffement climatique. Depuis 2-3 mois, les 2019 qui nous arrivent me rassurent un peu : pour la plupart, c'est la finesse et la fraîcheur qui prédominent, avec souvent des degrés assez faibles (entre 11.5 et 13.5%). Il faut dire que la grosse chaleur a lieu plus ou moins au moment de la fleur, et n'a donc pas eu trop d'impact sur la maturité des raisins. Fin août-début septembre, il faisait raisonnablement chaud la journée, et plutôt frais la nuit. Une année "normale", quoi ;-)

Les trois cuvées de Verdier-Logel que je vous présente ce jour confirme mes impressions. On est très loin des 2018 qui s'échelonnaient entre 14.5 et 15.5 % d'alcool. Et c'est très bien ainsi. Je ne vous parle pour l'instant pas de Poycelan et de Rézinet, car nous sommes encore en 2018 sur ces deux cuvées. Patience...





Les gourmets 2019 (8.50 €)

Vieilles vignes de Gamay sur granit, 13 % d'alcool

La robe est grenat bien translucide (beaucoup plus que 2018).

Le nez est fin et frais, sur la griotte et la violette, avec un tour de moulin à poivre.

La bouche est ronde, très ample, aérienne, déployant avec énergie une matière délicate, soyeuse, exprimant un fruit gourmand et savoureux, sur un fond minéral et épicé.

La finale tonique poursuit dans la même veine, sans le moindre durcissement, avec une persistance sur la griotte, la terre humide et le poivre.



Volcanique 2019 (9.90 €)

Vignes de Gamay de 40 ans sur sol basaltique, 13 % alcool

La robe est grenat translucide.

Le nez évoque la tarte aux quetsches sortant du four – souvenir d'enfance –  saupoudrée d'épices de Noël.

La bouche est élancée, rectiligne, étirée par un fil invisible, avec une matière légèrement plus dense que la cuvée précédente –  un grain tannique un chouïa  plus épais–  mais néanmoins fine, fraîche et digeste, On retrouve la quetsche et  les épices, ainsi qu'un léger trait de fumée (le terroir volcanique ?).

La finale est plus terrienne, avec une fine mâche savoureuse, légèrement crayeuse,  et des notes d'humus. Pour se terminer sur le poivre et des notes sanguines/ferreuses.



Jeunes vignes de Côt  sur basalte, 12 % d'alcool

La robe est pourpre sombre, presque opaque.

Le nez est expressif, sur la crème de fruits noirs et les épices douces, relevé par un fin trait de menthol.

La bouche est ronde, ample, veloutée, avec une matière dense et mûre qui  vous tapisse le palais, sur des notes de cerise noire, de myrtille et de cacao. Et en même temps, on a une sensation de fraîcheur et de légèreté, confirmé par le degré affiché (12 %).

La finale gagne en puissance et concentration, tout en exprimant toujours ce fruit et cette fraîcheur, avec une persistance sur la mûre et le chocolat très très noir.

vendredi 3 avril 2020

Macération Cugnète : s'il n'y avait qu'un orange...


Il y a un an déjà, je vous parlais de Macération Cugnète de Thomas Finot. Hélas, vous n'aviez pas pu tous en avoir, car lorsque nous avions dû en recommander au domaine ... il n'y en avait plus. Cette année, nous avons pris les devantw : il devrait y avoir moins de frustrés (mais ne tardez pas trop quand même...). C'est un vin "orange" à base de Jacquère. L'avantage de ce cépage, c'est que l'on peut pousser sa maturité sans se retrouver à 15 % d'alcool, ni perdre son acidité. Avec une peau bien mûre, on a moins d'astringence et d'amertume... qui ne se  transfèrent pas durant la macération de plusieurs semaines. On obtient certainement le vin orange le plus facile d'accès aux néophytes. S'il y en n'a qu'un seul à déguster pour découvrir cette mystérieuse famille, c'est celui-ci ! (ça ne vous garantira pas que les autres vous plairont). 

La robe est d'un or intense, légèrement trouble.

Le nez est riche et foisonnant, sur les fruits jaunes séchés, la tarte à la mirabelle, le miel en rayon, l'écorce de yuzu et une pincée d'herbes médicinales (Chartreuse toute proche...)

La bouche allie ampleur et tension, avec une fine acidité traçante qui étire le vin au-delà même de la finale et une matière dense, mûre et généreuse, au toucher velouté,  qui vous tapisse le palais. L'équilibre entre les deux est très cohérent, sans excès d'alcool (12.9 %), sur des notes d'abricot séché et de miel d'oranger.

La finale énergique prolonge la bouche sans la moindre interruption, se contentant de la souligner par de nobles amers (noyau, bigarade) et de persister sur des notes crayeuses, salines et épicées.

Ce vin peut être bu pour lui-même, accompagner un plat épicé (tajine, couscous à la volaille), ou une pâte pressée affinée (Parmesan de 24-30 mois).


mercredi 1 avril 2020

Supplément d'âme 2019 : le vin nature comme on aime !



J'espère que vous allez bien en cette période troublée. Si une partie du commerce en ligne semble en difficulté,  ce n'est pas le cas de Vins étonnants  , et c'est un peu beaucoup grâce à VOUS. Merci pour votre confiance !

Nous avions reçu un échantillon de Supplément d'âme 2019 en début d'année. J'avais adoré ... mais à l'époque, nous avions encore quelques bouteilles de 2018. Ce matin, nous avons reçu ENFIN les 2019. Je publie donc mes impressions de l'époque. Contrairement à son grand frère, ce 2019 n'a pas besoin  d'une préparation particulière : il est top dès l'ouverture (ce qui est toujours appréciable pour une cuvée sans SO2 ajouté). 

La robe est pourpre bien translucide.

Le nez est fin et profond, sur des  notes florales (violette, pivoine), fruitées (griotte, framboise) et épicées. 

La bouche est  ronde, enveloppante, déployant avec une grâce une matière soyeuse, aérienne, qui se fait de plus en plus nappante, cajoleuse. Le tout exprimant un fruit pur, intense, d'une grande fraîcheur. Un vin à la fois gourmand et élégant (pour ne pas dire classieux). 

La finale est tonique, finement mordante, avec une griotte éclatante, soulignée par le poivre blanc et la violette,  et une belle persistance sur les amers (noyau, bigarade) Un pur régal !