jeudi 31 mai 2018

Bergecrac : le nature a du bon !


Année après année, Vincent Alexis modifie le style de ses vins, en blancs comme en rouges. Ces derniers gagnent de plus en plus en finesse et digestibilité – attendez-vous à une grosse surprise avec le Bergecrac rouge 2017 bientôt en bouteille – alors que les blancs gagnent en chair et en intensité. Il faut dire que Vincent a augmenté les proportions de Chenin dans trois de ses cuvées, et ça se sent : au nez, bien sûr (coing power !) mais plus encore en bouche, avec une acidité pas très courante en Bergeracois. Le pH plus bas lui a permis cette année de ne pas sulfiter du tout le Bergecrac blanc 2017. Et ma foi, ça lui réussit plutôt bien. Il faut savoir que l'on est en face d'un blanc "nature", car il ne présente aucun des symptômes souvent trop présents. Just perfect !

La robe est or pâle, brillante. 

Le nez expressif est dominé par les fruits blancs mûrs – pomme, poire, coing – avec une pointe d'amande et une autre de terpène d'agrume. À l'aveugle, on pourra partir en Loire. 

La bouche est élancée, tendue par une fine acidité, tout en gardant la rondeur et l'ampleur des millésimes précédents. La matière charnue est incroyablement dense pour un petit vin. 

La finale puissante est raccord : il y a une belle mâche gourmande, mêlant la pomme et le coing. Et puis une pointe d'amertume rappelant le Chenin. 

On est loin d'un vin glouglou. Il y a du monde dans le verre. Et du beau monde ! Proposer un vin nature de ce niveau pour un peu moins de 8 €, c'est champion !

PS : signalons que j'ai dégusté au domaine une bouteille ouverte depuis une semaine. Elle n'avait quasiment pas évolué et ne présentait aucun signe d'oxydation (mis à part peut-être une robe un peu plus dorée).


mercredi 30 mai 2018

Cabernet Franc 2017 : la battle !


Un peu comme l'autre jour avec les rosés, ces deux vins ont changé de millésime le même jour. Et donc, nouvelle photo, modifications sur le site, toussa... À noter qu'en 2016, les deux vignerons avaient été contraints d'acheter des raisins en dehors de leur appellation car leurs parcelles avaient gelé. Les deux cuvées s'étaient retrouvées en vin de France. En 2017, retour à la normale : l'Hurluberlu est en Saint-Nicolas de Bourgueil et le Canal des Grands Pièces en Chinon. 

Cela faisait sens de comparer ces deux cuvées : même type de sol (graviers), même climat, même cépage et même prix. Les deux sont en bio, très peu sulfités. Et il est difficile de trouver un vigneron moins sympa que l'autre ;-) 

Bref, la seule différence va se faire à la dégustation...



L'hurluberlu 2017 (10.95 €)

La robe est pourpre très sombre, limite opaque. 

Le nez est gourmand, entre crème de cassis et yaourt aux fruits noirs, avec une petite pointe poivrée/mentholée. 

La bouche est ronde, pulpeuse, fraîche, et énergique, avec une matière veloutée qui réussit à conjuguer densité et buvabilité. Y a du monde dans le verre, mais ça reste très glouglou. 

La finale est finement mâchue, avec un cassis qui domine – autant le fruit frais que la feuille froissée – et une persistance mentholée. 




La robe est grenat sombre aux reflets violacés, un peu plus translucide que le précédent. 

Le nez est plus discret, mais plus élégant : il conserve le cassis mentholé et élimine le yaourt. Il ajoute une pointe de cèdre qui vous enverrait presque dans le Médoc. Sobre et classe 

La bouche est élancée, avec une matière fine, soyeuse qui vous emplit le palais en douceur. C'est frais, élégant. Sobre et classe, toujours. 

La finale, très cassis,  ne s'est peut-être pas encore complètement remise de l'embouteillage récent. Mais ça lui va en fait plutôt bien : elle affiche une accroche canaille finement acidulée, et ce p'tit truc qui vous fait claquer la langue. Pas vraiment sobre et classe. Mais méchamment irrésistible. 

Conclusion : mon palais de fillette me fait plutôt craquer pour le second qui me fait penser à un Saint-Nicolas de Bourgueil d'Amirault (alors que c'est un Chinon – nobody's perfect). Mais l'Hurluberlu devrait plaire à beaucoup : c'est juteux, ça envoie bien ... et c'est bon !


mardi 29 mai 2018

C'est toujours la première fois...


C'est toujours la première fois, ça cause à l'enfant que je fus, élevé au Ferrat/Ferré plutôt qu'au Ferrero. Là, c'est Ferrat qui a mis en musique un poème d'Aragon. C'est aussi ce qu'a dû se dire Michel Louison lors de ses premières vinifications au domaine La Martine à Limoux : malgré plusieurs décennies au Château d'Estanilles, on est toujours aussi ému lorsque l'on donne naissance à un nouveau millésime. Jamais blasé tu seras.

Nous sommes à Limoux, donc. Pas étonnant d'y retrouver le Chardonnay. Pas étonnant non plus d'apprendre qu'il est élevé en fût, à l'instar des vins blanc que produisait  Michel Louison à Faugères (et qui vieillissaient magnifiquement). 

La robe est d'un jaune paille intense.

Le nez est très expressif, sur le beurre noisette, les agrumes confits, le pralin...

La bouche est longiligne, tendue, avec une matière séveuse, intense aromatiquement, alliant fraîcheur et (grande) maturité. Comme par le passé à Estanilles, l'élevage est présent, mais très bien intégré, certainement facilité par le Chardonnay, le cépage qui murmure à l'oreille du chêne.

La finale poursuit dans l'intensité, mariant les amers du bois grillé à ceux de l'écorce d'orange, du café et de la Suze. Ça pourrait être énervant et/ou stéréotypé, voire ennuyeux, mais ça réussit à ne pas l'être. On prend plaisir à y retourner et retourner encore, traquant les subtiles variations entre chaque gorgée.

Ce vin demandera des plats riches en saveur, avec des peaux/croûtes bien rôties ou caramélisées (ris de veau par ex), avec une sauce mêlant agrumes confits et une touche de café. Par ailleurs, il gagnera à être encavé quelques années pour gagner encore en complexité. 


lundi 28 mai 2018

Peillot, le retour !


Cela faisait un petit bout de temps que la plupart des cuvées de Peillot étaient aux abonnés absents. Hélas, il est difficile d'aller plus vite que la musique : il fallait attendre l'embouteillage des 2017. C'est chose faite depuis début mai. Si la mise a serré – momentanément –  les tannins du Pinot noir, elle n'a pas trop nui aux vins blanc : le Chardonnay se boit déjà très bien, et l'Altesse  s'avère être une petite merveille alors qu'elle n'en est qu'à l'aube de son existence. Ça valait le coup d'attendre, non ?


Chardonnay 2017 (9.50 €)

La robe est or très pâle, aux reflets argentés.

Le nez est plutôt discret, sur la pomme rôtie au beurre et des notes de craie humide.

La bouche est ronde, fraîche, friande, avec une matière digeste, coulant comme de l'eau de source. À l'instar du nez, l'aromatique est plutôt discrète (poire, pierre chaude).

La finale dévoile une mâche crayeuse, avec un retour de la pomme (Granny ?) de la poire ... Mais pas de scoubidou (oui, c'est de l'humour de vieux...) et du salin/pierreux qui prolongent le tout.


Altesse 2017 (13.50 €)

La robe est très proche du précédent.

Le nez est lui aussi discret, mais on est plus sur les fruits jaunes, le miel, avec une touche beurrée.

La bouche est traçante et énergique, tout en réussissant à avoir de la rondeur et de la souplesse. La matière est ample, douce, caressante. Apaisante, dirais-je même. Ce qui peut paraître contradictoire s'équilibre merveilleusement. Ce vin est un miracle !

La finale est finement mâchue, avec une aromatique minérale (ce côté jus de caillou que j'aime tant), là encore avec une grande harmonie. Très très bien !


Pinot noir 2017 (10.50 €)

La robe est grenat translucide aux reflets violacés. 

Le nez est gourmand, sur la cerise Bigarreau, son noyau et même un soupçon  de guignolet. Il y a une touche de violette, aussi, et une pincée de poivre. 

La bouche est ronde, rafraîchissante, au fruit très expressif, et dotée d'une matière fougueuse, pas encore tout à fait en place (mise en bouteille récente). 

On retrouve en finale le toucher crayeux du Chardonnay,  avec un retour intense sur la cerise et le poivre



Mondeuse 2016 (11.50 €)

La robe est pourpre sombre, mais tout de même translucide. 

Le nez est élégant, sur la cerise noire, le cacao et les épices douces. Là aussi, il y a une touche de violette (un peu plus pimpante).

La bouche allie ampleur et tension, déployant une matière pulpeuse/veloutée qui vous emplit le palais. C'est un hymne aux fruits noirs ... et à la fraîcheur. 

La finale est énergique, avec des tanins bien présents, mais  mûrs. Le tout persiste sur un impressionnant toucher crayeux (vous avez l'impression d'avoir mangé toute la boîte). 

mardi 22 mai 2018

La vie en rose !


Ces quatre rosés n'étaient pas faits pour se rencontrer un jour. Il se trouve qu'ils se sont tous retrouvés jeudi après-midi sur l'étagère de mon "studio photo". Comme les 3/4 étaient des p'tits nouveaux, il était tout de même préférable que je fasse connaissance avec eux. Après la séance shooting, il y a eu donc une séquence débouchage suivie d'une studieuse dégustation. Même s'il n'y a pas de grosses différences de couleur, on peut dire que les quatre présentent des profils dissemblables. Certains plus frais, d'autres plus puissants. Un voyage pas inintéressant, même si je ne serai jamais un fondu de rosés... 


Viña Temprana 2017 (4.50 €)

Cépage Grenache noir 

La robe est rose très très pâle. 

Le nez est expressif, sur la framboise et la pêche blanche, avec une touche d'épices et une pointe amylique. 

La bouche fraîche, citronnée, impeccablement tendue, évoquerait plus un vin blanc ligérien qu'un rosé espagnol s'il n'y avait pas ces notes épicées qui vous ramènent au pays de la paella. 

La finale est savoureuse, avec de la niaque, mêlant les petits fruits rouge au pamplemousse. Très sympa !




Cépages Grenache noir et Grenache blanc 

La robe est rose très pâle, dans un style "vin gris".  

Le nez est dominé par les petits fruits rouges bien mûrs, avec une pointe de sucre d'orge et une pincée d'épices. 

La bouche est ronde, fraîche, croquante, avec une matière finement charnue au toucher soyeux. Les fruits cèdent la place aux épices. 

Cela se confime dans une finale nette, mêlant subtilement amertume et astringence. Ce sont les amers (évoquant l'écorce de pomelo) qui finissent par l'emporter, soulignés par des notes poivrées. 


L'Ambigu 2017 (9.80 €)

Cépages Syrah, Mourvèdre et Cinsault 

La robe est rose "melon" pâle, évoquant certaines roses anciennes.  

Le nez est assez classique pour un rosé, sur les fameuses notes amyliques de "bonbon anglais". Il y a aussi de la pomme Granny, quelques épices (poivre, surtout). 

La bouche est longiligne, très fraîche, avec une sacrée tension. Le tout est enrobé par une matière ronde, friande, savoureuse. 

La finale intense prolonge cette tension sans à-coup, dominée par la bigarade et des épices en pagaille. 


Rosé  Bonnardot (14.90 €)

Cépage Pinot noir
La robe est  saumon clair, très légèrement trouble. 

Le nez est plutôt discret et réduit, avec une dominante des notes fumées. Avec l'aération, on perçoit  le zeste d'agrume et la bière blanche (dans son côté froment). 

La bouche est ronde et charnue, étonnamment dense, faisant plus penser à un vin orange ou rouge. L'ensemble est frais et équilibré, finement tendu, dominé par l'écorce d'orange. 

Cette dernière est encore plus marquée dans l'énergique finale, renforcée par les épices et les fruits rouges. Et toujours une évocation de la bière (mais Gueuse Lambic, cette fois-ci).  

vendredi 18 mai 2018

Gorges profond !


Afin de compléter sa gamme de crus communaux, la Pépière a fait un échange de moût avec le domaine Brégeon, le plus réputé de Gorges. Le successeur de Jean-Joël, Fred Lailler, a entamé une conversion vers l'agriculture biologique qui sera terminé en 2018-2019. Ce qui explique que ce Gorges 2014 n'est pas BIO, contrairement aux autres vins de la Pépière.  

Le moût a donc fermenté et a été élevé sur lies dans les chais de la Pépière durant plus de trois ans. Je ne connais pas les caractéristiques des cuves des deux domaines, mais il me semble que la Pépière  a réussi à obtenir un vin plus aimable que ceux de Brégeon au même stade : plus de rondeur, moins incisif. C'est d'ailleurs le danger. C'est déjà tellement bon maintenant que l'amateur risque de tout boire avant que le vin ne montre son vrai visage. Pour avoir eu la chance de boire des Gorges de Brégeon de plus de 20 ans, planquez quelques bouteilles de ce cru dans votre cave durant au moins une décennie. Vous me remercierez ;-)

La robe brillante est d'un jaune paille intense. 

Le nez est fin, profond, sur les fruits blancs rôtis au beurre, le zeste d'agrume et la pierre humide. La bouche est longiligne tout en déployant une matière dense, riche, enveloppante, d'une impressionnante concentration. On n'est pas loin du monstre oenologique tout en étant d'une grande accessibilité. 

La finale allie puissance et zénitude : ça envoie du lourd, l'air de rien, avec du beurre citronné à foison, complété par le salin/minéral. C'est beau !



jeudi 17 mai 2018

Chloé, de 4 à 5



Ceux qui me lisent l'ont peut-être déjà vécu. Tous les jours, il y a 2-3 références qui changent de millésime. Nous devons alors prévenir le client qu'il ne recevra pas du 2014 mais du 2015. C'était le cas hier avec cette Chloé de Denois. Voulant savoir si la différence était marquée entre les deux millésimes, j'en ai ouvert une à 10h30 du matin. J'ai bien fait, car le profil n'est pas vraiment le même. J'ai donc expliqué au client en quelques lignes en quoi il différait. À lui de voir s'il maintient sa commande ou non (95 % du temps, c'est ce que font nos clients).  Et puisque la bouteille était ouverte, autant vous en parler, non ?

La robe est pourpre bien sombre, mais translucide.

Le nez est mûr et profond, évoquant le coulis de myrtille relevé par une pointe de menthol et quelques épices.

La bouche démarre sur un mode longiligne avant de gagner en ampleur avec une matière à la chair dense et veloutée. On pressent en arrière-plan des tannins solides qui devraient lui permettre de tenir au moins une décennie. Une fine acidité apporte ce qu'il faut de tension et de fraîcheur.

La finale dévoile une mâche puissante, énergique. Mais rapidement le fruit noir reprend le dessus, soutenu par des épices et cette petite pointe de menthol.

Clairement, il gagnera à être attendu 4-5 ans. Mais dès maintenant, il pourra être sympa avec une côte de boeuf cuite sur la braise. 


mercredi 16 mai 2018

Faire encore et toujours avec les Moyens du Bord


Cela fait maintenant plus de 10 ans que l'équipe de la Grange aux Belles fait (avec) les Moyens du Bord. À l'origine, le nom évoquait une certaine galère au moment des vendanges, gérée comme ils avaient pu. Celle-ci est oubliée depuis longtemps, mais le nom est resté, à l'instar des plats signatures dans les restaurants. Le chef préférerait parfois à autre chose, mais les clients le réclament

La robe est jaune paille, brillante.

Le nez est fin, aérien, évoquant la tarte Bourdaloue sortant du four. Tout y est  : poire chaude, frangipane, tarte sablée au beurre. Et c'est tout ? C'est déjà pas mal !

La bouche est à la fois ample et élancée, vous envahissant le palais d'une matière fluide et fraîche, tonique, aux accents minéraux/salins et fruités. Il y a un côté très eau de roche qui plaira à nombre d'amateurs étonnants. En même temps, il se dégage de ce vin une ambiance assez zen : vous êtes bien, en train de déguster cette tarte que vous avez sentie tout à l'heure dans la cuisine... 

La finale gagne en densité, partant sur le pierreux/crayeux, mais la poire et la frangipane font leur come-back et joue les prolongations avec gourmandise. 

Ce vin pourra un peu tout faire : apéro, risotto, volaille aux champignons ou aux fruits blancs, poisson de rivière, fromage de chèvre ... et tarte Bourdaloue !



mardi 15 mai 2018

Cosos : vos grillades vont l'adorer


Cosos est la toute dernière trouvaille de Jean-Louis Denois en Espagne. On est cette fois-ci dans l'appellation de Campo de Borja. On est au nord de l'Espagne, à mi-chemin entre Barcelone et Valladolid. Les journées sont chaudes, mais les nuits sont fraîches, donnant des maturités tardives : les raisins sont vendangés la troisième semaine d'octobre ! Nous sommes sur un 100 % Grenache issu de vieilles vignes (certaines ont plus d'un siècle). Le vin est élevé 6 mois en fûts de chêne américain. Mais cela se ressent à peine, si ce n'est par les notes épicées. 


La robe est grenat sombre translucide.

Le nez est gourmand, sur la cerise mûre – noyau inclus – la framboise et les épices grillés.

La bouche est ronde, charnue, avec une matière finement veloutée, au fruit bien présent, relevée par les épices.

La finale est légèrement crayeuse, sur des notes de cerises à l'eau de vie, de poivre et de cannelle.

Le vin gagne à être servi un peu frais (15-16 °C), car sinon, l'alcool a tendance à ressortir (c'est du Grenache...). Avec des côtelettes d'agneau ou des travers de porcs grillés au barbecue, il sera juste parfaits et devrait plaire à tous (7.20 €). 


lundi 14 mai 2018

Villa des Anges : un bon blanc de tous les jours


Nous en sommes au troisième millésime de ce Villa des Anges blanc. C'est le premier qui me convainc (ou convient ?) vraiment. J'ai beau chercher des défauts, je n'en vois pas. Enfin si : on peut lui reprocher un manque de typicité, de caractère, voire d'originalité. Certes, mais c'est normal : il a été pensé pour être bu par le plus grand nombre. Et puis surtout, à 4.95 € ( 4.20 € par 12) il ne faut trop lui en demander, non plus. Pour ce prix,  il fait remarquablement bien son job. D'autant que le manque de typicité évoqué plus haut lui permet d'accompagner tout un repas sans le moindre risque de dérapage. La perle, quoi. 

La robe est jaune très pâle, aux reflets argentés.

Le nez est fin, aérien, sur le zeste d'agrume, la feuille de cassis (l'herbe froissée, aussi) et une touche de silex. 

La bouche est ronde, fraîche, éclatante, avec une matière limpide, digeste, sans la moindre trace "sudiste". Pas plus que celle d'un Sauvignon exubérant : sobriété totale, tout en ne tombant jamais dans l'austérité. 

La finale est nette, finement astringente, évoquant la pulpe de citron et la craie humide. On poursuit dans la sobriété et digestibilité, sans la perception d'alcool. Presque du jus de raisin, le sucre en moins. 


vendredi 11 mai 2018

Château de Fontvert : la volatile sublimée !


J'avais dégusté ce Château Fontvert 2016 début février à Angers. Dans mes notes, il était écrit : "Long. Intense. Ça envoie". Il y a une dizaine de jours, nous le recevons (nous n'avions plus une bouteille de 2015). Je le photographie recto-verso pour le site. Et là, je vois sur la contre-étiquette que l'assemblage a changé. On est passé de Syrah (70%), Grenache Noir (25%) et Mourvèdre (5%) à Syrah (70%), Grenache Noir (15%) et Mourvèdre (15%). La proportion de Mourvèdre a été multipliée par trois, et je pense que cela a un impact sur le profil de la cuvée. 

Ceci dit, l'acidité volatile a tendance à voler ici la vedette au Mourvèdre. L'acidité volatile, c'est ce qui fait ressembler certains vins à des bouteilles de vinaigre ou de vernis à ongles. Quand on en est à ce stade-là, je déteste. Là, c'est beaucoup plus subtil : au nez, elle se contente juste de vous titiller les narines sans les agresser. Et en bouche, point de vinaigre, mais juste une acidité de ouf,  normalement inexistante dans les vins du sud, qui vous fait quasiment penser à un Riesling mosellan. C'est ce que réussit à faire Didier Barral lorsqu'il est du bon côté de la force. Parfois, ça rate... 

La robe est pourpre très sombre, à la limite de l'opacité. 

Le nez est mûr, très concentré, sur les fruits noirs confits et l'eucalyptus, avec  une pointe d'acidité volatile qui apporte de la fraîcheur et de la profondeur. 

La bouche est longiligne, étirée par cette volatile au-delà même de la finale, enrobée par une matière séveuse, intense, d'une grande douceur tactile, entre soie et velours [ on ne peut que s'incliner devant une telle maîtrise de l'extraction des tannins ]. Les fruits noirs (cerise, myrtille) règnent en maître, secondés par le ciste et le genévrier. 

La finale se fait d'abord mâchue, puis s'allonge longuement sous l'effet d'une volatile totalement transcendée qui prend une ampleur incroyable, accompagnée par des notes résino-balsamiques toscanisantes. Peut-être que ça peut déranger (sûremement, même). Moi, j'adore !







lundi 7 mai 2018

Willkommen !


Nous venons de nous réapprovisionner chez Clemens Busch. Nous en avons profité pour prendre quelques références supplémentaires. Je ne vous parlerai pas des plus chères que nous n'avons qu'en petites quantités, mais des deux plus abordables, qui se trouvent être aussi les plus originales. Un Halbtrocken (= demi-sec) qui se situe entre un Trocken et un Kabinett – mais qui s'avère être beaucoup plus proche d'un Trocken – et un (alter)native, un "vin de macération" plus abordable  que la cuvée O que nous avions reçue l'année dernière. Il est assez proche de ce que fait Stoeffler en la matière, avec peut-être un supplément de finesse et de tension mosellanes. 




La robe est jaune pâle, brillante.

Le nez est fin, sur l'ananas frais et la citronnelle, avec une touche de caillou humide.

La bouche est traçante, acérée comme un sabre japonais, avec une fraîcheur éclatante et une matière mûre et digeste, dominée par les fruits exotiques. Le tout est souligné par un léger perlant.

La finale est nette,  agréablement astringente, avec l'impression de mordre dans une écorce de pomelo rose. La fraîcheur et l'acidité gomment totalement les 15 g de sucres résiduels. Ça se prolonge sur le fruit de la passion et des notes salines.





La robe est jaune paille, très légèrement trouble.

Le nez est intense, sur l'écorce d'orange séchée et les épices de Noël.

La bouche est longiligne, avec une matière puissante, concentrée, d'une impressionnante richesse, tout en gardant un toucher rond et doux. Le perlant est plus prononcé, mais ça lui va très bien : ça donne de légèreté et du peps à l'ensemble.

La finale est punchy, avec une amertume/astringence bien marquée – mais jouissive quand on aime ça – très écorce d'orange amère. Puis arrivent la pulpe et l'écorce de pomelo, avec une persistance titillante sur l'astringence gourmande.


vendredi 4 mai 2018

Le Vau Renou : grand vin en devenir


Depuis que  nous avons référencé les vins de Xavier Amirault, leur succès ne dément pas. Particulièrement le Fondis, pourtant le plus cher que nous proposions. Des clients qui n'en avaient pris qu'une au départ pour tester, en ont repris 3 ou 6. Nous nous sommes dits que nous pouvions alors tenter la cuvée Vau Renou, située au sommet de la gamme du vigneron. Une bouteille a été sacrifiée le jour même de son arrivée, histoire de savoir à quel vin nous avions affaire. On pourrait dire qu'il a connu un élevage plus ambitieux que les autres cuvées, mais il les rejoint en terme de finesse et d'élégance.  Il est donc déjà des plus abordables,  mais il gardera à être encavé au bas mot cinq ans, histoire de dévoiler tout le potentiel qu'il a à offrir.

La robe est grenat sombre tirant vers le pourpre, translucide.

Le nez est fin, intense et aérien, mêlant le cassis aux notes épicées/grillées dans un style classieux.

La bouche est élancée, longiligne, avec une matière fine, soyeuse, enveloppante, plus dense et profonde qu'il n'y paraît. Il s'en dégage un fruit frais éclatant qui réussit à s'affranchir de l'élevage que l'on sent encore en arrière-plan.

La finale est plus terrienne, avec une mâche crayeuse. Mais le cassis et le menthol finissent par l'emporter, soulignés par des notes épicées/boisées.


Y a pas : un futur grand !





jeudi 3 mai 2018

Arménie, l'autre berceau du vin


Lorsque nous avons été contacté pour revendre des vins arméniens, nous avons répondu "pourquoi pas". Il faut juste nous envoyer des échantillons : nous jugerons sur pièce. Ce qui fut fait quelques jours plus tard. Certains vins nous ont beaucoup plu, d'autres moins. En tout cas, même si l'Arménie est voisine de la Géorgie, nous sommes dans un autre monde, plus proche de ce que nous buvons au quotidien (avec des exceptions, tout de même). 

Comme le vin qui nous avait le plus emballé provenait du domaine ArmAs, nous avons privilégié d'autres vins de cette propriété. Nous avons complété par un autre vin, Kataro, plus classique, mais qui a le mérite de ne voir que de la cuve, laissant au fruit toute sa place. 


Voskehat 2012 (9.50 €)

La robe est jaune pâle, ne trahissant pas l'âge du vin (bientôt 6 ans). 

Le nez est fin et complexe, sur la poire, le miel d'acacia et le mousseron, avec une légère touche fumée. 

La bouche est ronde, ample, pleine de fraîcheur, avec une matière dense et mûre, digeste (12.2 % d'alcool)  qui se prolonge sans transition vers une belle finale minérale/saline. Sobre et classieux. 



Areni 2012 (17.00 €)

La robe est grenat translucide avec des reflets d'évolution. 

Après aération, le nez est fin et complexe, sur les petits fruits rouges, la cendre, le mousseron et l'encre. La bouche est ronde, ample, soyeuse, avec des tanins quasi imperceptibles et une acidité arachnéenne qui apporte tension et fraîcheur. 

La finale est finement mâchue, avec un retour sur la cerise et la framboise, et se prolonge sur le sous-bois et le poivre. 



Karmrahyut 2013 (17.00 €)

La robe est grenat très sombre, presque opaque. 

Le nez est très expressif, évoquant la questche, la liqueur de framboise, la rose, le tabac, et les épices orientales. La bouche est longiligne, tendue, enrobée par une matière d'une impressionnante densité aux tannins bien mûrs. L'aromatique en bouche est toute aussi expressive qu'au nez, avec une fraîcheur et une droiture qui empêchent de tomber dans la lourdeur "loukoum". 

La finale déroule une mâche puissante, généreuse, qui envoie sévère sans jamais agresser, avec un retour de la rose et des épices. Un vrai souk oriental !




La robe est pourpre sombre, limite opaque. 

Le nez est frais, sur les fruits noirs et des notes résineuses/balsamiques. 

La bouche éclate de fraîcheur, avec une matière dense et velouté aux tannins présents, déjà bien patinés, et un fruit omniprésent. 

La finale est ferme, puissante, mais là encore, le fruit emporte tout sur son passage, avec une persistance sur le menthol et les épices.

mercredi 2 mai 2018

Quand Jean-Louis Denois réinvente le Pinot noir


Réinventer est-il un mot un peu fort ? Peut-être. Un titre doit être impactant pour faire venir le lecteur, tellement sollicité par ailleurs. En tout cas, après avoir bu ce Pinot noir 2016 de Denois, on peut se dire qu'il a trouvé une façon toute personnelle de retranscrire ce cépage (en titre, vous admettrez c'est un peu longuet, n'est-il pas ?). 

Ce vin ne ressemble pas un pinot bourguignon : la couleur est plus sombre que la plupart – j'ai bien écrit la plupart : oui, il existe des vins obscurs en Burgondie – et l'on ne retrouve pas la cerise, qu'elle soit rouge flashy ou noire ; pas plus que cette odeur de terre fraîchement retournée si émouvante. Ce vin ne ressemble pas non plus à la plupart des pinots languedociens, où l'on sent que le soleil n'a pas lésiné à la tâche. 

À l'aveugle, pour être honnête, je serais un peu perdu. Sur l'aromatique, on retrouve la framboise et le poivre blanc de la Syrah, mais sans les notes lardées/fumées. On a la mûre du Merlot, mais tellement d'autres choses à côté qu'il est difficile de placer ce vin en Bordelais. La bouche ronde/veloutée pourrait, elle, faire penser à un Bordeaux, si ce n'est qu'une telle fraîcheur devient rare dans la région.

Bon, vous l'aurez compris : ce vin ne ressemble globalement à aucun autre vin, même s'il provoque certaines réminiscences au fil de la dégustation. C'est un Pinot noir de Denois. Point barre. 

La robe est pourpre sombre, translucide.

Le nez est fin, profond, sur des notes fruitées (framboise, myrtille), florales (pivoine), épicées (poivre blanc), avec une légère touche végétale (ronce).

La bouche réussit à conjuguer ampleur et tension. Bâtie sur une fine acidité qui étire le vin au-delà même de la finale, elle ne manque pas de chair : ronde, veloutée, enveloppante, étonnamment dense pour un Pinot noir. Le fruit, éclatant, est omniprésent.

La finale dévoile une mâche affirmée, crayeuse à souhait, avec un retour en fanfare de la framboise de la mûre qui éclipsent tout sur leur passage. Et puis la craie revient, pour durer...

Ce vin est encore bien jeune pour être dégusté. Il gagnerait probablement à être attendu un an ou deux pour gagner en complexité. Mais le plaisir qu'il apporte dès aujourd'hui oblige son possesseur à faire preuve de self-control pour ne pas tout boire dans les six mois...