mercredi 31 octobre 2018

k-Briole : bienvenue au p'tit nouveau !


Il y a un nouveau vin dans la gamme du Clos Troteligotte. Il répond au sympathique nom de K-Briole. Ne comprenant pas de Malbec dans son assemblage, vous comprendrez qu'il ne peut pas avoir l'appellation Cahors.   C'est en effet une association rarissime de Cabernet franc et ... de Jurançon noir. Ce dernier est un cépage local, issu du croisement du Malbec et de la Folle blanche (on le retrouve dans You fuck my wine de Fabien Jouves). Ceci dit, ne vous attendez à trouver une aromatique déroutante. On reste sur du très classique. J'oserais dire que la vinif  (macération carbonique ?) a tendance à dominer les cépages.

Là encore, le vin présente du perlant à l'ouverture. A moins que vous adoriez les rouges pétillants, un bon secouage est nécessaire....

La robe est grenat translucide avec des reflets violacés. 

Le nez est charmeur, sur les fruits rouges et noirs bien mûrs, une petite pointe lactée (yaourt) et des épices grillés. La bouche, une fois dégazée, est ronde, tonique, avec une matière souple, fruitée et gourmande. L'ensemble est digeste et bien équilibré. 

La finale dévoile une mâche agréablement astringente, pleine de fruit, se prolongeant sur la mûre – légèrement yaourtée – et le poivre.


mardi 30 octobre 2018

Un match très Roques : Cabretta Vs Aurièges


C'est la première fois – hors salon – que j'ai l'occasion de déguster en même temps les deux grands vins blancs de la famille Roques : Cabretta 2017 du Mas d'Alezon et Les Aurièges 2016 du domaine de Clovallon. J'ai cru comprendre que Catherine – la il y az mère – s'occupait plus du premier et qu'Alix – la fille – gérait le second. Mais il y a des interactions/influences évidentes entre les deux. Que ce soit à Clovallon ou Alezon, on sent que les lignes bougent, avec des remises en question de part et d'autres. Ainsi, Cabretta revient en 2017 avec une plus grande protection en SO2 – en restant raisonnable –  histoire d'éviter les incidents qu'il y a pu y avoir en 2014/2015.  Quant à la cuvée Aurièges, elle est passée en "mode orange" en 2016. Je ne suis pas toujours fan de cette nouvelle tendance – il y a pléthore de vins improbables – mais en l'occurrence, c'est plus que réussi : c'est excellent. On est au sommet du genre !



Cabretta 2017 (21.90 €)

Clairette, Grenache et Roussanne 

(Vinification classique)

La robe est jaune paille, brillante.

Le nez est fin et profond, sur la poire, le citron confit, le beurre frais et une fine touche fumée/grillée.

La bouche est à la fois ample et élancée, déployant avec grâce une matière très douce, aérienne : une vraie caresse pour le palais. Cela n'exclue pas l'allonge et la tension, sans qu'il y ait besoin de faire appel à la moindre acidité perceptible (magie du schiste ?).

La finale prolonge le vin sans à-coup, tout en intensifiant les perceptions : une très fine mâche, une pointe d'amertume et un voile de gras sensuel – façon lard de Colonnata – qui vous enrobe tout ça. C'est bôôô !!!




Les Aurièges  2016 (14.90 €)

Chardonnay, Viognier, Riesling, Petit Manseng et Petite Arvine

(avec macération des peaux)


La robe est d'un or intense tirant vers l'orange, très légèrement trouble. 

Le nez est tout aussi intense, sur le terpène d'agrume – c'est le Riesling qui veut se faire remarquer – l'écorce d'orange séchée, la poire tapée et les plantes médicinales – style Chartreuse. 

La bouche est plus tendue que Cabretta – encore un coup du Riesling, mais peut-être aussi de la Petite Arvine ?  ou du Petit Manseng ?  – avec une grande  tension qui se poursuit  au delà-même de la finale. L'austérité est évitée grâce à une matière mûre,  dense, au toucher moelleux, exprimant un fruit à la limite du confit, tout en évitant le piège de la lourdeur. C'est en effet superbement équilibré, chacun des éléments ne prenant jamais le dessus sur les autres. 

La finale est explosive, donnant l'impression que votre palais a triplé de volume, jouant magnifiquement sur mon adoré Triple A : Acidité des trois cépages sus-nommés qui sert de colonne vertébrale, Astringence qui évoque l'écorce d'agrume ; et Amertume de la bigarade, du gingembre et du quinquina. Tout cela est subtilement dosé pour qu'il n'y ait rien d'agressif. On finit au contraire sur de l'aérien, de l'évanescent, avec une persistance sur l'orange amère et le citron noir d'Iran. Excellent !

Conclusion  : franchement, c'est difficile de les départager. J'aime autant l'un que l'autre, dans des styles très différents. Le premier est un vin de gastronomie qui s'accordera avec les mets les plus délicats (langoustines à peine cuites, voire crues, noix de Saint-Jacques) alors que le second appellera des mets plus puissants, charnus (homard, ris de veau, poularde...) et des sauces relevées. Tout au plus peut-on dire que le rapport qualité/prix d'Aurièges est un peu plus favorable. 

vendredi 26 octobre 2018

Chacun sa muse : la nôtre est liquide !


Devant nous réapprovisionner en Pot de vin rouge et en Malepère Prestige, nous en avons profité pour essayer la bulle muscatée du domaine qui s'appelle Muse de Guilhem. À peine arrivée, déjà testée – faut bien en parler un minimum sur le site. Eh bien on va dire que c'est une sacrée bonne pioche ! À mi-chemin entre Pépettes blanc et un Moscato d'Asti – 8 % d'alcool, 60 g/l de sucres résiduels – cette cuvée nous offre le meilleur du Muscat sans en faire trop. C'est fin, très gourmand. Le seul reproche que l'on puisse lui faire, c'est une trop grande buvabilité qui le rend sacrément dangereux : il faut un sacré self control pour ne pas s'enfiler toute la bouteille !...

La robe est jaune pâle avec un fin cordon de bulles.

Le nez est appétant, sur des notes muscatées : fruits jaunes (pêche, melon), fleur d'oranger, rose, verveine...

La bouche est éclatante de fraîcheur, avec une matière (très) fruitée et désaltérante qui se déverse dans le palais tel un torrent de montagne, tonifiée par des fines bulles crépitantes. On sent qu'il y a du sucre (60 g/l) mais il est parfaitement intégré et ne pèse pas du tout.

La finale dévoile une mâche savoureuse, finement astringente, avec un retour des notes florales/fruitées, mais aussi mellifères. Le sucre reste là encore très discret, "absorbé" par le perlant acidulé du vin. Le tout se prolonge sur la fleur d'oranger et le muscat.

Malgré la discrétion du sucre, je vois plus vin en dessert pour accompagner une tarte aux pommes (ou poire, abricot, pêche...) ou bien une salade de fruits (bien de chez nous, ou exotiques).


jeudi 25 octobre 2018

Le (joli) retour des cépages maudits * !


Il n'y avait pas eu en 2016 de cuvées Seibel et Bacco : suite à un événement climatique – gel ? grêle ? je ne me souviens plus trop – les rendements avaient été ridicules. L'équipe du Pic avait créé une cuvée inédite très confidentielle où tous les cépages hybrides avaient été assemblés. Je l'avais dégustée au printemps dernier lors de ma visite au domaine : c'était délicieux ! En 2017, retour à la "normale", donc. Si tant est que l'on considère ces deux cépages comme "normaux" ;-)

Stylistiquement, on est sur un style plus frais et fin que 2015 – ce qui me semble une bonne chose. Pour les habitué des deux cuvées, 2017 est plus proche de 2014 que 2012/2013.


Seibel 2017 (11.90 €)

La robe est grenat sombre aux reflets violacés.

Le nez est frais et gourmand, sur la quetsche, la cerise, les épices, et une fine touche résineuse/mentholée qui apporte du peps. 

La bouche est ronde, enveloppante, dotée d'une matière soyeuse, plutôt dense, exprimant un fruit à la fraîcheur éclatante. On est à l'antithèse du vin intello/prise de tête  : c'est juste du pur bonheur liquide ! 

La finale ne gâche rien, au contraire : finement mâchue, franchement savoureuse, avec un retour sur la quetsche et la cerise et toujours cette insolente fraîcheur. Un grand MIAM !


Bacco 2017 (11.50 €)

La robe est grenat très sombre, avec un violacé un peu plus marqué. 

Le nez a un côté "ténébreux", sur des notes d'encre, de goudron, de résineux/balsamique. Un peu végétal, aussi (rafle ?). Il plaira beaucoup à certains, en dérangera d'autres. 

La bouche est tendue par un "joli trait vert " – là aussi, il partagera les dégustateurs, perso j'aime beaucoup car on n'est pas dans un végétal trop marqué –  qui trace, et trace encore.  Il est enrobé d'une matière proche du Seibel : soyeuse/plutôt dense,  avec là aussi un fruit pur et éclatant qui se superpose au "trait vert", créant une belle dissonance qui aurait plu à Monk (le musicien, pas le personnage de série TV, quoi que, allez savoir...)

La finale est également proche du Seibel,  mais différente du fait de ce "trait vert" qui persiste et joue le rôle de colonne vertébrale. C'est d'ailleurs lui qui persiste – avec élégance –  une fois que le fruit a fait ses adieux. Ça me plait beaucoup, cette affaire ! Un cas d'école sur l'apport positif du végétal. 

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* Pourquoi maudits ? Parce que ces cépages obtenus au début du XXème siècle afin de résoudre le problème du phylloxera sans avoir besoin de porte-greffe – ce sont des croisements de vignes françaises et américaines – ont été abandonnés dans les années 30 au moment où les AOC furent créées. On les accusa de rendre fou car ils contenaient un peu de méthanol. En fait, il faudrait env boire des dizaines de litres pour que le méthanol contenu soit dangereux : vous mourriez d'abord d'un coma éthylique... Ce qui est drôle, c'est que l'Inra a concocté récemment des nouveaux hybrides basés sur le même principe qui sont maintenant autorisés à titre expérimental dans la plupart des AOP (à hauteur de 10 %). Ils présentent l'avantage – comme le Seibel et le Bacco – d'être plus résistants aux maladies et nécessitent donc moins de pesticides. 

mardi 23 octobre 2018

Pif is not dead !


Je n'ai pas eu comme Balasko des parents communistes, mais ils étaient tout de même bien gauchos, et l'abonnement à Pif Gadget fut une évidence. Je ne fus pas le seul gamin pifisé, puisque certains numéros furent tirés à un million d'exemplaires. Après avoir disparu plusieurs fois, il devrait renaître en novembre prochain. Alban Michel n'a pas attendu sa sortie pour lancer sa cuvée Pif 2018. C'est un assemblage de Syrah et Caladoc*. C'est pas vraiment du rouge,  pas non plus un rosé. Plutôt orange, si ce n'est qu'il est à base de raisins noirs (alors que les "oranges" sont issus de raisins blancs). Enfin bref, c'est du Pif, quoi. Et même s'il est "nature" comme tous les vins d'Alban, c'est le moins "nature "que j'ai pu boire depuis longtemps. 

La robe fait "vin orange", avec un robe entre le tuilé et l'ambré.

Le nez est fin, plutôt discret, sur la griotte, l'écorce d'orange séchée et quelques épices douces.

La bouche est ronde, de belle ampleur, avec une matière soyeuse et aérienne, un fruit frais – groseille à maquereau – croquant et digeste (12.5 % alc.) et puis une tension certaine qui apporte de la tonicité.

La finale est tonique, mêlant mâche gourmande et noble amertume (orange/quinquina), avec une persistance agréable sur l'amer, donnant l'impression que vous venez de boire un Spritz ou un Bitter.

Je ne sais pas quel sera le prix du nouveau Pif Gadget. Celui d'Alban est à 10 € tout rond :-)
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* Le Caladoc est une obtention de Paul Truel de l'Inra. C'est un croisement des cépages Grenache noir x Côt réalisé en 1958.


Ananto 2017 : la pépite conserve son éclat


La vie est parfois étonnante : j'ai ouvert cette bouteille d'Ananto 2017 le 16 octobre dernier suite au changement de millésime. Je regarde sur Blogger à quelle date j'avais découvert l'Ananto 2016. Et surprise : c'était le 16 octobre 2017. L'article s'appelait alors : Attention pépite ! Je pourrais employer les mêmes termes tant le 2017 suit les traces de son aîné. On reste sur une finesse et une fraîcheur rarement rencontrées en Espagne (il faut dire que les vignes sont plantées à 900 m d'altitude avec la mer pas trop loin : ça aide). Et puis, l'assemblage Bobal-Tempranillo n'est pas des plus courants : il faut encourager la bizarreté, histoire de ne pas se laisser envahir par le conformisme. Quant au consommateur, il fait une belle affaire : 5.50 € un vin pareil, ça ne devrait même pas exister. Une pépite, je vous dis !

La robe est grenat sombre translucide, aux reflets violacés.

Le nez est fin, frais, floral, sur la violette, la réglisse et les petits fruits noirs. Une touche de rafle, aussi.

La bouche est ronde, ample, soyeuse, avec une matière très fine,  presque aérienne et une fraîcheur inimaginable pour un vin espagnol. Il se densifie ensuite sensiblement, avec un fruit bien présent, et toujours la violette – légèrement fumée – en arrière plan.

La finale se fait plus "terrienne" sur une mâche finement crayeuse, avec un retour de la rafle, une touche de ronce et une pointe de fumée (un peu de bourgeon de cassis, aussi).

PS : il faut noter que le vin résiste bien à l'air : mes notes de dégustation ont été faites trois jours après ouverture – pas eu le temps avant. Il était encore meilleur ! Conclusion :une bonne aération ne pourra lui faire que du bien :-)


lundi 22 octobre 2018

Soirée au pied des Alpes


Mercredi dernier avait lieu la nouvelle "soirée Vins étonnants" à  Limoges. Le thème était  la Savoie et "appellations limitrophes", on va dire. Comme nous avions fait la Savoie il y a deux ans, j'ai surtout choisi des vins du Bugey, de l'Isère et du Grésivaudan. La plupart des cuvées n'étaient pas connues des dégustateurs, et c'est très bien ainsi ;-)


Avec les tapas (jambon de Corrèze, olives au parmesan, pancake au chorizo), nous attaquons la soirée avec deux premiers vins : le Brut Zéro 2016 de Nicolas Gonin et le Tracteur blanc 2017 de Thomas Finot

Le premier est une méthode traditionnelle 100 % Altesse (rarissime !) non dosée. On est sur une matière mûre, fruitée, avec de la tension et beaucoup de fraîcheur, encore renforcée par les bulles – très fines et toniques). Le tout est meilleur que pas mal de champagnes pour un prix nettement plus abordable (11.50 €). Et ça fonctionne impec avec les tapas. 

Le second est un assemblage (rarissime aussi !) de Chardonnay, Pinot gris et Jacquère. Comme sa comparse d'un soir, il présente un très bel équilibre entre maturité (fruits blancs et jaunes) et fraîcheur. C'est gourmand, généreux, et en même temps désaltérant. On en boirait facilement un peu trop, mais ce n'était pas le cas mercredi avec juste une bouteille pour 10 personnes... Là aussi, le prix est impeccable : 8.90 € !


L'entrée était un crumble de Saint-Jacques aux pistaches. Elle était servi avec un nouveau duo de vins : la Verdesse 2017 de Nicolas Gonin et l'Altesse 2017 de la cave Peillot

La première joue sur un registre fin et élégante, avec une tension qui vous ferait presque partir sur un Riesling. Mais c'est la finale incisive façon uppercut qui marque le dégustateur. Une sorte de gifle liquide (on comprend mieux pourquoi on l'appelle la Verdesse, car dans des années froides, ça devait être violent...). Ca fonctionne très bien avec le côté "doucereux" du plat à qui elle apporte un contrepoint tonique – et le plat arrondit le vin.

La seconde présente plus d'ampleur, de gras, de volume, tout en ayant une fine acidité qui l'étire joliment. Là, c'est plutôt l'aromatique presque "pétroleuse" qui fait penser au Riesling. Un très joli vin qui gagnera à vieillir quelques années s'épanouir totalement – on peut en dire autant de la Verdesse, d'ailleurs. 

Franchement, difficile de les départager, même si l'Altesse est plus "grand public" que la Verdesse. 

[Entre les deux plats, un Off dont je me suis fait la spécialité : les deux rouges du domaine des Ronces dont je vous parlais ICI. Le Trousseau a émerveillé (presque) tout le monde. Le Pinot noir, un peu moins, mais je pense qu'il a souffert du verre dans lequel il a été servi. ]


Avec un tartare de boeuf et des frites cuites au blanc de boeuf (rare en France !) nous avons dégusté un premier duo de vins rouge, en l'occurrence une battle de Persans. 

Le Persan 2016 de Thomas Finot a un nez encore dominé par les notes d'élevage en barrique. Mais c'est du très beau bois, ceci dit, et elles se marient bien avec les arômes fruités/floraux du cépage. En bouche, c'est d'une étonnante finesse, car le Persan a la réputation d'être plutôt rustique, dans un style nettement moins concentré que le 2015. Il faudra certainement être un peu patient avec ce vin, mais il devrait être très joli d'ici 3-4 ans une fois que le bois  sera totalement fondu.   

Le Persan 2016 de Nicolas Gonin était un hymne au fruit noir frais, éclatant, juste souligné par quelques épices. En bouche, c'est une bombe de fruit d'une insolente gourmandise, tout en ne tombant jamais dans la facilité et encore moins dans la vulgarité.  La finale a une belle mâche, mais elle est dominée par le fruit et la fraîcheur. Un vin qui a fait l'unanimité des convives et a desservi son adversaire d'un soir, pourtant valeureux. 


Deux fromages au programme : Morbier et Tomme de Savoie. Et deux autres vins rouges : une Mondeuse 2017 de Nicolas Gonin et un Tracteur rouge de Thomas Finot

Même si la structure de la Mondeuse est un peu différente de celle du Persan – moins d'alcool, un peu plus de fermeté – on retrouve la même pureté de fruit et cette fraîcheur éclatante. C'est absolument irrésistible !

De ce fait, le Tracteur rouge est un peu à la peine. Sa texture plus souple le dessert, et son fruit plus patiné fait presque éteint à côté de la mondeuse. Vous l'aurez compris : il faut boire ce vin tout seul. Là, je vous assure : vous vous régalerez !


En dessert, une tarte aux poire Amandine. Et un seul vin (raisonnables, nous sommes) : les Filles 2016 de Gilles Berlioz (100 % Roussanne). Un hymne à l'abricot rôti au beurre. La matière est charnue, avec un côté frais/croquant/pulpeux. L'ensemble est équilibré, sans lourdeur. Une belle façon de finir la soirée !

La prochaine fois : Bordeaux contre le reste de l'univers. 

jeudi 18 octobre 2018

Lous Grezes : une révélation !!!


Voici un domaine dont nous n'aurions jamais pu entendre parler tant il est discret et non reconnu par les "autorités compétentes". Il faut dire que IGP Cévennes, ça ne fait pas rêver grand monde... Il se trouve qu'un client professionnel britannique nous a demandé s'il ne pouvait pas avoir des vins de Lous Grezes sur la palette qu'ils nous a commandée. Il avait dégusté leurs vins sur un salon et en était tombé  amoureux. Nous contactons donc le domaine, nous lui demandons les tarifs, commandons les bouteille pour notre ami anglais, et prenons quelques cartons pour nous, histoire de voir s'ils seront aussi à notre goût.  

Au départ, j'avoue : j'étais un peu circonspect. Des vins qui ont le label S.A.I.N.S. provenant des Cévennes. On sentirait presque le poney avant même d'avoir ouvert la bouteille (oui, je sais, c'est pas bien... Mais j'ai été traumatisé par certains cévenols). Et puis en fait pas du tout : ces trois cuvées sont superbes, chacune dans leur style, et donne sacrément envie de découvrir les autres (plutôt moins chères) !

Pour l'histoire du domaine situé entre Alès et Nîmes et créé par un couple de Belges, je vous renvoie à leur site internet, plutôt complet. 



Treesor 2014 (16.50 €)

90 % Syrah, 10 % Grenache

C'est un jeu de mot car la vigneronne s'appelle Trees Lybaert

La robe est grenat sombre translucide. 

Le nez est superbe, tout en finesse, sur le cassis, le lard fumé, l'olive noire et la violette et une touche poivrée (très Rhône nord). 

La bouche allie ampleur et tension, déployant avec classe et sobriété  une matière soyeuse, aérienne – pleine de fruit et de fraîcheur – étirée par un fil invisible. L'équilibre est superlatif et vous laisse sans voix. 

La finale prolonge la magie sans la moindre interruption, avec juste une fine mâche savoureuse, et toujours ces notes lard, de violette et de poivre. Superbe



Alicia 2014 (16.90 €)

100 % Alicante Bouschet

La robe est grenat très sombre, presque opaque. 

Le nez est frais et tonique, sur des notes de fruits noirs, de camphre et de ciste. 

La bouche est longiligne, tendue par une acidité arachnéenne, avec une matière soyeuse, élégante, qui gagne progressivement en chair et densité. 

La finale acidulée a une mâche finement crayeuse, avec du fruit, des épices et toujours ces notes résineuses qui basculent presque vers le goudron (rappelant en cela Nuit d'Encre de Zélige-Caravant, également 100 % Alicante Bouschet)). 



Rancio 2007 (25.00 €)

Grenache élevé 10 en fûts sans ouillage

La robe est acajou translucide. 

Le nez est dominé par l'acidité volatile, mais en cherchant bien, on trouve du caramel, de la figue, du café, des épices... 

La bouche est méga-longiligne, avec une acidité traçante hors norme. C'est enrobé par une matière douce, caressante, très oxydative, évoquant un Verdelho ou un Sercial de Madère, l'alcool en moins.

La finale est fraîche, tonique – même à température ambiante – avec une palanquée d'épices qui vous tombe dessus, et le café, la liqueur de noix, le toffee... Magnifique. 




mercredi 17 octobre 2018

Domaine des Ronces : le Jura comme on aime !


J'ai découvert les vins du Domaine des Ronces à la Levée de la Loire en février dernier. J'avais adoré le Poulsard et le Trousseau. Hélas, Kevin Mazier n'avait quasiment pas apporté de vins blancs. J'ai eu l'occasion de les découvrir fin mars au Nez dans le vert, la rencontre annuelle des vignerons jurassiens bio. Et j'ai tout autant apprécié. Les voici donc enfin chez nous : ce que j'apprécie chez eux, c'est qu'ils ne ressemblent pas du tout à ceux que peuvent faire les autres vignerons du coin tout en gardant la gueule de l'endroit (la typicité jurassienne). Bref, à découvrir de toute urgence, tant que les prix restent (relativement) raisonnables et les vins disponibles... 


Trousseau 2016 (20.90 €)

La robe est très claire, entre vermillon et corail. 

Le nez vous happe instantanément par ses notes fumés/grillées ("façon Mailloche") qui se mêlent  à la rose fanée et à la ronce. Avec l'aération, le grillé a tendance à s'atténuer, laissant encore plus de place au floral. Quelle délicatesse. 

Au départ, il y a un peu de perlant (gaz carbonique). Contrairement à un rouge plus dense/tannique, ce n'est pas plus gênant que cela. Mais perso, je pense que c'est nettement mieux sans. Une fois le vin vin dégazé, donc, la bouche est de grande ampleur, avec une matière très aérienne . qui caresse  en douceur l'entièreté du palais. C'est d'une évanescence chambollienne tout en gardant une identité bien jurassienne par ces notes de lard fumé/épicé. Et puis un fruit pur, délicat,frais. Équilibre parfait.

La finale ne rompt pas le charme (ouf !) : on pourrait presque dire qu'elle n'est qu'une simple prolongation de la bouche. Mais elle est un peu plus que ça : elle en est sa quintessence, avec une concentration de la matière sans provoquer la moindre dureté. Et mieux : un  gras inattendu surgit de nulle part et vous enrobe tout cela avec voluptuosité, avec un retour de la rose fanée, soulignée par le poivre et le lard fumé.  Un vin proche du fascinant. 


Pinot noir 2015 (17.00 €)

La robe est claire, entre vermillon et rubis. 

Le nez "pinote" joliment sur la griotte confite, le marasquin, contrebalancés par des notes de rafle et d'orange sanguine, formant un tout harmonieux et vraiment classieux.

La bouche est ronde, souple et fraîche, avec une matière soyeuse faussement légère qui trace son chemin. Aromatiquement, on est toujours sur la cerise confite, équilibrée ici par une noble amertume (noyau, bigarade) plus que par l'acidité – même si le vin n'en manque pas. 

La finale là aussi prolonge la bouche sans la moindre rupture, avec une juste une densification de la matière et un renforcement des amers : le noyau et la bigarade se font encore plus présent, accompagnés par des notes d'humus, d'épices et de rafle.

Un vin qui se situe entre un Pinot bourguignon et ... un Domaine des Tours.


Florale 2015 (17.00 €)

100 % Chardonnay ouillé

La robe est jaune paille, brillante. 

Le nez est expressif, sur les fruits blancs – pomme, poire, coing – rôtis au beurre, la brioche toastée et même une touche exotique (ananas, banane flambée). 

La bouche est longiligne, construite sur une acidité traçante, faisant plus penser à un Chenin qu'à un Chardonnay avec ce coing encore bien présent. Elle est enrobée par une matière mûre, solide, limite tannique, aux accents rocailleux. Si l'aromatique évoque une grande maturité, celle-ci est équilibrée par le minéral  et les notes fumées

La finale est tonique, concentrée, séveuse, faisant la récap' des épisodes précédents avec juste ce qu'il faut d'amertume pour apporter de la niaque et allonger le vin, renforcée par des notes fumées/grillées. 


Chalasse 2015 (19.50 €)

70 % Chardonnay 30 % Savagnin ouillé

La robe est proche du vin précédent. 

Le nez est plus discret, avec une thématique assez proche – fruits blancs rôtis au beurre, épices – mais dans un style plus fondu, comme si tout s'était déjà harmonisé. Avec l'aération, l'agrume confit apparaît. 

La bouche trace droit, mais avec une acidité moins perceptible – mais bien là –  tant elle est enrobée par une  matière kolossale :  c'est charnu, gras, moelleux, mais pas lourd pour un sou car on sent un gros minéral en arrière-plan. 

La finale est très Chenin Triple A, avec le trio Amertume (bigarade/quinquina), Astringence (pamplemousse) et acidité (citron) ... et les insolents amers qui finissent par prendre le dessus. Selon les goûts, ça passe ou ça casse. Chez moi, ça passe haut la main avec félicitation du jury : c'est typique ce que j'adore !

(Jaeger) Defaix : Chablis Vs Rully


Voici deux nouveaux venus sur le catalogue de Vins étonnants produits par la même équipe avec le même cépage : le Chardonnay.  Le domaine Jaeger-Defaix est né au départ d'un héritage d'Hélène Jaeger, épouse de Didier Defaix qui co-dirige le domaine Bernard Defaix – à Chablis – avec son frère Sylvain. Elle est en effet originaire de Rully : son arrière-grand père, Henri Niepce, a beaucoup oeuvré pour la reconnaissance de cette appellation. Ce domaine né en 2002 et fait aujourd'hui 6 hectares. Il s'est converti à l'agriculture biologique en 2009. Les raisins vendangés à Rully sont vinifiés à la cave de Chablis (150 km plus au nord). C'est qui rend ce comparatif intéressant, même si les plus observateurs feront remarquer que 1- ce n'est pas le même millésime  et que 2 - le Chablis est vinifié/élevé en cuve alors que le Rully est vinifié/élevé en barrique (non neuves). Ils auront raison. Il n'empêche que cela permet de voir que le Chardonnay s'exprime différemment selon qu'il est cultivé dans l'Yonne ou en Saône et Loire. En cela, c'est pédagogique. 


Chablis 2017 (19.50 €)


La robe est or pâle, brillante. 

Le nez est fin et frais, sur le beurre citronné et la craie mouillée, avec une belle profondeur minérale. Avec l'aération des notes fumées apparaissent, mais aussi quelques embruns marins (les huîtres fossilisées se réveillent...). 

La bouche est élancée, tendue par une fine acidité traçante qui se prolonge au delà-même de la finale. Elle est enrobée par une matière ronde plutôt dense, entre "jus d'caillou" et jus d'citron, voire eau d'huître (en moins salée...). 

La finale est tonique, avec un joli  mix amertume/astringence – très écorce de pomelo – et se poursuit sur des notes crayeuse/salines/citronnées, sans que ce ne soit jamais agressif. 



La robe est un peu plus dorée que le précédent. 

Le nez n'a par contre rien à voir : il est plus expressif et complexe, mêlant harmonieusement les notes du Chardonnay (fruits blancs mûrs, miel d'acacia, noisette fraîche) à celle de la barrique (beurre noisette, pralin, café au lait). 

La bouche est ronde, (très) ample, enveloppante, déployant dans tout le palais une matière mûre à la chair dense. On retrouve une aromatique  fruits mûrs/notes boisées, tout en ayant une sensation d'équilibre et de fraîcheur – grâce à une acidité sous-jacente qui apporte de la tension. 

On retrouve cette dernière dans la finale généreuse – à qui elle donne du peps. Il y a également une noble amertume (bigarade/café) en contrepoint à la poire et à la pêche blanche. Le vin se prolonge agréablement sur les épices et les notes grillées. 

Les deux vins n'auront pas le même usage : le premier sera parfait avec des fruits de mer, un poisson grillé, un fromage de chèvre affiné ou tout simplement à l'apéro avec des toasts aux rillettes de maquereau (ou saumon). Le second se mariera avec des ris de veau caramélisés, un poisson de rivière ou une volaille légèrement crémés, et pourquoi pas des fromages à la pâte crémeuse ? 

lundi 15 octobre 2018

J'aime beaucoup les Pitchounettes !


D'après plusieurs articles – dont celui-ci du Point – le domaine Les 4 vents serait LE domaine dont on cause sur Crozes-Hermitage. C'est là que je vois que je suis complètement largué, car je n'en avais jamais entendu parler avant de le voir sur le tarif d'un "collectif de vignerons". Allez, on tente... Eh bien, bonne pioche : cette cuvée Les Pitchounettes 2017 est  vraiment très bonne, dans un style différent des vins de David Reynaud ou de Thomas Finot. Précisons que le vin est bio,  très peu sulfité,  et signé par deux sœurs,  Nancy et Lucie



La belle robe fait songer à une encre violette. 

Le nez est fin, élégant, pas du tout démonstrative, sur la pivoine, la myrtille, l'encens et une très légère pointe fumée/poivrée. Une touche d'olive noire, aussi, à l'aération. 

La bouche est ronde, ample, soyeuse, avec une matière fine qui vous caresse le palais. Elle gagne assez rapidement en densité pour aboutir à une chair veloutée, fraîche, alliant fruits et épices. L'ensemble est harmonieux et digeste – peut-être juste un peu trop facile à boire ? 

La finale possède une mâche savoureuse, gourmande, très typée Syrah  – poivre, lard fumé, réglisse - tout en restant dans le registre de la finesse et de la sobriété. Le tout se prolonge sur des notes salines et épices qui persistent assez longuement. 

Cela donne vraiment envie de découvrir le reste de la gamme – nous sommes ici sur le "petit vin". À suivre... 


vendredi 12 octobre 2018

Fernand Vaquer rouge : 1980, 1985, 1986 ou 1988 ?


Cela faisait évidemment un petit bout de temps que je voulais faire cette "verticale" du Fernand Vaquer rouge. Mais il me manquait toujours au moins l'un des quatre millésimes. Cette fois-ci on est au complet. Je me lance donc dans l'aventure...

J'avoue ne pas trop savoir où je vais, même si j'ai lu quelques compte-rendus ici et là. Je crois n'avoir jamais bu des rouges (secs) du Roussillon de trente ans et plus (et très majoritaires en Carignan). Si l'on s'en tient aux divers guides de vin, ces bouteilles sont censées être flinguées depuis longtemps. Qu'en sera-t-il ? 

L'ouverture des bouteilles n'est pas spécialement rassurante : deux bouchons s'effritent totalement. Il a fallu se servir d'un tournevis pour les déloger du goulot. La bouteille (1980) qui avait le bouchon le plus défaillent était clairement passée. J'en ai ouverte une seconde qui avait cette fois un bouchon nickel. C'est de celle-ci dont je vous parlerai. 



Vaquer rouge 1980 (36.00 €)

La robe est tuilée avec un peu de grenat, avec quelques fines particules en suspension (il y avait du dépôt au fond de la bouteille et je les ai mise à la verticale à la dernière seconde...).

Le nez fait plus "vieux vin" que les trois autres, avec des notes tertiaires plus marquées ; sous-bois, champignonnière, cuir, vieille prune, épices.

La bouche est ronde, ample, avec une matière veloutée, étonnamment dense, exprimant une fraîcheur étonnante au vu de son âge (38 ans) et de sa région (le Roussillon). Elle est bien équilibrée, avec un fruit encore bien présent  – mais aussi des notes tertiaires, évidemment.

La finale a une mâche expressive, sans dureté, avec un fruit mentholé/résineux qui vous ferait partir en Italie, et une prolongation sur les épices et les notes tertiaires.



La robe translucide est entre le grenat et le tuilé, avec quelque de lumineux (vraiment très jolie !)

Le nez est très beau, alliant intensité et complexité, plus proche d'un jus de parfumeur que d'un vin :  bois précieux, pralin, fruits confits, écorce d'orange séchée, épices.

La bouche est ample, soyeuse, déployant une matière d'une irréelle finesse avec une (ultra) fine acidité traçante en contrepoint  qui apporte de la tension. L'équilibre est superbe, avec une justesse confondante. Franchement, j'en crois à peine mes papilles tant je ne m'attendais pas à ce niveau.

La finale est totalement raccord, réussissant à ne pas rompre la magie. Les tanins sont présents, mais d'une grande finesse, avec une mâche subtile et savoureuse où se mêlent avec classe la vieille prune, l'écorce d'orange, le santal et les épices douces – qui persistent agréablement. Que c'est booonnn !






La robe est grenat translucide, avec une certaine évolution (mais pas tant que cela)/

Le nez est plus concentré et terrien que le 1985 tout en retrouvant la même gamme aromatique (avec un peu plus de fruit et de fraîcheur : cèdre, résine et boîte à cigare).

La bouche est un "mix" entre 1980 et 1985, avec une matière plutôt dense (mais soyeuse) mais une fraîcheur, un peps et une jeunesse que le 1980 n'a pas. On retrouve la tension et la vivacité du 1985, en plus vigoureux. Le style et l'aromatique ne sont bizarrement  pas éloignés du Médoc.

La finale est tonique, finement mâchue, avec une sensation juteuse/fraîche/gourmande des plus jouissives, plus "terrienne" que les 3 autres millésimes. On retrouve le tabac et même le menthol, confirmant le profil "médocain".

Avec l'aération, le vin devient plus aérien, se rapprochant du 1985 tout en gardant son style "bordelais").



Fernand Vaquer 1988 (23.50 €)

La robe est proche du 1985, avec le grenat qui l'emporte un peu plus sur le tuilé (et toute aussi jolie !)

Le nez  rappelle aussi le 1985,  mais avec un style plus aérien et plus frais: aux notes de pralin et de bois précieux s'ajoute une subtile touche de cassis qui apporte vivacité et jeunesse.

La bouche ne ressemble à rien de ce que j'ai pu boire : c'est une sorte d'explosion qui vous submerge le palais d'une matière arachnéenne d'une fraîcheur intense. L'équilibre atteint le merveilleux : vous avez l'impression que votre bouche triple de dimension pour contenir tout le mini-univers qui vient de se créer.

La finale est encore plus raccord que le 1985 : elle ne fait qu'un avec ce qui précède. Il y a juste à un moment un resserrement de la matière, et puis ça re-explose et vous submerge. Magique !


La dégustation s'avère très clairement au-dessus de mes espérances. Non seulement ces vins sont (très) bons, mais ils sont émouvants. Etant donné la variabilité des bouchons et l'âge des flacons, il est probable que les bouteilles que vous ouvrirez seront certainement différents (si elles sont carrément" mortes", on les remplacera). 

Il y aura peut-être plus de bouteilles commandées que ce que nous avons en stock. Mais pas de panique : nous nous réassortirons très vite !

jeudi 11 octobre 2018

Equilibre... superlatif !


En 2015, je n'avais pas trouvé mon com(p)te (Abbatucci) avec la cuvée Equilibre de Pero Longo. Le millésime lui avait apporté trop de maturité et de densité. Elle avait donc perdu ce style "bourguignon" que j'apprécie tant (et que l'on retrouve un peu dans Faustine). En février dernier, j'avais pu déguster le 2016 en avant-première et retrouvé le style aérien que j'apprécie dans cette cuvée.

La robe est grenat translucide avec une nuance légèrement tuilée.  On ne peut pas dire que le vin soit oxydé, mais – on le verra juste après – il est vrai qu'il ne ressemble pas à un vin de deux ans d'âge. On peut supposer que le vigneron n'a pas maintenu le vin en réduction durant son élevage. 

Le nez est d'une rare finesse, avec déjà ce que l'on appelle un bouquet : encens, fleurs séchées (rose, pivoine), confiture de vieux garçon (dans un style Guignolet/noyau), cuir de Russie.... 

La bouche est ronde, très ample et plus encore aérienne, déployant une matière quasi impalpable mais fraîche et fruitée. Pas un fruit ordinaire, mais "décadent" comme dirait François Mitjavile de Tertre Roteboeuf. Il ne faut pas prendre ce terme négativement. Comme l'explique mon ami vigneron, "c'est la splendeur ultime de Rome avant sa dégringolade". Le vin finit par gagner en densité tout en préservant sa fraîche verticalité. 

La finale joue les prolongations sans arrêt de jeu, avec un renforcement des Amers – très noyau, mais agrume, aussi – de l'Astringence – crayeux à souhait –  et de l'Acidité  – une de celle qui transperce le cœur et l'âme du dégustateur.  Eh oui, le fameux Triple A que je trouve plutôt d'ordinaire sur mes Chenins adorés ! Une combinaison gagnante qui me rendrait vite addict si je n'avais pas mon self control légendaire. Bien tenté, Satan, mais je suis incorruptible. Le serez-vous aussi ? 

À noter que cet Equilibre ne coûte "que" 12.90 €. Un exploit lorsque que l'on voit le prix de la plupart des cuvées insulaires. "Pourvu que ça doure..." disait une célèbre mama corse*.

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* On sait, hélas, que ça a mal fini.



mardi 9 octobre 2018

Quincy j'ose !


Je n'irais pas jusqu'à dire que j'ai une grande histoire d'amour avec Quincy, mais cette appellation me rappelle en tout cas pas mal de souvenirs. J'y ai en effet travaillé trois ans (1997-1998-1999) à m'occuper des vignes de deux petits domaines (dont les propriétaires étaient des céréaliers). Les vins étaient produits à la petite cave coop' locale en préservant l'identité de chaque domaine. 

Cela vaudrait certainement le coup de se pencher sur ce qui se fait aujourd'hui dans cette appellation – je sais que certains travaillent en bio. Mais pour l'heure, nous avons profité que la famille Fouassier – dont nous venons de rentrer quelques cuvées – proposait un Quincy (négoce). Cela permet d'en prendre quelques cartons au lieu d'une palette. Je précise que nous avons aussi pris un Pouilly-Fumé. Mais comme je n'ai pas trop accroché – une acidité un peu trop présente à mon goût mais qui devrait plaire à d'autres– je préfère ne pas m'étaler à son sujet.  Revenons au Quincy, donc...

La robe est jaune paille clair, brillante. 

Le nez est frais, gourmand, mêlant la pomme chaude légèrement beurrée au fruit de la passion, avec une très subtile pointe végétale (cassis, menthe).

La bouche est  élancée sans exclure une certaine ampleur, alliant une (très) fine acidité traçante à une matière ronde, mûre, charnue. Le fruit blanc est bien présent, mais aussi la groseille à maquereau et la baie de cassis. L'ensemble est frais et équilibré, sans que l'alcool ne ressorte – le bébé pèse tout de même 13.50 %. 

La finale est agréablement mordante, mêlant l'acidité du fruit de la passion à l'amertume du pomelo, avec le cassis (bourgeon et fruit) en arrière-plan. Le vin se conclue sur une fine astringence citronnée qui fait place nette  dans le palais. Ce grand vide vous incite à passer à la gorgée suivante. Et ainsi de suite... 

Si l'on veut être critique, c'est sans doute un peu cher pour un Quincy (15.90 €). Mais comme il me semble meilleur que certains Sancerre et Pouilly-Fumé plus onéreux, ce n'est pas une si mauvaise affaire que ça ;-)





vendredi 5 octobre 2018

Belle soirée autour des vins étrangers


Le "Club Vins étonnants" de Limoges a repris ses activités fin septembre. Au programme, que des vins étrangers, de l'ancien comme du nouveau monde. L'idée était avant tout de montrer que la France n'a pas le monopole des cuvées de grande qualité : on peut y produire des vins qui n'ont rien de caricatural ou d'excessif. 


Pour se mettre en appétit, il y avait des cookies au parmesan, des toasts au foie gras maison et des röstis de pommes de terre aux olives. Et pour une fois, je n'avais pas prévu une bulle. La plupart des membres du groupe ayant déjà dégusté nos bulles italiennes, je n'avais rien d'autres à leur proposer. J'ai donc innové avec un blanc de noir de Patagonie de la bodega Aniello (100 % Pinot noir). Son aromatique est assez proche de celle d'un champagne issu du même cépage. La bouche a volume, de la vinosité, mais aussi de la fraîcheur et de la tension. C'est vraiment très bon : tout le monde tombe sous son charme. L'accord se fait bien avec les différentes mises en bouche : à priori, on pourrait penser que c'est le foie gras qui lui convient le mieux, mais c'est également top avec les röstis (et ma foi très bien avec les cookies au parmesan). 


En entrée, Cédric nous a servi un croquant fondant de crevette sauvage et amande et son mesclun. pour l'accompagner, j'ai chois un Šipon C'est bon 2016 de Stanko Šek. Je l'avais dégusté en juillet dernier lors de son arrivée en France (lire ICI). Eh bien, il a sacrément évolué  depuis : beaucoup plus ouvert, plus rond, mais surtout plus complexe et plus profond. On a là un très joli vin de gastronomie qui ne ressemble à aucun vin français, tout en ne tombant pas dans le bizarre. Et je parierais que dans 2-3 ans, il sera encore meilleur. La difficulté est de ne pas tout boire avant. À 11.80 € la bouteille, ça me parait très bien placé, car il faudra souvent mettre plus cher en France pour avoir un vin de ce niveau. 


Le Cinsault Seriously cool  2016 signé Waterkloof (Afrique du Sud) sert un peu de prélude aux vins rouges qui vont suivre. Il est bu pour lui-même et ça lui va très bien ! Je vous en avais parlé sur le blog en juin dernier. Il avait alors mis plusieurs jours pour s'ouvrir. Cette fois-ci, j'ai tenté  3-4 h de carafe avec un peu d'agitation (4-5 fois durant ce laps de temps) et ... ça a fonctionné impec : il ressemblait au vin que j'avais alors beaucoup apprécié : écorce d'orange séchée, fruits rouges confits, notes florales ; bouche ample et aérienne, ciselée, finement tendue, très bourguignonne dans l'esprit. Le tout fait irrésistiblement penser à un vin d'Emmanuel Reynaud (Domaine des Tours) ou de Xavier Braujou (Pradel), même si pas tout à fait pareil. Il a beaucoup plu à tout le monde !


Nous sommes passé à la aux viandes avec du veau et du porcelet en basse température, une purée de pomme de terre maison (à se damner !) et une (délicieuse) sauce au merlot. Comme le chef m'avait annoncé le menu à l'avance, je me suis dit que rien ne conviendrait mieux qu'un Merlot de la Columbia Valley (état de Washington). Et c'est vrai qu'il convenait parfaitement. Rond, mûr, velouté, avec une belle complexité aromatique (prune, truffe, tabac) et surtout très bien équilibré, loin des clichés sur les vins américains. Il faut dire qu'il est cultivé sur le 45ème parallèle ... soit à la même hauteur que Bordeaux (alors que la Nappa valley correspond au nord du Maroc...). 


Avec les fromages –  tomme de montagne du Sancy, cantal entre-deux – , nous partons jusqu'en Australie avec un assemblage Cabernet-Sauvignon/Syrah  2013 de Matilda Plains. Le cépage bordelais apporte une fraîcheur aromatique et une tension qui équilibrent la fougue exubérante de son ami rhodanien. Le vieillissement de 4 ans en bouteilles lui a donné une patine aromatique très agréable : on retrouve avec plaisir le tertiaire du Cab'Sauv  (cèdre, tabac, cendre) qui se marie bien avec le lardé/fumé de la Syrah. Miam  !


Pour finir, nous revenons en Europe (pas de liquoreux de ces pays "exotiques" pour l'instant, hélas) avec un Riesling Marienburg Kabinett 2016 de Clemens Busch. Avec son acidité cristalline très mosellane, difficile d'imaginer qu'il contient autant de sucre que nombre de liquoreux français. On dirait un vin demi-sec avec 15-20 g de SR (il en a près de 80 !). Par contre, il est très léger en alcool (7.5 %) ce qui est très agréable en fin de repas. Avec une salade de fruits, c'est juste parfait. On en boirait des seaux (mais on reste raisonnable) !

C'est tout pour cette soirée : la prochaine fois, ce sera  Savoie-Bugey-Grésivaudan.