Cela faisait évidemment un petit bout de temps que je voulais faire cette "verticale" du Fernand Vaquer rouge. Mais il me manquait toujours au moins l'un des quatre millésimes. Cette fois-ci on est au complet. Je me lance donc dans l'aventure...
J'avoue ne pas trop savoir où je vais, même si j'ai lu quelques compte-rendus ici et là. Je crois n'avoir jamais bu des rouges (secs) du Roussillon de trente ans et plus (et très majoritaires en Carignan). Si l'on s'en tient aux divers guides de vin, ces bouteilles sont censées être flinguées depuis longtemps. Qu'en sera-t-il ?
L'ouverture des bouteilles n'est pas spécialement rassurante : deux bouchons s'effritent totalement. Il a fallu se servir d'un tournevis pour les déloger du goulot. La bouteille (1980) qui avait le bouchon le plus défaillent était clairement passée. J'en ai ouverte une seconde qui avait cette fois un bouchon nickel. C'est de celle-ci dont je vous parlerai.
Vaquer rouge 1980 (36.00 €)
La robe est tuilée avec un peu de grenat, avec quelques fines particules en suspension (il y avait du dépôt au fond de la bouteille et je les ai mise à la verticale à la dernière seconde...).
Le nez fait plus "vieux vin" que les trois autres, avec des notes tertiaires plus marquées ; sous-bois, champignonnière, cuir, vieille prune, épices.
La bouche est ronde, ample, avec une matière veloutée, étonnamment dense, exprimant une fraîcheur étonnante au vu de son âge (38 ans) et de sa région (le Roussillon). Elle est bien équilibrée, avec un fruit encore bien présent – mais aussi des notes tertiaires, évidemment.
La finale a une mâche expressive, sans dureté, avec un fruit mentholé/résineux qui vous ferait partir en Italie, et une prolongation sur les épices et les notes tertiaires.
Fernand Vaquer rouge 1985 (23.50 €)
La robe translucide est entre le grenat et le tuilé, avec quelque de lumineux (vraiment très jolie !)
Le nez est très beau, alliant intensité et complexité, plus proche d'un jus de parfumeur que d'un vin : bois précieux, pralin, fruits confits, écorce d'orange séchée, épices.
La bouche est ample, soyeuse, déployant une matière d'une irréelle finesse avec une (ultra) fine acidité traçante en contrepoint qui apporte de la tension. L'équilibre est superbe, avec une justesse confondante. Franchement, j'en crois à peine mes papilles tant je ne m'attendais pas à ce niveau.
La finale est totalement raccord, réussissant à ne pas rompre la magie. Les tanins sont présents, mais d'une grande finesse, avec une mâche subtile et savoureuse où se mêlent avec classe la vieille prune, l'écorce d'orange, le santal et les épices douces – qui persistent agréablement. Que c'est booonnn !
Fernand Vaquer rouge 1986 (23.50 €)
La robe est grenat translucide, avec une certaine évolution (mais pas tant que cela)/
Le nez est plus concentré et terrien que le 1985 tout en retrouvant la même gamme aromatique (avec un peu plus de fruit et de fraîcheur : cèdre, résine et boîte à cigare).
La bouche est un "mix" entre 1980 et 1985, avec une matière plutôt dense (mais soyeuse) mais une fraîcheur, un peps et une jeunesse que le 1980 n'a pas. On retrouve la tension et la vivacité du 1985, en plus vigoureux. Le style et l'aromatique ne sont bizarrement pas éloignés du Médoc.
La finale est tonique, finement mâchue, avec une sensation juteuse/fraîche/gourmande des plus jouissives, plus "terrienne" que les 3 autres millésimes. On retrouve le tabac et même le menthol, confirmant le profil "médocain".
Avec l'aération, le vin devient plus aérien, se rapprochant du 1985 tout en gardant son style "bordelais").
Fernand Vaquer 1988 (23.50 €)
Le nez rappelle aussi le 1985, mais avec un style plus aérien et plus frais: aux notes de pralin et de bois précieux s'ajoute une subtile touche de cassis qui apporte vivacité et jeunesse.
La bouche ne ressemble à rien de ce que j'ai pu boire : c'est une sorte d'explosion qui vous submerge le palais d'une matière arachnéenne d'une fraîcheur intense. L'équilibre atteint le merveilleux : vous avez l'impression que votre bouche triple de dimension pour contenir tout le mini-univers qui vient de se créer.
La finale est encore plus raccord que le 1985 : elle ne fait qu'un avec ce qui précède. Il y a juste à un moment un resserrement de la matière, et puis ça re-explose et vous submerge. Magique !
La dégustation s'avère très clairement au-dessus de mes espérances. Non seulement ces vins sont (très) bons, mais ils sont émouvants. Etant donné la variabilité des bouchons et l'âge des flacons, il est probable que les bouteilles que vous ouvrirez seront certainement différents (si elles sont carrément" mortes", on les remplacera).
Il y aura peut-être plus de bouteilles commandées que ce que nous avons en stock. Mais pas de panique : nous nous réassortirons très vite !
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