vendredi 29 mai 2020

Ça sulfit (3rd part) : on finit en beauté !


Je comprendrais que vous en ayez marre, des Ça sulfit.  Je vous rassure, c'est le dernier. Et pas le moins bon L'Ancienne cure est un domaine reconnu pour la qualité de ses liquoreux de Monbazillac. Il le démontre encore ici dans une version sans sulfites ajoutés. Il est probable que le vin a subi une filtration stérile pour éviter toute refermentation – à l'instar de Monbazar. Cela pourra hérisser les purs et durs, mais je préfère un vin débarrassé de ses micro-organismes plutôt qu'un vin foireux... 

La robe brillante évoque l'or en fusion.

Le nez est très expressif, sur la marmelade d'orange, le fruit de la passion et l'ananas rôti, avec un pistil de safran.

La bouche est élancée, pleine de fraîcheur, éparpillant avec bonheur une matière riche, confite à souhait, mais pas lourde pour un sou. On est toujours sur la marmelade d'orange et les fruit exotiques, complétés par le miel et le toffee.

La finale poursuit dans la lancée, avec un triple A comme nous les aimons tant à Vins étonnants : une Acidité vibrante très "citrique", une Amertume évoquant la bigarade, et une légère Astringence sur l'écorce de pomelo. Ce qui fait que le sucre passe comme une lettre à la poste : on pourrait quasiment boire ce vin à l'apéro !



mercredi 27 mai 2020

Ça sulfit (2nd part) : je vois rouge !


Comme je vous l'écrivais lundi, nous venons de recevoir trois nouvelles cuvées "Ça sulfit" de l'Ancienne Cure. Après le blanc évoqué avant-hier, voici le Pécharmant. Sa particularité, hormis de ne pas avoir de sulfite ajouté, est d'être issu très majoritairement de cabernets (40 % franc, 40 % sauvignon) et seulement 20 % de merlot. Cela lui permet de ne pas être trop fort en alcool (13.5 %) et de présenter une belle fraîcheur aromatique. Tout en n'en étant pas trop tannique et d'être accessible dès maintenant (avec une côte de boeuf sur le BBQ, par exemple). Et il ne devrait que s'améliorer dans les 5 ans qui viennent. Enjoy !

La robe est grenat très sombre, à la limite de l'opacité.

Le nez est fin, aérien, gourmand, sur les fruits noirs (cassis, mûre), le poivron rouge grillé, le menthol et le poivre blanc.

La bouche est ronde, ample, veloutée, avec une matière juteuse/pulpeuse qui vous tapisse tout le palais. Le fruit (cerise noire, mûre) est très présent, avec des amers (noyau) en contrepoint. Sinon, une belle fraîcheur d'ensemble, sans la moindre sensation alcooleuse.

La finale gagne en densité, avec l'apparition de tanins bien mûrs, et des amers (pépins, puis agrumes) qui se renforcent, sans tomber dans le dérangeant. On finit sur un crayeux bien marqué, complété par la cerise noire et le cacao en poudre.


lundi 25 mai 2020

Ça sulfit (1st part) : un bergerac très ligérien !


La cuvée Ça sulfit existe en rouge depuis deux ans. Elle est rejointe en 2019 par trois sœurettes qui ont toute en commun de n'avoir aucun sulfite ajouté (en fait, il y en  a même quatre, car il y a également un pétillant naturel que nous n'avons pas pris pour l'instant).  Il faut croire que Christian Roche se sent maintenant suffisamment à l'aise avec l'approche "nature" pour se diversifier ainsi. Il ne serait pas étonnant qu'à l'instar du Cèdre, il l'applique également à ses meilleures cuvées dans les années qui viennent.

Ce Ça sulfit blanc est issu à 80 % de sauvignon blanc et de 20 % de ... chenin. Cela devient en effet assez courant chez pas mal de producteurs (Barouillet, Tirecul la Gravière...), le chenin apportant plus de fraîcheur et de personnalité que le sémillon. Cela modifie profondément le profil du vin qui prend des allures ligériennes, alors qu'auparavant on était plus proche du Bordelais.  Pour une première, c'est une grande réussite, et ce ne sera pas la seule... 

La robe est d'un bel or brillant.

Le nez est très expressif sur la pomme et la poire tapées, le coing et la fleur de tilleul (très chenin, quoi).

La bouche est énergique, tendue et tonifiée par une fine acidité traçante, tout en déployant une matière ronde et mûre, assez dense, à l'aromatique confite où pointe déjà une certaine amertume (bigarade, quinquina).

Cette dernière se renforce en finale, complétée par la gelée de coing, et soulignée par une fine astringence crayeuse, apportant de la fraîcheur et du salivant, avec une persistance sur l'écorce d'agrumes (orange, citron).

On est donc loin d'un simple vin d'apéro à boire distraitement. Cette cuvée est plus destinés à des mets élaborés contenant si possible de l'agrume réduit/confit, dans un esprit sucré/salé (comme ces asperges, par exemple). 


vendredi 22 mai 2020

Tougris ou tout orange ?


Hier, j'ai dégusté Ordolia, le vin orange de Bonnet-Huteau. Et ce matin, en regardant la liste des vins blancs qui sont arrivés récemment, je vois Tougris du même producteur. Tant qu'à faire, me dis-je, autant parler des deux en même temps, d'autant qu'ils ont un point commun : le pinot gris. Ordolia est issu uniquement de ce cépage, tandis que Tougris est un assemblage de sauvignon gris (appelé aussi fié gris) et de pinot gris, avec une petite touche de chardonnay

Un point commun, donc, mais beaucoup de différences, que ce soit en couleur, texture, arômes... Deux personnalités affirmées, dans des registres quasiment antagonistes : le premier  fait dans la gourmandise friande et insolente, tandis que le second joue la carte de l'originalité, autant dans le ramage que le plumage. 
Tougris 2019 (9.00 €)

La robe est "or gris", brillante, avec de très fines bulles perceptibles.

Le nez est pimpant, sur le melon (de Bourgogne ?), la mangue et le bonbon acidulé.

La bouche est une explosion de fraîcheur, avec d'une part une matière ronde, friande, donnant l'impression de croquer dans le fruit, et d'autre part des milliers de micro-bulles qui crépitent sur la langue. L'ensemble est cohérent et d'une gourmandise irrésistible, sur la poire fraîche, le citron et des notes salines bien présentes.

La finale tonique est délicieusement mordante, mêlant l'écorce de pomelo à la pomme verte, avec une persistance sur le Schweppes®, le sucre en moins et la salinité en plus. 


Ordolia 2019 (24.50 €)

La robe brillante est entre le rose saumon et  la rose thé.

Le nez est fin, délicat, sur la pêche blanche; le thé Darjeeling, la rose fanée et une petite pointe d'agrume. 

La bouche est ample, aérienne, avec une matière plutôt dense (très jus de caillou) au grain tannique bien perceptible,  et un léger perlant qui titille agréablement la langue et apporte de la fraîcheur. L'aromatique navigue entre l'écorce d'orange et les petits fruits rouges (framboise, groseille).

 La finale gagne en concentration et puissance, avec des Amers et une Astringence qui se renforcent, et une Acidité qui jaillit, faisant office de colonne vertébrale. Bref, un Triple A des plus fougueux, entre pétales de fleurs séchées et écorce d'orange amère, avec une persistance sur des notes crayeuses et épicées.

mercredi 20 mai 2020

Mas de Blaise : le vin de l'apprenti sorcier


Je vous ai parlé à de nombreuses reprises des vins de Guillaume Bouvet, le sorcier savoyard qui sévit à deux pas de Faugères. Eh bien, Guillaume à un fils, Grégoire qui se lance dans le métier et se tient prêt à prendre la relève. Histoire de se faire la main, il a pu créer sa propre cuvée, le Mas de  Blaise, en assemblant des cépages qui n'ont pas l'habitude d'être vinifiés ensemble : le niellucio de corse (= sangiovese en Toscane), le caladoc ... de l'Inra (croisement grenache noir X malbec) et le grenache noir (le papa du caladoc, si vous avez suivi). Honnêtement, je m'attendais à un vin plutôt puissant et coloré, d'autant qu'il est vendu au double du prix de Désinvolte. Eh bien, pas du tout : il est fin et frais, avec une couleur quasi-bourguignonne. Vraiment, la famille Bouvet réussit toujours à vous surprendre (mais toujours en bien !). 

La robe est grenat translucide (plutôt "légère" pour un Languedoc).

Le nez est expressif, sur un panier de fruits rouges (à la fois frais et confits), avec une touche de menthol et une pointe d'épices (ou l'inverse).

La bouche est ronde, ample, avec une fraîcheur vivifiante qui se diffuse dans tout le palais, sur des notes de cerise bigarreau et de mûre. L'ensemble est digeste et parfaitement équilibré (malgré les 14 % d'alcool).

La finale est encore plus fraîche, acidulée même, sur la framboise et la griotte, avec une persistance sur le poivre blanc.

Je vous conseille de le servir à l'aveugle : m'est avis que les personnes testées vont patauger sévère pour retrouver les cépages et la région  (pas l'appellation, puisqu'il est en vin de France).


lundi 18 mai 2020

Navicelle Blanc : un souffle de fraîcheur en Provence


Je vous en avais parlé lorsque j'avais mis en avant la cuvée Bastien : nous avons cherché des successeurs en Provence aux Duperé-Barrera, ceux-ci ayant vendu leur affaire. Eric R a découvert le Domaine la Navicelle en février à Paris. et a commencé à le référencer il y a peu. Je n'ai pas encore eu le temps de tout déguster, mais ce  Navicelle blanc (100 % Rolle) est un vrai coup de coeur ! Sa fraîcheur est vivifiante sans être le moins du monde agressive. Mais ce n'est pas qu'un brumisateur à papilles : on sent qu'il y a du fond derrière, tout en étant d'une grande gourmandise. M'est avis que le risque d'addiction est élevé. Méfiez-vous de ce gaillard !... 

La robe est or pâle, brillante.

Le nez est fin et frais, sur les fruits blancs – pomme, poire–  les agrumes  – citron, pomelo –  et la craie humide – l'impression d'être dans une cave creusée dans la roche calcaire. Et une pointe d'anis, aussi – ambiance provençale oblige.

La bouche est élancée, énergique, tendue par une (ultra) fine acidité traçante, tout en déployant une matière ronde, fraîche, désaltérante, à la texture plus dense qu'elle n'y paraît au premier abord, presque pulpeuse. L'aromatique est dominée par le jus d'agrume, complété par la pomme fraîche, sans oublier une touche "caillouteuse". L'ensemble est très friand/gourmand et donne envie de se resservir (un peu trop, peut-être ?).

La finale poursuit sur la lancée, avec une fine mâche savoureuse (toujours sur le duo pomme/agrume), et une grande persistance sur des notes crayeuses et citronnées.


vendredi 15 mai 2020

Pinot noir Parducci : vraiment étonnant !


Les deux autres vins déjà référencés de Parducci  étant de très bonne qualité, nous avons osé prendre ce Pinot noir 2013. Toute la question était de savoir son niveau d'évolution. Allait-il être fringant ou sur le déclin ? Eh bien, plutôt fringant, en fait, même si le nez et la robe signent une évolution certaine. Mais en bouche, didiou, ça dépote ! Et quelle fraîcheur pour un vin californien!

La robe est rubis translucide, aux reflets tuilés. 

Le nez est fin et aérien, complexe, sur le marasquin*, l'orange amère, le pain grillé et l'encens. 

La bouche est ample, sphérique, avec une matière veloutée, caressante, à la fois aérienne et profonde, et une fine acidité apportant de la tension. Elle exprime un fruit d'une grande fraîcheur – griotte acidulée, agrumes –  tout en délivrant une palette tertiaire : boîte à cigare, sous-bois automnal, cèdre... Les tanins se font progressivement plus présents, dans un style délicieusement accrocheur.  

Toutes ces sensations se prolongent et s'intensifient en finale, avec un retour de l'orange amère et du marasquin, l'acidité de la griotte qui monte crescendo, et se concluent sur le bois précieux et les épices, puis une touche d'orange sanguine. 

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* liqueur à la saveur fine de cerises aigres (marasques)


mercredi 13 mai 2020

Chenin : vraiment dans l'Air du Temps !


Ben oui, je sais : encore un vin signé Jeff Carrel. Mais il faut dire que sa gamme est tellement large qu'il est difficile de passer à côté.Et puis, on ne peut contester qu'ils offrent souvent des rapports qualité/prix bluffants. Pour un caviste, c'est primordial car c'est ce que recherchent beaucoup de clients. 

Ce que j'apprécie également chez Jeff, c'est qu'il est  ... dans l'air du temps. Lorsque les rouges boisés et concentrés étaient à la mode, il proposait des vins  boisés et concentrés. Maintenant que c'est plutôt has been, il en propose encore quelques uns pour les nostalgiques, mais il privilégie le fruit et la finesse, comme les Grenadines ou  Sangiovese

En blanc aussi, l'évolution est flagrante depuis quelques années : moins de bois, plus de fraîcheur. Mais il franchit un nouveau pas avec ce Chenin 2019 : issu du terroir d'altitude de Limoux, il présente une incroyable vivacité pour un "blanc du sud" et pourrait passer sans problème pour un Vouvray. C'est vraiment le chenin comme on aime, avec juste ce qu'il faut de décapant sans tomber dans l'agressivité. Pour les Box que j'envoie chaque mois, je cherchais un blanc "vif et minéral" réclamé par de nombreux amateurs (à prix contenu). Je l'ai trouvé !

La robe est jaune très pâle aux reflets verts/argentés.

Le nez est très "chenin", sur la pomme et la poire fraîches, la fleur de tilleul et une touche mellifère.

La bouche est vive, éclatante de fraîcheur, avec une lame d'acier qui vous tranche le palais en deux, et une matière dense et minérale, d'une pureté cistercienne, entre citronnade et "jus de caillou". Je vous conseille de le boire pas trop frais  afin de faire ressortir ce côté caillouteux par rapport à l'acidité. Un léger perlant apparaît avec le réchauffement, renforçant  encore la fraîcheur du vin, s'il en était besoin ;-)

La finale poursuit dans l'acidité tonique, soulignée par l'amertume et l'astringence du citron et du pomelo. C'est cette dernière qui remporte par la partie, complétée par des notes salines/crayeuses.

Avec ce Chenin, vous pouvez oser les huîtres, les ceviches, le tartare de bar ou des poissons grillés juste arrosés d'un filet de citron. Avec les chèvres 1/2 sec, il sera également parfait. Je vous laisse découvrir le prix ICI, mais c'est cadeau :-)


mardi 12 mai 2020

Nuit gravement à la sobriété


Nous ne venons pas de recevoir ce Nuit grave 2017. Mais l'arrivée en fin de semaine du Caminarèm 2018 m'a fait songer que son aîné d'un an devait commencer à bien se goûter, venant de passer un nouvel hiver qui a dû lui l'arrondir et le complexifier. On est encore bien sûr loin de son apogée (comptez plutôt 10 ans), mais vous pouvez commencer à taper dans votre stock : vous vous ferez plaisir :-)

Par contre, INTERDIT de toucher à Caminarèm : c'est un pur infanticide !

La robe est grenat plutôt sombre, mais bien translucide.

Le nez est fin, complexe, sur la prune rouge, la fraise confite, le tabac et le zeste d'orange. Et plein d'autres trucs : olive noire, poivre, garrigue, encens...

La bouche est élancée, énergique tout en ne manquant pas d'ampleur, déployant une matière finement veloutée, au grain fin, mais dense. Elle dégage une impression de grande fraîcheur, essentiellement due à l'aromatique dominée par l'agrume et la cerise rouge, noyau inclus, complétés par des notes balsamiques. .

La finale possède une mâche gourmande, subtilement acidulée, avec un retour des fruits rouges et du tabac, et une persistance sur le poivre noir et le cacao amer (et l'orange amère, la rose fanée...)



dimanche 10 mai 2020

Arnaud Lambert ne bulle par pour rien...



Vous êtes maintenant nombreux à avoir dégusté les vins blancs et rouges d'Arnaud Lambert. Étant donné que nous devons nous réapprovisionner sans cesse, il faut croire qu'ils vous plaisent (je ne vous le reproche pas : je les aime beaucoup aussi !). Pour l'instant, nous n'avions pas référencé ses bulles.  Une dégustation nous avons prouvé que  nous avions tort : elles sont au niveau du reste (voire mieux ?). Les voici donc parmi nous. Il y en a trois, très différentes les unes des autres. Chacun devrait pouvoir trouver celle qui lui convient le mieux. 




Crémant de Loire (11.80 €)

60 % Chardonnay, 40 % Chenin



La robe est or pâle, brillante.

Le nez est frais, tonique, sur le zeste de citron, la craie humide, la pomme fraîche et une légère touche de coing.

La bouche est vive, élancée, avec une acidité traçante qui s'étire au-delà même de la finale, et une matière dense, incisive, à la fois fraîche/tonique et mûre/limite confite (pomme tapée, pâte de coing).

La finale est triple A++, avec l'Acidité qui gagne en intensité, une Astringence crayeuse qui vous fait mordre le calcaire ligérien et une Amertume sur l'écorce de pomelo et le citron. On est dans le décapant jouissif comme peuvent l'apprécier les amateurs de Brut Nature !







40 % Chardonnay, 60 % Chenin


La robe est or très pâle, limite argentée.

Le nez est fin, frais,  sur la crème pâtissière au citron et  la craie humide.

La bouche est ronde, enveloppante, avec des bulles fines et diffuses qui apportent l'acidité et la dynamique nécessaires, formant un ensemble sobre et élégant.

La finale est de belle intensité, alliant les notes citronnées et crayeuses, suivies d'une amertume très cheninesque (bigarade, quinquina).



Crémant de Loire 1948 Brut Nature 2016  (19.90 €)

100 % Chenin 

La robe est un peu plus dorée (mais de pas grand chose)

Le nez est  expressif, mais classe, avec de la retenue, sur l'écorce d'agrumes, le coing, le mousseron (assez chablisien dans l'esprit).

La bouche allie ampleur et tension,  avec une matière dense, minérale, généreuse mais très ronde, englobante, et une acidité ciselée, délicate mais profonde, des micro-bulles caressantes et crémeuses . L'ensemble est une merveille d'équilibre.

La finale est longiligne, très concentrée, avec un crayeux très marqué relevé par un citron d'une grande pureté, avec un prolongement sur le salin. Extra !



mercredi 6 mai 2020

Pinon 2019 : l'acidité est de retour !


Lorsque les températures oscillaient en juin 2019 et entre 35 et 45 °C, on commençait à se dire que c'était mal barré pour le millésime à venir. Allait-on avoir un 2018 en pire ? En fait, le temps a été raisonnablement chaud à partir de mi-août, avec des nuits plutôt fraîches. Et c'est cela qui compte pour la maturité des raisins. Peut-être aussi que les vignerons "échaudés" par le millésime précédent se sont jurés de ne plus se faire avoir par la vigne malicieuse ? En tout cas, on peut constater dans toute la France de très beaux équilibres. Et puis – ce qui est chouette pour l'amateur –  une buvabilité immédiate. 

Chez Julien et François Pinon, nous retrouvons les sensations éprouvées sur les 2015 qui nous avaient convaincu de référencer le domaine. L'acidité est magnifique, sans être jamais agressive. Les amers sont bouleversants. On est vraiment dans le chenin dans ce qu'il a de plus beau. Paradoxalement, c'est le Vouvray sec qui est le moins prêt pour l'instant, car il est vraiment sec. Je conseille d'attendre deux trois ans avant de les attaquer. 


Vouvray sec 2019 (14.00 €)

Le nez est fin et expressif, sur la poire mûre, la fleur de tilleul, avec une pointe de miel et de coing.

La bouche est élancée, étirée par une acidité vive et tonique, tout en déployant une ronde et fraîche, finement pulpeuse, sur un mix aromatique entre le pamplemousse et la pomme verte, et toujours le coing en arrière-plan.

La finale dévoile une belle mâche crayeuse et citronnée, avec toujours cette acidité qui l'étire, dans un style plus transperçant. Il y a également de superbes amers si typiques du chenin (écorce d'agrume).Ce sont ces derniers qui persistent le plus longuement, avec une ultime touche citronnée.



La robe est jaune pâle, brillante, avec des reflets argentés.

Le nez est plutôt discret, sur des notes d'agrumes confits et de pâte de coing.

La bouche allie ampleur et tension, avec une matière dense et mûre qui vous enrobe le palais et une ultra-fine acidité qui étire le tout au maximum. La fraîcheur est apportée d'une part par un léger perlant des plus bien venus, et une superbe aromatique sur l'agrume confit (cédrat, pomelo, orange) qui apporte de la profondeur (et beaucoup de bonheur !).

La finale est une explosion jouissive, entre l'Acidité qui monte d'un gros cran, l'Amertume au maximum de sa noblesse, et l'Astringence dans ce qu'elle a de plus excitant. Bref un Triple A+++ jubilatoire qui vous fait penser une fois encore que le chenin est le plus beau cépage du monde – Mince, c'était pas le riesling ?



La robe est jaune pâle, brillante.

Le nez est assez discret, là aussi,  tout en montant encore d'un cran dans le côté confit : en plus des agrumes confits et de la pâte de coing, il y a aussi la tarte Tatin qui sort du four.

La bouche gagne encore en richesse, en ampleur  et en intensité, tout en gardant la même tension. La matière est un peu plus dense que Trois argiles, mais aussi plus fraîche aromatiquement (on revient à la pomme verte et au pomelo du Vouvray sec mais en plus appuyé).

La finale est encore plus Triple A, faisant exploser tous les compteurs, avec une fraîcheur monumentale sur une palette infinie d'agrumes, et le coing dans tous ses états. Rien moins qu'exaltant !

mardi 5 mai 2020

Coume... ils vous plairont ! *


Pour une fois, les deux Coume(s) du Mas Mudigliza sont arrivés en même temps. Cela permet de les déguster ensemble et de faire un billet commun. Cela se confirmera encore dans les prochaines semaines : 2019 est vraiment un millésime TOP malgré les frayeurs caniculaire de juin. Cela se confirme ici, avec un blanc très bien équilibré, et un rouge qui réussit à être la fois généreux, complexe ... et digeste. Croisons les doigts pour que 2020 soit dans le même esprit ! 



100 % Grenache gris

La robe est jaune ultra-pâle, limite blanc aux reflets argentés.

Le nez est discret, sur la poire fraîche, le zeste de citron et la craie humide.

La bouche est ronde, fraîche, gourmande, dans un style très naturel et désaltérant, s'écoulant dans le gosier comme une eau bienfaisante. Certains pourront juste lui reprocher une relative neutralité aromatique (fruits blancs, pierre mouillée). Mais c'est justement ce qui me plaît : c'est reposant !

La finale est subtilement mordante, mêlant l'astringence de la pomme verte à une astringence citronnée, sans la moindre agressivité papillaire. C'est simplement guilleret et dessoiffant. Et donne diablement envie de se resservir !


Coume des loups rouge 2019 (9.95 €)

35 % Syrah, 35% Carignan Noir et 30% Grenache Noir

La robe est pourpre très sombre, limite opaque.

Le nez expressif évoque le coulis de fruits noirs relevé de poivre et de cacao.

La bouche est très ample, sphérique, déployant une matière finement veloutée, caressante, qui vous envahit le palais. Une belle tension est apportée par l'aromatique fraîche et amère, pleine de peps. Aux fruits noirs s'ajoutent le noyau et le chocolat (très) noir. Un peu de garrigue, aussi, dans le côté "résineux" (ciste).

La finale prolonge ces sensations tout en intensifiant l'amertume dans un registre qui réussit à être sexy :  c'est intense, séveux, sur la cerise noire , avec un cacao poivré qui persiste longuement.




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* Les plus observateurs auront remarqué un hommage au grand Will ;-)


lundi 4 mai 2020

Roc & Lune : ZE rosé


On parle souvent de deux types de rosés : les très pâles, d'obédience provençale, même s'il s'en fait maintenant un peu partout, y compris à Bordeaux. Et les très colorés, de type "clairet", provenant surtout du Sud-Ouest. Les premiers sont très proches des vins blancs, avec souvent un peu plus d'épices, dus à la syrah ou au grenache noir. Ils ont surtout leur place à l'apéritif, ou peuvent accompagner sushis et tapas. Les second sont à l'inverse très fruités, parfois même un peu trop. Et l'on ne sait pas trop quoi en faire (grillades ? ?). Cela explique qu'ils se vendent de plus en plus mal.

Mais il existe une troisième catégorie, moins fréquentée, et qui est pourtant la plus intéressante : ce sont les rosés "saumonés" dont le chef de file est incontestablement le Tavel. Ils ont plus de personnalité que les premiers sans avoir le côté "coulis de framboise" des seconds. Ils sont très épicés, vineux, avec de la sève et des notes d'écorce d'orange. Ils ont un véritable intérêt gastronomique puisqu'ils s'accordent superbement avec des plats qui "massacrent" les blancs comme les rouges : à savoir toutes les recettes du sud avec de la tomate et de l'ail, voire du safran (bouillabaisse),  mais aussi les paellas, certains tajines...

Ce Roc et Lune provient du domaine qu'a la famille Bertrand à Montpeyroux (dont viennent aussi Le 5 et Roc et Lune rouge). Il est issu de carignans centenaires, ce qui est rare pour un rosé. 

La robe est entre le rose saumon et l'oeil de perdrix. (pas du tout vegan*, donc).

Le nez intense évoque la fraise confite, l'orange séchée, le caramel aux épices...

La bouche est ronde, très ample, déroulant une matière douce et concentrée, vineuse, qui vous caresse le palais, tout étant porté par une trame séveuse d'épices et d'agrume, servant de colonne vertébrale et de booster. L'ensemble est dynamique, racé ... et enthousiasmant !

La finale corsée et tonique confirme ces impressions, avec un retour de l'orange (amère) et de la fraise confite, et une grande persistance sur les épices (dont le cubèbe et le timut).

On peut certainement trouver quelques Tavel(s) supérieurs à ce Roc et Lune. Mais il risque de valoir facilement le double, le vin du jour n'étant vendu que 7 euros, ce qui me semble imbattable dans la catégorie. 
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* En fait, le vin pourrait être certifié vegan puisque le domaine n'utilise pas de produits d'origine animale pour le collage