dimanche 6 janvier 2013

Emmenez-moi au bout du terret : je viens avec vous !

On trouve parfois dans certains vins blancs du Languedoc un peu de Terret-Bourret, mais c'est très rare de le trouver en mono-cépage. Les Bojanowski ont osé le faire, alors qu'il n'a plus vraiment la cote dans la région. Fut une époque, c'était pourtant LA star..

Contrairement à la plupart des autres cépages, on retrouve sa trace dans le Languedoc depuis l'Antiquité. Au XVII-XVIIIèmes siècles, il couvrait une bonne partie de la région car il servait à la production d'eau de vie (qui nécessite des vins fins, pas trop typé, avec une bonne pureté aromatique). Les deux siècles suivants, il fut à la base des célèbres Vermouth (Noilly-Prat, Saint-Raphaël). Comme eux, il a tendance aujourd'hui à disparaître, remplacé par des cépages plus séducteurs comme le Muscat, la Roussanne ou le Viognier. Comme le Carignan, il est très productif en plaine (il peut dépasser les 100 hl/ha) mais sur des coteaux caillouteux, il est beaucoup plus raisonnable, et donne alors le meilleur de lui-même.

Précisons que comme le Grenache, il se décline en trois couleurs : noir, blanc et gris. Au Clos de Gravillas, c'est le gris qui est utilisé (comme sur la photo).

En 2006, Nicole et John n'avaient qu'une toute petite parcelle de Terret. Ils l'imaginaient donc assemblée dans l'Inattendu pour apporter un peu de fraîcheur aux Grenaches . Mais le goût "caillouteux" du 2006 (jamais commercialisé), ainsi que sa légèreté leur ont donné l'idée d'utiliser ces jus pour faire une "cuvée a part" : Emmenez-moi au bout du Terret. Les réactions positives de leurs voisins "du pays" en goûtant le 2007 ont convaincu John et Nicole que 600 bouteilles de cette nouvelle cuvée n'étaient pas assez. Ils ont pu trouver et avoir deux parcelles complémentaires. Il a fallu quelques millésimes pour trouver le juste équilibre. La maturité du Terret est très tardive, comme le Carignan. Les Bojanowskis passent TROIS fois dans chaque parcelle, ne récoltant que les baies bien roses. Le Terret n'est pas seulement tardif, mais extrêmement hétérogène, avec des grappes ayant des maturités très diverses – certains à point tôt, d'autres trois semaines plus tard.

Le  vin est élevé dans des fûts Stockinger de 5 hl, qui ne marquent pas le vin aromatiquement, mais apportent beaucoup en structure et texture (les blanc d'Arretxea ou de Lapeyre sont élevés dans des fûts identiques).

Il faut noter que le Terret offre l'avantage de produire peu de sucres. Même en le récoltant bien mûr, les vins ne dépasse pas les 12.5 ° d'alcool.


La robe a une jolie couleur dorée 

Le nez laisse percevoir à la la fois la maturité et la fraîcheur, avec beaucoup de finesse : pêche, notes citronnées, pierre mouillée (craie).

La bouche est ample, avec une attaque vivifiante (on est envahi par une vague de fraîcheur), avec un très léger gaz qui titille agréablement la langue, et surtout une belle tension qui lui apporte de la droiture. En même temps, on sent une matière riche, presque grasse. L'ensemble est d'un équilibre remarquable.

La finale sur le fruit de la passion est  savoureuse avec une fine astringence, et mâche "calcaire" assez jubilatoire qui vous fait claquer la langue. Un vin gourmand et désaltérant, qui pourra tout aussi bien être servi à l'apéritif qu'avec des poissons grillés.

Il gagne à être servi à l'aveugle : vos invités risque de se planter sacrément sur l'origine ;-)

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