mardi 18 septembre 2012

Couleur de la peau = couleur du vin ? Pas si simple (2)



Bon, je sais que pour certains, le rosé n'est pas vraiment du vin, mais il ne faut pas en dégoûter les autres. Hier, nous avons vu que l'on pouvait faire du vin blanc avec des raisins rouges. Aujourd'hui, nous allons voir qu'il est aussi possible de les transformer en rosés avec trois méthodes différentes.

Les rosés de pressée



Ils sont fait dans le même esprit que les blancs de noirs évoqués hier, sauf que la peau a coloré un peu plus le moût durant la pressurage. On obtient alors une couleur rose pâle, comme ce rosé En caractère des Dupére-Barrera (notons qu'il y a dans l'assemblage un petit peu de raisin blanc : du Vermentino). C'est la tendance forte du moment. Alors que cela ne se pratiquait auparavant que dans le Sud Est de la France, d'autres régions s'y mettent, car c'est la couleur préférée de ces dames...

Les rosés de saignée


C'est la méthode la plus utilisée en France (dans le Sud-Ouest, en Loire, en Bourgogne, etc...). Elle consiste à mettre les grains de raisin en cuve comme pour faire un vin rouge. Le jeu consiste alors à rester à côté du robinet de dégustation afin de se servir régulièrement un verre de moût et d'observer sa couleur. Ca peut durer 12, 24 ou 48 heures (prévoir un lit de camp). Lorsque la couleur vous plait, vous transférer une partie ou l'intégralité du moût * dans une autre cuve. Et vous poursuivez alors la fermentation alcoolique comme si c'était un vin blanc.


Ainsi sont faits les Clauzes de Jo, les Charmilles,  le Rosé qui touche ... et le Rosé de saignée de Pinot Meunier de Laherte. Celui-ci va me servir de transition vers la troisième catégorie, réservée à la Champagne.

Les rosés d'assemblage

En 2009, il fut question d'autoriser en Europe l'assemblage de vins rouges et de vins blanc pour en faire du rosé. La réaction du monde agricole (et de leurs députés) fut tellement hostile que le projet capota. Peu ont alors souligné que cette pratique était courante en Champagne depuis des lustres sans que cela ne dérange personne.


La plupart des Champagnes rosés sont en effet issus d'assemblages : en général 85 à 90 % de Chardonnay, complété par 10 à 15 % de vin rouge (souvent Pinot Noir). Tout dépend de la teinte finale que le vigneron veut obtenir, mais aussi l'aromatique : plus le vin contiendra de vin rouge, plus les arômes fruités prendront le dessus, même s'ils ne seront jamais aussi intenses qu'avec un rosé issu de saignée.

Vous allez me dire "intéressant ton topo, mais à quoi ça sert ?"  Eh bien, autant vous avez intérêt à garder les rosés d'assemblage, car le Chardonnay vieillit admirablement (plus de 20 ans sur des rosés de bon niveau). Autant ça ne sert pas grand chose de conserver les rosés de saignée, car ils ont été conçus pour "péter le fruit". Une fois que celui-ci aura disparu, ce n'est pas dit qu'il reste grand chose d'intéressant **.



Et les accords gastronomiques seront très différents. Autant le rosée de saignée sera restreint à l'apéritif et aux desserts aux fruits rouges, autant un rosé d'assemblage avec un peu de bouteille conviendra aux plats exotiques, que ce soit des crevettes Thaï ou un tajine d'agneau, mais ira aussi avec une volaille comme de la pintade aux pommes et au chou rouge, ou une vieille mimolette. Nous pouvons ainsi vous proposer la Cuvée rosée Prestige de Tarlant 2000, qui a reposé 10 ans sur lattes avant d'être dégorgée en octobre 2011. Une petite merveille pour le prix d'un Brut ordinaire d'une "grande" maison.

Dans la troisième partie, nous nous pencherons sur les cas un peu hors-normes...

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* l'idée de départ de beaucoup de rosés de saignée, c'est en fait de concentrer les cuves de vins rouges en modifiant la proportion jus/marc. On prélève en général entre 10 et 20 % de la cuve. Mais il existe des producteurs qui font des rosés de saignée en utilisant 100 % du jus d'une cuve. 


** comme d'hab' il peut y avoir des exceptions à la règle. Par exemple, les Cabernets d'Anjou qui sont très fruités dans leur jeunesse, vieillissent d'une façon incroyable. En témoigne la collection de vieux millésimes du domaine de Bablut disponible ICI

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