jeudi 25 octobre 2018

Le (joli) retour des cépages maudits * !


Il n'y avait pas eu en 2016 de cuvées Seibel et Bacco : suite à un événement climatique – gel ? grêle ? je ne me souviens plus trop – les rendements avaient été ridicules. L'équipe du Pic avait créé une cuvée inédite très confidentielle où tous les cépages hybrides avaient été assemblés. Je l'avais dégustée au printemps dernier lors de ma visite au domaine : c'était délicieux ! En 2017, retour à la "normale", donc. Si tant est que l'on considère ces deux cépages comme "normaux" ;-)

Stylistiquement, on est sur un style plus frais et fin que 2015 – ce qui me semble une bonne chose. Pour les habitué des deux cuvées, 2017 est plus proche de 2014 que 2012/2013.


Seibel 2017 (11.90 €)

La robe est grenat sombre aux reflets violacés.

Le nez est frais et gourmand, sur la quetsche, la cerise, les épices, et une fine touche résineuse/mentholée qui apporte du peps. 

La bouche est ronde, enveloppante, dotée d'une matière soyeuse, plutôt dense, exprimant un fruit à la fraîcheur éclatante. On est à l'antithèse du vin intello/prise de tête  : c'est juste du pur bonheur liquide ! 

La finale ne gâche rien, au contraire : finement mâchue, franchement savoureuse, avec un retour sur la quetsche et la cerise et toujours cette insolente fraîcheur. Un grand MIAM !


Bacco 2017 (11.50 €)

La robe est grenat très sombre, avec un violacé un peu plus marqué. 

Le nez a un côté "ténébreux", sur des notes d'encre, de goudron, de résineux/balsamique. Un peu végétal, aussi (rafle ?). Il plaira beaucoup à certains, en dérangera d'autres. 

La bouche est tendue par un "joli trait vert " – là aussi, il partagera les dégustateurs, perso j'aime beaucoup car on n'est pas dans un végétal trop marqué –  qui trace, et trace encore.  Il est enrobé d'une matière proche du Seibel : soyeuse/plutôt dense,  avec là aussi un fruit pur et éclatant qui se superpose au "trait vert", créant une belle dissonance qui aurait plu à Monk (le musicien, pas le personnage de série TV, quoi que, allez savoir...)

La finale est également proche du Seibel,  mais différente du fait de ce "trait vert" qui persiste et joue le rôle de colonne vertébrale. C'est d'ailleurs lui qui persiste – avec élégance –  une fois que le fruit a fait ses adieux. Ça me plait beaucoup, cette affaire ! Un cas d'école sur l'apport positif du végétal. 

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* Pourquoi maudits ? Parce que ces cépages obtenus au début du XXème siècle afin de résoudre le problème du phylloxera sans avoir besoin de porte-greffe – ce sont des croisements de vignes françaises et américaines – ont été abandonnés dans les années 30 au moment où les AOC furent créées. On les accusa de rendre fou car ils contenaient un peu de méthanol. En fait, il faudrait env boire des dizaines de litres pour que le méthanol contenu soit dangereux : vous mourriez d'abord d'un coma éthylique... Ce qui est drôle, c'est que l'Inra a concocté récemment des nouveaux hybrides basés sur le même principe qui sont maintenant autorisés à titre expérimental dans la plupart des AOP (à hauteur de 10 %). Ils présentent l'avantage – comme le Seibel et le Bacco – d'être plus résistants aux maladies et nécessitent donc moins de pesticides. 

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