Sincèrement, je vis l'une des expériences les plus passionnantes qui soient. Être "obligé" de boire des quilles quotidiennement plus étonnantes les unes que les autres bouleversent en permanence ma conception de ce que doit être un vin. Enfin, ma conception consiste surtout à n'en avoir aucune. Faire des classifications n'a pas trop de sens, les frontières entre vins blancs, vins rouges, vin rosés et oranges étant parfois des plus ténues. La seule chose dont on soit sûr, c'est que l'on a affaire à du vin. Et encore, parfois, ça n'y ressemble même pas – en tout cas, à l'idée qu'on s'en fait). Je pense en particulier à LUI et à LUI, deux véritables Objets Vinicoles Difficilement Identifiables.
Bon, tout ces prolégomènes pour arriver au vin du jour qui me laisse pantois. Car j'ai l'impression qu'une nouvelle catégorie vient de naître, rien que pour lui : pour faire simple, on l'appellera tout simplement Rocalhan.
C'est censé être un vin blanc, vu qu'il est à base de Roussanne et de Rolle. Sauf qu'il arbore une robe presque cuivrée qui ferait plutôt penser à un vieux liquoreux, les larmes en moins. Et qu'il est complètement sec.
On pourrait dire que c'est un vin "oxydatif", mais pas vraiment. D'abord parce que même s'il a été peu protégé durant son élevage, il n'a pas pris le voile, mais il n'est pas totalement oxydé non plus (sinon, la robe serait acajou). Ici, l'aromatique tourne autour de l'abricot et de la pêche séchés, avec une touche de miel de châtaignier et de caramel au beurre salé.
Malgré la couleur, ce n'est pas non plus un vin orange. Il n'y a pas eu de macération avec les peaux. Et même si le vin est très intense, il n'a pas du tout le côté tannique des vins oranges. Au contraire. À condition de le servir à 16 °C, vous aurez un vin très ample, d'une grande douceur tactile, très enveloppante, presque plus "gazeux" que liquide, pénétrant sans violence chaque cellule de votre palais. À l'insu de votre plein gré, vous êtes "rocalhanisé". Malgré la température de service élevée, l'ensemble reste frais et digeste, tout en étant sacrément épicé.
Car ce sont vraiment les épices qui dominent, particulièrement en finale où ils explosent dans une véritable symphonie mahlerienne. Vous en prenez plein la g... Pour le coup, on peut vraiment évoquer les jaunes jurassiens avec le curry et la croûte de vieux comté.
Bref, quand je vous dis que Rocalhan est inclassable, je suis tout ce qu'il y a de plus sérieux. Ceci dit, il me semble être une bonne introduction aux vins oxydatifs, jaunes et oranges, car il en présente certaines des caractéristiques sans être pour autant trop typé (ce qui décourage parfois certains). Il sera surtout un excellent compagnons pour les currys, colombos et autres tajines, car la présence d'épices décuple encore ses facultés, le rendant juste irrésistible.
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