jeudi 4 octobre 2012

KEZAKO ou Kézako ? Lequel choisir ?


700 kms séparent les domaines de Sébastien David et de Marc Castan, et tous deux ont eu la même idée d'appeler leur cuvée KEZAKO, car dans les deux cas, ils ont fait un vin qui sort un peu de l'ordinaire et susciterait des questions. Auxquelles ils répondent en chœur sur la contre-étiquette (qui est en fait la VRAIE étiquette puisque c'est là que figurent toutes les mentions légales).


Comme vous pouvez le lire, dans le cas du domaine de Mamaruta, on a affaire à un vin qui a échappé de peu au caniveau, car il devait avoir une acidité un peu élevée par rapport aux critères officiels. Marc Castan aurait pu le désacidifier, mais il s'y est refusé. Ce vin, il faut l'aimer tel qu'il est, et puis voilà !

Dans le deuxième cas, c'est le mode de vinification qui n'est pas classique. Les raisins sont éraflés manuellement (quel travail !), les grains sont ensuite introduits dans des barriques placées sur des systèmes  rotatifs (Roll) où ils vont rester durant 50 jours. Tous les jours, les barriques seront tournées sur elles-même afin de faire une extraction en douceur. Puis le tout va être pressé et élevé en cuve dans une cave creusée dans le Roc calcaire.C'est pour cela que c'est une cuvée "Roll & Roc".


La différence de vin se fait déjà à la capsule : la capsule bleue, c'est celle de Kézako? (Vin de pays d'Aude), et la capsule verte, c'est celle de KEZAKO (AOC Saint-Nicolas de Bourgueil). Aucun jugement à en tirer, bien sûr. Il y a des vins de pays merveilleux et des vins d'AOC abominables...


Kézako? est un 2010, KEZAKO un 2011. Pas de jugement non plus. Cela permet tout de même de tenir compte de défauts de jeunesse du 2011 qui a été mis en bouteille depuis moins longtemps. 


49 mm pour le bouchon de KEZAKO. 43 mm pour celui de Kézako ? La qualité du premier semble supérieure, mais en même temps, c'est un peu normal : KEZAKO est vendu 15 € (13.50 € en ce moment à la boutique), alors que Kézako est à 8 €. Une différence qui permet de se payer un meilleur bouchon.


Robe de Kézako ?


Robe de KEZAKO

Pas de différence marquée. La KEZAKO est juste un peu plus dense. La lumière artificielle ne rend pas totalement justice aux robes : elles sont en vrai  plus pourpres/violacées que sur les photos.

Les NEZ

Kézako ? 

A à un moment, je me suis demandé si je n'avais pas inversé les verres, car on a un peu l'impression d'avoir sous le nez un Cabernet de Loire (précisons que c'est un assemblage Carignan/Syrah). C'est frais, avec une touche de cassis (fruit + bourgeon) et même un peu de poivron.Il y a aussi quelques notes fermentaires, mais elle devraient disparaître à l'aération. 

KEZAKO

Ce qui frappe le plus, c'est le Moka. Au départ, on ne sent que ça, avec du fruit noir mûr en arrière-plan. Au départ, je pense que c'est dû à l'élevage en barrique. En fait, je m'aperçois rapidement que c'est un signe de réduction (manque d'oxygène), un peu comme le fameux "grillé" des vins blancs bourguignons puisque ce Moka disparaîtra totalement après une vigoureuse aération.





Les BOUCHES

Kézako ? 

Bouche ronde, souple, bien fruitée, avec une belle fraîcheur. L'acidité évoquée au début s'est sacrément bien fondue, car le vin ne semble pas sortir de la norme. Si ce n'est qu'il serait tout de même difficile de le placer en Languedoc en le buvant à l'aveugle (si vous cherchez un Pirate pour une dégustation Loire, il est votre homme). Bonne mâche persistante en finale qui apporte du caractère au vin.

Ce qui est surprenant, c'est qu'au bout de 20 mn, du gaz est apparu dans ce vin alors qu'il n'était pas perceptible au départ (est-celui de KEZAKO qui  a demandé l'asile politique à Kézako ?). Du coup, la bouteille a été agitée à son tour. Pas de jalouses, comme ça ;o)

KEZAKO

J'aurais dû m'en douter lorsque j'ai versé ce vin dans le verre : il avait moussé durant quelques secondes. Il contient du gaz carbonique qui rend le vin perlant, troublant les autres perceptions. J'agite donc vigoureusement la bouteille, avec le pouce sur le goulot qu'il faut enlever toutes les 3 agitations pour faire sortir le gaz. Je m'arrête lorsque je n'entends plus le gaz s'échapper. Je m'en reverse un verre, et c'est là que je constate que le Moka ne se sent plus du tout au nez. À la place, du cassis, un peu de poivron, du menthol (mais là, c'est normal, c'est du Cabernet Franc). La disparition du gaz permet d'apprécier pleinement la belle matière en bouche, dense, veloutée, fraîche, avec un fruit intense. La finale exprime avec force le terroir calcaire avec une mâche puissante. 



 Le lendemain...

Kézako? 

Le nez a profondément changé. Il est plus sudiste. Il y a toujours cette sensation de fraîcheur, mais avec des arômes très différents : olive noire, épices, fruits noirs (cassis, prunelle). Bref, la Syrah est sorti du bois. En bouche, le vin a pris beaucoup plus d'ampleur, mais aussi de la densité, avec toujours cette belle acidité qui apporte de la tension. La finale s'avère plus souple qu'hier, avec un supplément d'épices. 

Le côté "vin de soif" s'est dissipé pour faire place à un vin plus distingué et complexe, mais toujours gourmand.

KEZAKO

Le nez semble plus apaisé qu'hier (il a eu le temps de se remettre de son agitation). On est pas dans les senteurs qui "pètent au nez", mais plutôt dans le parfum diffusé discrètement. Toujours des fruits noirs, avec cette note de cassis végétal qui apporte de la fraîcheur. En bouche, là aussi plus d'ampleur, avec une matière qui a gagné en sensualité et en expressivité. Et une finale plus fondue.  Le tout est frais et digeste (il ne fait que 12.5° d'alcool). L'on sent qu'il y a une matière qui pourra supporter une certaine garde, même si l'on peut se demander si elle lui apportera quelque chose. Ce qui est bon dans ce vin, c'est le FRUIT.

VERDICT

Bon, la première chose à retenir, c'est que ces vins ont besoin d'aération (forte + repos) pour être apprécié pleinement. Le carafage (qui n'exclue pas l'agitation pour éliminer le gaz) est une bonne solution.

Après, au risque de vous décevoir, il n'y a pas un vin meilleur que l'autre. Les deux possèdent leur charme, mais demandent à être utilisés différemment.

Le Kézako ? peut effectivement faire un bon vin de "casse-croûte" s'il est servi frais (14-15°). Mais il sera aussi parfait avec des grillades ou une volaille rôtie en étant servi plus chaud (17°).

Le KEZAKO peut quant à lui supporter une belle pièce de boeuf bien épaisse, qui se mariera parfaitement avec sa matière dense et charnue. Il offre l'avantage par rapport à beaucoup de Bordeaux de ne pas être marqué par le bois, même s'il l'a rencontré durant son élevage. Tout en ayant une densité qui n'a rien à leur envier.

TCHIN' !


C'est marrant : on dirait qu'il est en train de mater le verre ;o)

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