J'avais fait la connaissance de l'appellation Bierzo il y a une dizaine d'années, et ce fut un coup de foudre immédiat ! Il faut dire qu'elle réunit tout ce que j'aime : altitude (souvent 500-800 m), nombreuses vieilles vignes, grande présence de schiste; et surtout le cépage Mencia qu'on a longtemps cru descendant du Cabernet franc, et qui s'avère être le fils du Trousseau, cépage jurassien que j'apprécie beaucoup. Bon, après, tous les vins de Bierzo ne sont pas à tomber par terre : Parker a également fait des ravages en Espagne et il y a eu beaucoup de cuvées surmûries et mégaboisées. Mais quand c'est bon, c'est vraiment très bon.
Diego Losada est un enfant du pays. Mais il a passé son enfance et son adolescence à Madrid et Burgos. Lorsqu'il est revenu à Bierzo, il a étudié la chimie et l'oenologie, puis a travaillé pour quelques domaines. Avant de vouloir faire les choses à sa façon, en suivant plus ses intuitions que la science – même si l'une n'exclut pas l'autre. Il a commencé par 3 parcelles en 2013, pour arriver aujourd'hui à 15, arrivant à une surface totale de 5 ha. Les vignes sont travaillées en bio et sont au minimum à 550 m d'altitude.
Au chai, les raisins sont vinifiés soit en cuve de béton brut, soit en vieux fûts/foudres en chêne ou en châtaignier, sans utilisation de pompe ni d'aucun intrant. Le seul ajout (minime) de SO2 se fait juste avant la mise en bouteille.
Diego ne revendique pas l'appellation Bierzo DO. Les vins sont donc en "vin d'Espagne".
Vindemiatrix 2018 (13.50 €)
Vindemiatrix est l'entrée de gamme du domaine. Elle provient de 7 parcelles de vieilles vignes entourant le village de Hervededo. La plupart les parcelles sont des raisins rouges et blancs en complantation (80 % Mencia, 10 % Palomino et 10 %Doña Blanca). Diego les vendang et les vinifie ensemble; comme cela se pratiquait autrefois. Les sols sont principalement argilo-calcaires, et le l'altitude est d'environ 550 mètres. Les raisins sont partiellement égrappés, macérés pendant quelques semaines, et fermenté et élevé dans des cuves en béton brut. Le vin est mis en bouteille sans collage ni filtration,avec juste un minimum de SO2.
La robe est grenat sombre translucide.
Le nez est fin, profond, mêlant la violette, la cerise, la framboise et une pointe de fumée. La bouche est ronde, ample, veloutée, avec une matière charnue, finement pulpeuse, alliant un fruit pur et frais à des saveurs plus minérales.
La finale est fraîche, tonique, avec un fruit encore plus frais, un retour de la violette et de la fumée, et une persistance sur des notes poivrées, crayeuses et saline. Un régal qui possède du fond !
PS : la bouteille a été finie avec un groupe de dégustateurs deux jours plus tard : le nez avait perdu en expression, mais la bouche avait gagné en tension et en finesse. Ce fut le préféré des trois.
1984 Lote 2018 (15.90 €)
Pour la cuvée 1984, Diego s'approvisionne dans trois vieilles vignes situées sur les collines de Priaranza del Bierzo, dans la partie sud-ouest de l'appellation. Les raisins sont récoltés à la main, partiellement égrappés, macérés pendant 7 à 8 jours dans 3 grands fûts de chêne. Le vin est ensuite transféré dans de plus petits fûts de chêne français pour terminer la fermentation malolactique, puis élevé pendant 8 mois. Le vin fini est mis en bouteille sans collage, ni filtration, avec seulement un peu de SO2.
La robe est grenat sombre translucide.
Le nez, d'abord réduit, s'exprime ensuite sur la cerise fraîche, la violette, la framboise, le poivre et l'ardoise chaude.
La bouche allie ampleur et tension, avec une fine acidité vibrante qui étire le vin, et une matière ronde, pleine, juteuse, qui possède du fond en plus de sa gourmandise naturelle. L'équilibre est d'une évidence totale, avec une alliance irrésistible entre fruit et minéralité (cerise et caillou en même temps ).
La finale mâchue au fruit éclatant renforce cette impression : rapidement, le minéral s'associe de nouveau jusqu'à prendre le dessus, et fait de ce vin gourmand un grand vin de terroir. Un coup de coeur !
In Absentia 2017 (29.90 €)
Il reste quelques vignes de Trousseau qui a engendré le Mencia, dont celle qui a donné cette cuvée In Absentia. La vinification et l'élevage se sont faits en barrique de châtaignier. Pas d'intrants ni de filtration. Juste un peu de SO2 à la mise. 300 bouteilles en tout !
La robe est grenat sombre translucide.
Le nez est très "trousseau", sur des notes fumées, fruitées (cerise noire, framboise) et florales (pivoine), avec une touche cacaotée.
La bouche est superbe, tendue par un fil invisible, avec une matière dense, mûre, veloutée, qui envahit le moindre recoin de votre palais. Le fruit frais est omniprésent, vibrant, avec cette touche fumée caractéristique du cépage, renforcé par le terroir de schiste.
La finale d'une insolente gourmandise prolonge tout cela sans interruption, avec une minéralité accrue qui vous submerge, le tout titillé par une pointe de volatile apportant de la vivacité et de la tension. Grande persistance sur la griotte, la terre fraîche et des notes crayeuses/poivrées. Quel vin !
PS : le plus "nature" des trois. Dès le lendemain, la volatile avait pris le dessus, déséquilibrant un peu le vin. Tu ouvres, tu bois !
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* La Senda se traduit par le sentier en français
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* La Senda se traduit par le sentier en français
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