jeudi 28 février 2019

La Nany qu'on aimerait tous avoir


Je vous avais parlé il y a peu du Crémant du Jura du Domaine des ronces. Etant donné le bon retour de nos clients lors nos deux dégustations jurassiennes, nous avons profité d'un réapprovisionnement pour essayer l'autre crémant du domaine, la Cuvée Nany.  Rien à voir avec le précédent : on est ici sur 70 % pinot noir et 30 % chardonnay, et un élevage sur lattes de 4 ans (contre 12 mois  pour l'autre). Afin qu'il garde sa structure et sa fraîcheur dans le temps, la malo n'a pas été faite.  Bref, on bascule dans un autre monde, 

La robe est or rose, parsemée de fines bulles éparses.

Le nez évoque la pêche de vigne, la framboise et le Christmas cake.La bouche est élancée, tendue par une fine et tonique acidité qui se poursuit au-delà même de la finale. Elle est enrobée d'une matière mûre, dense, vineuse, au fruit intense, mais aussi de la salinité. Les bulles, fines et caressantes, apportent de la légèreté à l'ensemble. 

La finale est éclatante, pleine de peps, mariant avec bonheur Acidité, Amertume et Astrigence – le triple A qui nous est cher –  d'autant plus que le très faible dosage ne masque rien : on est dans la délicieuse sauvagerie du Brut Nature, et ce n'est pas pour nous déplaire. La framboise et la griotte ont le dernier mot, soulignées de quelques épices.

Tout comme son petit frère, Nany présente un très bon rapport qualité : à 16.50 €, je ne connais aucune bulle champenoise qui puisse l'égaler – sur Limoux, va falloir tester ;-)



mercredi 27 février 2019

Gras Moutons : le Muscadet tout rond :-)


J'avais lu depuis sa sortie quelques compte-rendus sur les Gras Moutons de la Pépière. Certains lui trouvaient une rondeur inhabituelle. Voulant me faire ma propre idée, j'en ai ouvert une bouteille. Et donc, oui, c'est vrai, il est tout rond, le mouton, mais comme nous sommes au pays du Muscadet, cela n' a rien à voir une rondeur sudiste, comme vous allez le lire maintenant... 

La robe est jaune pâle aux reflets argentés. 

Le nez est fin, mûr, sur la pomme chaude légèrement beurrée, l'amande fraîche et la fleur d'acacia (enfin, de faux-acacia puisque le vrai n'existe pas sous nos latitudes). 

La bouche est ronde, ample, fraîche, avec une matière moelleuse (au toucher –  y a pas de sucre !), confortable, tonifiée par un léger perlant. L'ensemble est évident et digeste (12 % d'alcool), s'écoulant comme une eau de source, sans cette acidité agressive qui a fait la (mauvaise) réputation du Muscadet. 

La finale est marquée par une légère astringence – évoquant une eau additionnée de jus de citron – qui empêche de tomber dans la mollesse, mais là encore,  sans la moindre agressivité. Elle se prolonge pas une sensation crayeuse finement dessoiffante.

En terme d'accord, cette rondeur oblige malgré tout à s'adapter. Ce Gras moutons conviendra mieux aux huîtres plates, noisetées, et sera parfait avec un poisson à chair tendre comme le cabillaud ou un carpaccio de Saint-Jacques. 




lundi 25 février 2019

Brusquembille : il ne vous laissera pas indifférent


Je n'avais pas rebu la Brusquembille depuis presque quatre ans (mai 2015). Entre temps, son assemblage a changé. Son millésime aussi. Pourtant, lorsque je relis mon ancien texte, je m'aperçois qu'il y a pas mal de points communs : réduction à l'ouverture, fraîcheur aromatique, grande tension … et même l'expression bombe, même si je ne lui donne pas exactement le même sens. Il y a aussi certaines certaines différences : ce 2016 me paraît moins consensuel que le 2014. Là, c'est tu adores ou tu détestes. Impossible de rester impassible en dégustant ce vin !

Comme je l'ai annoncé  plus haut, deux heures de carafe ont été nécessaires, car le vin est au départ très réduit. 

La robe est pourpre translucide.

Le nez est fin, fruité, sur la framboise écrasée, la mûre, le poivre blanc, et  une petite touche d'encens.

La bouche allie ampleur et tension, avec une matière soyeuse, d'une intensité aromatique proche de la violence – fruits noirs compotés, poivre timut, garrigue –  et une  énergie qui trace grave pour un "petit vin".

La finale poursuit sans rupture dans l'intensité aromatique et la tension, avec juste une densification de la matière et des épices. Le fruit, lui aussi, est totalement exacerbé. Bref, c'est vraiment de la bombe qui peut enthousiasmer ou faire fuir, car on n'est pas dans la demi-mesure.




jeudi 21 février 2019

BIO à tous points de vue !


Jeff Carrel sort une nouvelle gamme de vins bio, peu ou pas sulfités, mais évidemment dans un esprit "grand public", que ce soit en terme de goût que de prix. Et ici, pas d'élevage boisé : de la pureté, du fruit, et rien d'autres.  Le petit oiseau présent sur les trois étiquettes évoque les  volatiles en plastique qu'il faudra placer à  l'avenir dans les arbres ou en haut des immeubles si on ne change pas notre façon de vivre ; car petit à petit les vrais sont en train de disparaître, et il faudra rappeler aux  générations futures à quoi ressemblait un oiseau. 

Maintenant que j'ai bien plombé l'ambiance, je vous propose de boire pour oublier * ! 


Blanc Pas vu pas pris 2018 (9 € mais prix dégressifs en fct des qtés)

100 % Chardonnay

La robe est or pâle, brillante. 

Le nez est expressif, sur la poire mûre, le melon, le sucre d'orge et une légère touche  beurrée/noisetée. 

La bouche est éclatante de fraîcheur, avec une matière ronde, croquante, digeste et une subtile tension qui  vous happe et ne vous lâche plus. 

La finale tonique allie une fine astringence crayeuse à des nobles amers – agrume, sauge, avec une persistance sur l'écorce de pomelo qui vous laisse la bouche nette.  




Rosé Vu d'en haut  2018 (9 € mais prix dégressifs en fct des qtés)

Cabernet-Franc,  Cabernet-Sauvignon  et Merlot

La robe est entre le pétale de rose et l'œil de perdrix.

Le nez est plutôt discret sur des notes épicées et minérales.

La bouche est élancée, avec une belle tension traçante et une matière étonnamment dense, vineuse, au  toucher moelleux et à l'aromatique intense, très épicée.

La finale poursuit dans la tension,  avec une intensification des sensations : plus d'amer (orange sanguine), plus de fraîcheur, plus d'astringence, plus d'épices  tout en formant un tout harmonieux. Le tout persiste sur la groseille à maquereau et des notes salines.

 ATTENTION : DISPONIBLE A PARTIR DE DÉBUT MARS




Rouge À vue de nez 2018 (9 € mais prix dégressifs en fct des qtés)


85 % Cabernet Franc et 15 % Syrah

La robe est grenat sombre translucide aux reflets violacés. 

Le nez est gourmand, dans un esprit "brut de cuve" sur le coulis de myrtille, une légère touche lactée et une minuscule pointe de ronce et de feuille de cassis qui apporte de la fraîcheur. 

La bouche est ronde, ample, enveloppante, avec une matière  veloutée qui vous tapisse le palais. L'équilibre est le maître-mot de cette cuvée : il y a un fruit mûr expressif  (sans en faire trop), ce qu'il faut de tension (sans la moindre raideur), et de la fraîcheur (sans acidité perceptible).  

La finale possède une mâche affirmée, avec des tanins présents (mais mûrs et déjà bien fondus), et un retour triomphant de la myrtille qui persiste assez longuement, complété par des notes crayeuses. 


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* avec modération



Votre caviste préféré en images sur France3



L'envers du décor en quelques images dans le 19-20 du 20 février à partir de 11min 10s


mercredi 20 février 2019

Aligoté Balorin : or norme


Je n'avais pas encore eu l'occasion de déguster l'Aligoté 2017 de Gilles Ballorin. Je n'irais pas jusqu'à dire que j'avais raté ma vie jusqu'à cet instant – faut pas exagérer – mais c'est clairement une expérience à faire au moins une fois dans son existence, car il ne ressemble à aucun aligoté connu. En effet, il associe à une belle maturité à l'acidité qui a fait la célébrité de ce cépage (et donné au Chanoine Kir d'y ajouter de la crème de cassis). 

La robe est or pâle, légèrement trouble.

Le nez est très expressif, sur le coing confit,  les fleurs de camomille et  tilleul, le miel et le silex frappé. Avec l'aération, arrive la pomme chaude beurrée, qui fait plus "chardo". En tout cas, on s'attendrait plutôt à un vin puissant et opulent.

La bouche est vive, énergique, tendue par une acidité proche du strident qui s'étire au delà-même de la finale. La matière est pure, limpide, évoquant l'eau d'un ru de montagne, avec une minéralité marquée, égayée tout de même par des notes de pomme chaude beurrée. Avec l'aération, la matière prend en densité et en gras, enrobant ainsi un peu plus l'acidité qui se fond mieux dans le décor (donc conseil : carafez votre vin !). 

En finale, l'acidité poursuit sa course, soulignée par le duo amertume/astringence, avec l'impression de mordre dans l'écorce d'un citron, suivi immédiatement d'une expansion explosive qui vous met les papilles en effervescence. C'est pour le moins stimulant, voire dérangeant. Mais d'un autre côté, c'est totalement jouissif, comme peut l'être un mordillement bien ciblé lors d'un moment intime…


lundi 18 février 2019

Pinot noir Denois : bienvenue au 2017 !


Chaque année, j'aime bien déguster le nouveau millésime de Pinot noir de Denois, car l'on sent que le vigneron est un fan de ce cépage et prend plaisir à le travailler. Selon la climatologie de l'année, les vins présentent des profils très différents. À quoi allait ressembler le  2017. Réponse de suite...

La robe est pourpre translucide assez sombre.

Le nez évoque le coulis de framboise et de mûre, avec une pointe d'épice et une touche grillée.

La bouche est ronde, très ample, avec une matière soyeuse, enveloppante, gagnant progressivement en densité, puis en mâche. S'ajoute à cela une tension reposant sur une acidité arachnéenne qui se poursuit au-delà même de la finale.

Cette dernière est marquée par une mâche crayeuse égayée par la framboise confite et le poivre blanc, avec une belle sensation de fraîcheur persistant agréablement.

Conclusion : ma foi, il se présente déjà bien, mais je serais partisan de l'oublier un an ou deux, histoire que l'élevage se fonde totalement et que le vin gagne en complexité aromatique. Par contre, pour l'acheter, c'est maintenant, car les quantités produites sont ridicules, Limoux ayant été touché par la grêle en 2017 (et hélas, également en 2018). 


vendredi 15 février 2019

Billet 100 % Gaure


Après avoir sondé hier notre côté obscur, nous faisons aujourd'hui dans le Gaure. Mais rassurez-vous : rien d'effrayant, bien au contraire : ces deux cuvées n'offrent que du plaisir pour un prix raisonnable. Une belle introduction aux vins de ce domaine de Limoux repris par Pierre Fabre en 2005. Vous aurez certainement ensuite envie de découvrir Oppidum et Pour mon père. Et vous auriez bien raison !




Chardonnay 2017 (10.90 €)

La robe est jaune paille, brillante.

Le nez évoque les fruits blancs bien mûrs – pomme, poire et plus encore coing – la noisette grillée, le miel et le pain toasté.

La bouche est ample,  fraîche et aérienne, avec une acidité arachnéenne qui l'étire élégamment, sans trop en faire. La matière est fine, caressante,  très digeste pour un blanc du sud.

La finale est tonique, dans le style 3 A que j'affectionne : fine Acidité qui se poursuit sur la lancée, Astringence exprimée par des notes crayeuses et l'écorce de pomelo, Amertume du chêne chauffé de la barrique. On retrouve les fruits blancs mûrs complétés par les épices, avec une persistance sur le grillé et le salin.



Syrah-Grenache 2017 (10.90 €)

La robe est grenat sombre tirant vers le violacé.

Le nez est flatteur, sur la liqueur de mûre, la cerise noire, et une touche d'épices douces.

La bouche est ronde, ample, veloutée, avec une matière douce, charnue, qui tapisse le palais, et une belle fraîcheur sous-jacente venant en contrepoint d'un fruit bien mûr.

La finale dévoile une  mâche gourmande, savoureuse, sur la cerise fraîche et le cacao, et une persistance sur le salin/grillé qui rappelle le Chardonnay.

jeudi 14 février 2019

Nous avons tous notre Côté obscur…


… sauf que moi, j'en parle ouvertement sans tabou. Mon côté obscur est sombre, très sombre, rappelant l'encre avec lequel j'écris ce texte. Il est né près de Minerve, haut lieu de l'hérétisme, et dégage des senteurs envoûtantes qui incitent au péché (de gourmandise). Il est né de la rencontre du  vieux et ténébreux Carignan et de l'éclatant Cabernet Sauvignon. Il en résulte une petite bombe qui va vous faire mourir de plaisir. Et c'est probablement cela, mon côté obscur : voir mes clients succomber au péché, et  prendre un plaisir tel que la vie (ordinaire) s'arrête, jusqu'à ce que les dernières gouttes du flacon soient écoulées…


Vous n'allez pas me croire mais la robe est … obscure. Enfin pas totalement. Disons pourpre très sombre, limite opaque. 

Le nez a un côté brun ténébreux assez fascinant : liqueur de fruits noirs, graphite, encre, eucalyptus, menthe froissée, poivron noirci sous le grill…

Dès l'attaque en bouche, vous êtes happé par la tension qui ne vous lâche plus. Elle repose plus sur l'aromatique très fraîche et percutante que sur l'acidité, totalement imperceptible en tant que telle, car fondue dans une matière dense et veloutée, enveloppante. Le tout forme un ensemble très harmonieux, cohérent, réussissant à être à la fois classieux et sexy.  

La tension perçue en bouche poursuit son chemin en finale. Les tanins sortent de leur réserve, tout en restant polis/fondus. C'est une explosion de fruits noirs sublimés par une touche mentholée, avec une persistance sur des notes crayeuses rappelant le plateau calcaire qui a vu naître le vin. 

Une merveille de vin dès aujourd'hui qui pourrait devenir encore plus extra-ordinaire lorsque le Cab' aura basculé sur le tertiaire. Le genre de vin à acheter par caisse entière pour le voir évoluer dans le temps. À 13 € la bouteille, il n'est  pas trop difficile de se laisser tenter…

mercredi 13 février 2019

Barraques : Chardonnay ou Savagnin ?


Comme je  l'ai indiqué dans mon compte-rendu de la seconde soirée jurassienne, j'ai eu l'idée de servir côte à côte les deux cuvées  "Barraques" signés Ganevat : la Chardonnay et la Savagnin. Les deux proviennent de la même parcelle cultivée en bio par le même producteur, sont du même millésime, ont été vinifiées et élevées toutes les deux en barrique avec ouillage durant deux ans, sans ajout de sulfites. La seule différence majeure, c'est le cépage. Et comme vous allez le voir, ça change tout ;-)




La robe est jaune paille, brillante.

Le nez est expressif, sur les fruits blancs mûrs, le beurre frais, la craie humide et une touche grillée (sésame).

La bouche est ronde, fraîche, élancée, avec une chair dense, savoureuse, alliant maturité et digestibilité.

La finale est finement mâchue, avec un retour des fruits blancs légèrement beurrés et une persistance sur des notes crayeuses.





La robe est proche du précédent, légèrement plus trouble.

Le nez fait encore plus chardo que le précédent, mais dans une version "Bourgogne sud" sur la pomme rôtie, la pêche, mais aussi la noisette grillée.

La bouche est beaucoup plus traçante, étirée par une fine acidité, et la matière est plus mûre, presque moelleuse. Plus dense, aussi, avec une intensité aromatique plus appuyée.

La finale prolonge la dynamique avec l'acidité qui s'amplifie et vous pénètre l'âme (rien de mortel, je vous rassure). L'ensemble est intense et fougueux, sur la poire confite bien beurrée, et une persistance sur des notes salines.

lundi 11 février 2019

Casale o Casale ?


Les vins de l'Azienda Casale sont de retour, avec un petit changement par rapport aux années précédentes : le Chianti 2015 arbore cette fois-ci une étiquette "vin d'Italie", apparemment pour des raisons administratives. Vous aurez en cadeau bonus une photo de Giovanni Borella, l'adorable papy qui produit les vins.  Nous avions déjà eu du Chianti Riserva 2011, mais il s'agit d'une mise récente. Le vin est resté plus longtemps en foudre, mais moins en bouteille. Je pense qu'il gagnera à être encavé 2-3 ans pour être à son optimum. 

Les vins ont été ouverts et épaulés 24 h à l'avance avant la dégustation. 




La robe est grenat sombre légèrement évoluée.

Le nez n'est pas très expressif, sur les fruits compotés, le cuir, avec une pointe de volatile  qui apporte de la fraîcheur.

La bouche est élancée, tendue par une fine acidité traçante, avec une matière d'abord fine, enveloppante, gagnant ensuite en densité et en tanins. L'ensemble est frais, équilibré, tonique, marqué par des notes résino-balsamiques très italiennes.

La finale dévoile une mâche crayeuse  de caractère – mais sans dureté –  avec un retour des fruits compotés et du cuir, complété par des épices, et toujours cette niaque résineuse qui vous emmène en Toscane.




La robe est nettement plus sombre, tirant vers l'opaque.

Le nez est également discret, mais nettement plus classe et profond : liqueur de fruits noirs, eucalyptus, graphite...

La bouche est toute aussi élancée, mais l'acidité est beaucoup plus enrobée par une matière dense et veloutée, la rendant imperceptible. La fraîcheur, par contre, est bien là, dans un style plus éclatant, renforcé par des notes plus balsamiques que résineuses. Quoi que... En tout cas, là aussi, c'est la classe au dessus.

La finale est plus fondue, mieux intégrée dans l'ensemble : elle ne fait que prolonger la bouche tout en finissant par se resserrer et devenir intensément crayeuse, puis explosant de nouveau sur des notes mentholées et balsamiques.

vendredi 8 février 2019

Jurassic claque 2


Un  certain nombre de clients locaux ayant été frustrés de ne pas avoir pu participer à notre première séance jurassienne, une deuxième a été organisée mercredi dernier. Le lieu et le menu était (à peu près) le même, mais la plupart des vins étaient différents. Voilà pourquoi je vous relate ici cette nouvelle soirée [ il y a une erreur dans la photo ci-dessus. Saurez-vous la retrouver ? ]


Avec les allumettes au fromage, le seul vin identique à la première rencontre : le Crémant du Jura Brut du Domaine des Ronces. Il faut dire qu'il me plaît beaucoup, qu'il offre un excellent rapport qualité/prix, et que, comme la dernière fois, il a été apprécié par tous les convives. Pour en savoir plus à son sujet, rendez-vous ICI


Avec le toujours aussi bon plateau de charcuteries corses, j'ai amené cette fois-ci deux vins issus du trousseau : le Trousseau 2017 du domaine Pignier – il y a 15 jours, c'était le 2016 – et le Trousseau 2016 du domaine des Ronces. On sent que 2017 a été une année plus solaire que 2016 : le vin de Pignier est un peu plus coloré, plus dense, légèrement plus alcooleux, et a perdu ses notes florales au profit de fruits rouges bien mûrs et d'une (belle !) pointe d'encens. Il reste néanmoins très bon, fin, gourmand et a fait l'unanimité.  Le trousseau du domaine des Ronces a plus divisé l'assemblée : le nez évoque le lard fumé et la rose fanée. La bouche est plus légère, et en même temps plus nappante, déposant un très léger film gras sur la langue. C'est une sorte de mix entre un vieux bourgogne évanescent et une version septentrionale du domaine des Tours. On adore ou on passe à côté *.



Avec le filet de volaille, j'ai servi deux vins ouillés que nous avons reçus il y a peu, provenant du négoce de Jean-François Ganevat : le Chardonnay la Barraque 2016 et le Savagnin ouillé la Barraque 2016.  Même millésime, même terroir, même vinificateur. La seule variable est le cépage. Je reviendrai plus longuement sur ce "match"  dans un prochain billet, mais en voici déjà un résumé : le Chardonnay est très bon, alliant rondeur et fraîcheur. Vous en boiriez avec plaisir jusqu'au bout de la nuit, sans vous lasser **. Il a un seul défaut, en fait : il est servi à côté de son frère Savagnin. Le nez de ce dernier fait encore plus chardonnay qu'un chardonnay, dans un style "Bourgogne sud". On pourrait s'attendre à une bouche lourde, pas du tout : une vive fraîcheur vous happe dès l'attaque et ne vous lâche plus jusqu'à la longue finale. Cette acidité est enrobée d'une matière dense et mûre avec qui elle s'équilibre parfaitement. Une merveille de vin qui a emballé tout le monde. Y a pas, même s'il n'a pas le diplôme,  Fanfan est un Master of wine


Avec le comté, j'ai gardé le même cépage, mais dans sa version "non ouillée" : le Savagnin 2015 du domaine Pignier. Le seul point commun avec le vin précédent est cette tension reposant sur une trame acide, ne vous lâchant pas une seconde. Mais sinon, c'est un autre monde : un nez sur la noix, le curry, la croûte de comté et le pain de campagne qui sort du four. Une bouche d'une grande délicatesse, cristalline et aérienne; contrastant avec une aromatique intense, limite violente. Troublant. La finale poursuit dans le même registre contradictoire, avec l'acidité arachnéenne en fil conducteur. 


Pour finir en beauté,  un financier au citron et une chantilly au pain d'épices, accompagnés d'un Suyquiême de Ganevat.  Cette vendange très tardive (6 décémbre 2004) de savagnin et de vieux cépages jurassiens a été élevée en fût durant plus d'une décennie. On retrouve la trame acide des deux vins précédents dans un style plus exacerbé. Elle s'équilibre superbement avec une matière riche, sensuelle, ultra-confite. On côtoie sans problème les meilleurs liquoreux de la planète. Le mariage avec le citron du gâteau est délicieux, rendant cette soirée encore plus inoubliable !

Bref, à l'instar de notre première séance, on s'est vraiment pris une jurassic claque  :-)

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* Cela dit, il demande une grosse préparation : quasiment une journée en carafe, avec secouage très régulier de celle-ci pour éliminer le gaz. 

**  En plus, il est sans soufre : il ne fait pas mal au crâne et ne rend pas malade ( je plaisante, ne faites pas ça). 


mercredi 6 février 2019

Stein : le riesling réinventé


Encore un vin nature ? Ben oui. Il faut dire que les vins peu ou pas sulfités représentent près de la moitié de nos références. Je ne vais pas vous faire le discours des "vins plus vivants" qui relève plus de la propagande qu'autre chose. Mais c'est vrai qu'ils sont plus changeants de millésime en millésime, le vigneron renonçant à toute intervention œnologique en cas de fermentation difficile, même celles reconnues par le cahier des charges bio.  Donc, oui, ces vins requièrent d'être regoûtés chaque année, histoire que  nous sachions ce que nous vous vendons*. Toutes les dégustations ne sont pas rapportées ici, car si le vin ne m'a pas plus botté que ça,  je m'abstiens de tout commentaire. Mais si ça m'a beaucoup plu, comme ce Riesling Stein 2015, eh bien je vous en parle.

Le riesling réinventé, ai-je écrit en titre. J'hésitais avec cette autre formule : "oubliez tout ce que vous savez du riesling". Car ce Stein vous emmène vraiment ailleurs, sans toutefois tomber dans le trop bizarre/dérangeant. Plusieurs explications : le vin a fait sa malo, gommant l'acidité la plus "agressive" et apportant plus de rondeur – et cette aromatique finement beurrée. L'élevage en foudre a duré près de trois ans, la mise en bouteille ayant été faite juste avant les vendanges 2018. C'est rarissime pour un Alsace. Cela lui apporte une patine qui rappelle certaines soleras champenoises. Et pour finir, cette cuvée n'a pas été du tout sulfitée, ouvrant la porte à une évolution plus "free style".

Ce qui surprend le plus dans ce vin est sa grande douceur tactile, sa non-agressivité, alors que l'analyse technique fournie  par Jean-Pierre Rietsch montre que ce vin est très acide : 8 g/l d'acidité totale et pH de 3.08. Comme quoi, les chiffres seuls n'ont pas une grande signification. La perception sensorielle prime.

La robe est jaune paille, brillante. 

Le nez est bien mûr tout en étant aérien,  sur la pomme rôtie au beurre, la pâte d'amande, la noix grillée, avec en arrière-plan une très fine touche de terpène d'orange qui peut rappeler que c'est du Riesling. Des mauvaises langues diront que c'est oxydé. Pour ma part, je parlerais plutôt de fines notes oxydatives, dans l'esprit d'un vin de Sélosse. Car on n'a pas du tout l'impression d'un vin flingué. Au contraire, la palette olfactive est complexe, changeante, plus fascinante que repoussante. 

La bouche allie ampleur et tension, déployant sereinement une matière douce, aérienne, qui vous caresse le palais. On éprouve une rare sensation d'avoir en bouche un vin à la fois (très) dense et "gazeux", quasi impalpable, avec l'aromatique pomme/fruits secs perçue au nez.

La finale gagne en concentration et en intensité, resserrant momentanément la bouche avant un ultime jaillissement où se mêlent l'écorce d'agrume, la pierre chaude, la pomme et la poire séchées, s'achevant sur des notes crayeuses et épicées.

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* Certains vont me dire que ça devrait être le cas de l'intégralité des vins commercialisés. Tout à fait. Mais ça relève de l'impossible lorsque vous avez plus de 1700 références... 


mardi 5 février 2019

D'humeur lunaire


Comme pas mal de vins naturels – même si celui-ci n'est pas totalement sans soufre – il faut laisser un peu de temps à cette cuvée Lunaire 2016  pour qu'elle se mette en place. Ayant souvent plusieurs bouteilles "sur le feu", ma patience n'est pas trop éprouvée. Mais sinon, c'est assez simple : vous ouvrez la bouteille, vous en videz un verre. Et vous la laissez tranquille jusqu'au lendemain dans la pièce la moins chauffée de la maison. Et le miracle opère sans trop épuiser le dégustateur. 

Euh, sinon, c'est un assemblage de Pinot noir (60 %) et Gamay (40 %), ce qui donne bien au total 100 % (que l'on prononce Saint-Pourçain dans l'Allier). 

La robe est pourpre translucide.

Le nez est fin, gourmand, sur la liqueur de cerise – le petit goût de noyau inclus – la prunelle,  le poivre et une pincée de cannelle.

La bouche est ronde, pulpeuse, avec une chair veloutée qui vous tapisse le palais. L'ensemble est frais, harmonieux, dominé par un fruit (cerise noire, prune rouge) au charme des plus canailles.

La finale prolonge la bouche sans à-coup, si ce n'est un toucher plus crayeux. Mais le fruit est toujours là, avec encore plus de présence et d'intensité, sur une cerise plus "guignolet" dans l'esprit, souligné par des notes réglissées.

lundi 4 février 2019

Un p'tit blanc comme on aimerait en boire plus souvent


Les millésimes se suivent et ne se ressemblent pas. D'où l'importance de goûter et goûter encore. L'année dernière, je n'avais pas trop accroché sur le P'tit Blanc du Tue-Bœuf – je ne vous en avais donc pas parlé. Mais cette fois-ci, la version 2018 m'a vraiment séduit. Si je n'étais pas doté de ce self control devenu légendaire, je m'enfilerais la bouteille à moi tout seul.  Ce qui est plutôt bon signe ;-)

La robe est or pâle, brillante. 

Le nez est avenant, sur les fruits blancs mûrs, l'amande et le beurre frais. À l'aveugle, je crois que je partirais plus sur du Chardonnay que du Sauvignon. 

La bouche est ronde, fraîche, charnue, avec une matière finement pulpeuse. On a la sensation d'une belle maturité – de plénitude oserai-je même – tout en ayant une grande digestibilité. Et à aucun moment, on pourrait soupçonner que ce vin est "nature" – à part cette sorte d'évidence qui va de soi pour certains thuriféraires. Mais qui est loin d'être toujours aussi évidente.  

La finale dévoile une mâche crayeuse, avec un retour des fruits blancs et de l'amande, soulignés par un fin trait amer qui apporte de la niaque, et une légère persistance sur des notes salines et calcaires. 

Bonne nouvelle : il y a un tarif dégressif sur cette cuvée. On passe de 11.90 € à l'unité à 10.50 € par 6 et 10 € par 12. Merci qui ?