lundi 27 juin 2016

Rend son jus : l'irrésistible Jurançon noir


Avec le réchauffement climatique, peut-être verrons-nous resurgir certains cépages que l'on croyait quasiment disparu ? C'est le cas de la Counoise qui permet de produire dans le chaud Languedoc des vins mûrs et gourmands avec des taux d'alcool  de 11.5-12 % (cf Ponpon le cheval). Ça pourrait bien être aussi le cas du Jurançon noir, qui comme son nom ne l'indique pas, est originaire du Lot et Garonne. Pas vraiment surprenant lorsqu'on le sait aujourd'hui qu'il est le fruit du croisement entre le Côt (cépage de Cahors) et la Folle blanche (Charentaise, mais présente en Armagnac). Il donne des vins peu colorés et peu alcoolisés. Un peu à l'antithèse de ce qui était le must il y a 5-10 ans (d'où une surface de plantation qui s'est réduite de plus de 90 % depuis 1950). Mais nous assistons aujourd'hui à un classique retour du balancier : les consommateurs sont de plus en plus friands de vins légers et facile à boire. Ce cépage a donc toutes ses chances, d'autant que son nom est déjà connu ... alors même que les gens ne le connaissent pas ;-)

Louis et Marc Peynavaire (Château Plaisance à Fronton) ont eu la bonne idée de le remettre en valeur. Comme il n'était pas imaginable d'en faire un vin d'exception, ils ont produit ce qu'ils appellent eux-mêmes  un "vin de picole", avec tous les codes qui vont avec. Et en premier le nom décalé Rend son jus , une sorte d'hommage/clin d'oeil à tous ces vignerons qui ont dû contourner durant des années l'interdiction d'indiquer le(s) cépage(s) d'un vin "sans indication géographique". Quand je disais plus haut que le Jurançon noir donnait des vins peu alcoolisés, ce n'était pas une blague : ce vin ne fait que 10.6% d'alc.vol.  !

La robe est grenat très translucide, sans le moindre violacé.

Le nez est fin, aérien et néanmoins profond, sur des notes de fruits rouges (griotte avec son noyau, framboise) et de pivoine, avec de la rafle en arrière-plan et une pointe de fumée.

La bouche est fine et élancée, avec une matière souple, fraîche et fruitée et des tannins imperceptibles. L'ensemble réussit à être à la fois gourmand et élégant.

La finale dévoile une mâche canaille et salivante – entre cerise, épices et fumée – qui vous incite à en prendre direct une autre gorgée. C'est d'une terrible irrésistibilité.

PS : ça tombe bien que la bouteille descende vite, car 24 h plus tard, le vin a perdu de sa gourmandise. Bref, tu ouvres, tu bois. 


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