vendredi 30 juin 2017

Alsace : prendre des chemins de traverse...


Nous avions déjà fait une session Alsace avec le "club Vin étonnants" de Limoges. Il fallait donc se renouveler pour proposer des cuvées très différentes : exit le Pinot gris, le Muscat et le Gewurzrtraminer, pas de crémant non plus. Bon, on garde le Riesling, tout de même, car ce serait péché de l'omettre. 


Pour démarrer avec des toasts (poivron, thon, radis  blanc), deux Sylvaner,  très différents l'un de l'autre, mais encore plus différent du "Sylvaner classique" : acide, austère, maigre, très citronné. Le (mauvais) Muscadet de l'Alsace. Nos deux producteurs ne le voient pas ainsi : chez Schmitt, le petit A du Grand Léon 2015 n'a rien à envier à un Riesling par sa concentration et sa maturité, même s'il ferait plutôt penser à (bon) Muscadet comme ceux de la Pépière (style Gras Moutons). Il y a une fraîcheur importante sans que l'acidité ne deviennent jamais saillante. Chez Stoeffler, le Sylvaner nature 2015 provient des plus vieilles vigne de ce cépage ce qui lui apporte matière et profondeur. L'absence de sulfites libère l'énergie et l'aromatique  des plus fougueuses. J'irais pas jusqu'à dire que l'on a un monstre dans le verre, mais ça dépote bien ! Malgré tout, même s'il n'y a guère de doute sur le côté "nature" de vin, on reste dans un "nature" relativement consensuel, je trouve (mais j'admets que les avis étaient partagés hier soir). 


L'un des participants avait proposé d'amener une bouteille. Sans que nous ne nous soyons consulté, il aussi décidé de prendre un vin qui sort des sentiers battus: un Zind 2010 de Zind Humbrecht. Composé à 2/3 de Chardonnay et 1/3 d'Auxerrois, il est pour cette raison l'un des seuls "vins de France" de toute l'Alsace (le Chardonnay est autorisé pour les crémants, mais pas pour les vins "tranquilles" ). La robe est dorée, le nez très intense sur des notes de beurre noisette, de fruits secs et de grillé. La bouche est dense, au toucher moelleux, profond, avec un bonne acidité qui équilibre  le tout et apporte de la tension. Mais on a tendance tout de même à vite à saturer : on n'en boirait pas plusieurs verres d'affilée. Par contraste, le Riesling Bollenberg 2013 de Valentin Zusslin est beaucoup plus reposant : fin, tendu, élégant, très pur, sans que l'acidité ne ressorte trop. La classe sans esbrouffe. J'aime beaucoup. Ce dernier se mariait nettement mieux avec le saumon "basse-température" (le plat avait été prévu pour lui, pas pour le Zind, soyons honnête). 


Nous passons ensuite au seul rouge officiel de la soirée (il y en a eu 5 autres, en fait, mais totalement hors thème...) : un Pinot noir Bollenberg 2014 de Valentin Zusslin. Ce n'était pas un hasard que je garde le même terroir que le vin précédent. L'idée était de montrer les points communs entre un blanc et un rouge issu du même terroir. Bu seul, on sentait que le millésime 2014 avait donné des vins plus riches que 2013. Mais dès qu'on a attaqué le filet mignon aux cerises, le vin a pris une finesse et une tension incroyables. Le parallèle avec le Riesling paraissait alors évident. 


Et bien non, pas de Munster et de carvi – appelé faussement cumin en Alsace. Mais du comté et du curry. Sacrilège ? Pas du tout, au vu des vins servis : d'une part, un Ni vu ni connu 2007 de Rietsch, un Sylvaner élevé près de 4 ans en foudre sans ouillage*. De l'autre, un Riesling  GC Muenchberg 1997 "NO4" de Patrick Meyer, élevé 4 en fût sans ouillage durant  4 ans, puis ... 15 ans en bouteille ** ! Le premier fait très vin jaune dans l'aromatique (curry, noix grillée) mais il est beaucoup plus rond et aérien, sans rien qui heurte (la femme du chef qui n'aime pas le jaune a beaucoup aimé). Extra ! Le deuxième sent bien le Riesling avec encore des notes pétrolées/terpéniques, mais avec une complexité et une douceur diffuse rarement rencontrées dans ma vie. En bouche, le Riesling – et peut-être encore plus le Muenchberg – sont bien là, dans la tension, l'énergie, l'ampleur. Mais là encore nimbé dans une sorte de voile qui le rend presque irréel. La finale est raccord avec le nez et la bouche, avec un retour des notes terpéniques, d'agrumes confits, aussi. et toujours ce voile d'irréalité qui vous presque demandé si vous l'avez bien bu.... (mais peut-être est-ce ça, un vin sous voile ?). Grand moment, en tout cas. 


Avec le dessert (ananas/sorbet passion), nous finissons avec Riesling VT Muhlforst 2015 du domaine Stoeffler. Très pêche rôtie/mandarine confite au nez, il présent un bel équilibre en bouche, ses sucres et sa texture moelleuse étant largement compensés par son acidité (nettement plus discrète toutefois qu'en Moselle). La finale est nette, sans lourdeur. Voilà un vin moelleux qui ne vous pèse pas en bouche en fin de repas !

Retour de nos aventures en septembre prochain (même si je ne serais pas étonné d'un "off" durant les vacances....)
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* Ne le cherchez pas, ni sur notre site, ni ailleurs. Il n'est plus en vente nulle part. Le vigneron me l'avait offert il y a deux ans lors de mon passage au domaine.

** Pas la peine de chercher. Il ne doit en rester que quelques unes dans le monde. 



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